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La cadence avait ralenti et à présent les chevaux trottinaient vers les zones les plus montagneuses de l'archipel. Sur le dos de son zèbre okapis et enveloppée d'une cape sombre Varinöe pensive, observait silencieusement les mains tremblantes de sa mère, qui tentait de diriger sa monture du mieux qu'elle pouvait.

Ressentant l'inquiétude de sa maîtresse le cheval hennissait et s'agitait nerveusement. La jeune elfe posa alors sa main sur celle de sa génitrice, qui lui adressa un faible sourire. Tout en s'éloignant de leurs luxueuses demeures, la quinzaine d'illustres familles nobles se suivaient angoissées et à contrecœur à l'abri de la fournaise qui se déroulait derrière eux. Et sans avoir eu le temps d'emporter leurs objets précieux, chacun venait d'abandonner l'endroit dans lequel quatre ou cinq générations d'elfes de haute naissance avaient vécu.

Otlun, premier soldat et intendant des Cèdre d 'or se trouvait au-devant d'eux et malgré les bruits lointains d'explosions, il restait concentré sur sa mission, à savoir acheminer en toute sécurité la plus noble des familles vers le mont Ssyale. C'était une nuit sans lune et sans étoiles et l'épéiste de bois avait l'impression de redécouvrir le paysage majestueux de son enfance, à qui l'obscurité donnait une apparence menaçante.

Mais cette nuit c'était à une terre désolée que l'archipel, noyé dans la fumée, ressemblait.

Un soldat se rapprocha de lui et chevaucha silencieusement quelques instants à ses côtés, puis il lui dit :

- Je te salue Ô guerrier de bois.

Voyant le chevalier hocher la tête en signe de salutation il continua :

- Allons-nous rester dans les collines jusqu'au lever du jour ?

- Frère chevalier, nous resterons jusqu'à l'aube dans le mont Ssyale.

L'autre soldat déglutit puis fit brusquement demi-tour. En se retournant Otlun le vit chuchoter à l'oreille de l'actuel patriarche des Chênes d'or qui cria :

- Est-ce vrai !? Est-ce vrai Otlun que tu veuilles nous guider vers le mont maudit !

Tous comprirent qu'ils parlaient alors du mont Ssyale et une vague de stupeur et de colère envahit le cortège.

- As-tu perdu la tête !? Beugla l'un.

- TON MAÎTRE VEUT-IL NOUS TUER ? S'écria un autre patriarche.

- S'il cherche à nous détruire c'est qu'il est derrière cette horrible attaque ! Répondit avec fureur le sapin d'or.

Le chahut et les protestations laissèrent d'abord le soldat muet, car depuis le départ il avait conscience que cette idée ne plairait jamais aux autres elfes. Lui aussi avait été effaré d'entendre les ordres de son maître, mais c'étaient les ordres et il ne comptait absolument pas commencer à désobéir. Il fallait être du clan des elfes de bois pour comprendre l'inquiétude qu'inspirait le mont Ssyale.

Logé au milieu de l'océan de l'extrême ouest, l'archipel de l'empire des elfes ressemblait à un énorme soleil vert. Au centre de celle-ci, l'on pouvait apercevoir un immense cratère dans lequel a été construit la grande basilique du roi aux dômes rouges et aux 25 colonnes. Dans ce même cratère et tout autour du palais, la place royale faite de marbre et d'écumes de mer minérales scintillait. À quelques mètres de là, bâties entre l'eau et la terre de l'archipel, d'épaisses et gigantesques fourmilières dans lesquelles vivait le peuple, s'élevaient telles des colonnes tandis que des chaînes de montagnes verdoyantes et des forêts paradisiaques les surplombaient.

C'est sur ces collines que se trouvaient les tours de guet et les villas des nobles arbres d'or, intimes et protecteurs du roi suprême des elfes. L'endroit fascinait tout être vivant qui l'avait seulement aperçu au loin ou s'était échoué sur ses côtes, les elfes du clan des bois, étaient fiers de cette terre que les arbres roi leur avaient offerte, après que leur héros et premier souverain Ogün le bois, ait vaincu et contraint à l'exil l'effrayant dragon opalin. Néanmoins aucun d'entre eux ne s'aventurait prés de l'imposant mont Ssyale, qui constamment masqué par la brume, abritait, selon eux des êtres maudits.

Chroniques de la guerre entre le renard et le Bois d'orOù les histoires vivent. Découvrez maintenant