Chapitre 9

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                     Chapitre 9
On se leva le lendemain matin, les cernes aux yeux et une mine boudeuse sur le visage. Seuls Anna et Chuck avaient bien dormi. On se remit en route vers le sommet, bien décidé à quitter ce mont gelé où la glace régnait en maître. Seule Anna savait que ce n'était pas la glace qui régnait sur ce lieu, mais quelqu'un qu'elle connaissait bien.
Une fois presque arrivé en haut, un épais brouillard se leva, et je reconnu la même odeur indéfinissable qu'avec le compagnon de Gary. J'entendis Anaïs crier, puis plus rien.
"-Regroupons-nous ! ordonnais-je sans vraiment savoir si les autres étaient encore là. Je sentis la douce main d'Anna et celle de Chuck. Je pris un coup dans l'estomac et s'en fut de même pour mes deux camarades. Anna réagit au quart de tour et créa un dôme de glace autour de nous. Le brouillard se dissipa à l'intérieur du dôme et je vis que l'inconnu m'avait entaillé entaillé le ventre, les bras d'Anna et le dos de Chuck.
"-Il faut sortir d'ici, on ne peut pas laisser Anaïs dehors ! s'indigna Chuck, les mains sur le front, une inquiétude sincère sur le visage.
-Il ne la tuera pas ... marmonna Anna. Pas tout de suite, en tout cas ...
-Qu'à tu dis, Anna ? demandais-je sur le même ton.
-Qu'il ne la tuerait pas ... Il n'est pas comme ça ...
-Qui ça ? interrogea à son tour Chuck.
-Liam, mon frère."
Avec Chuck, nous ne pûmes répondre que par des hoquets de surprise, nos visages exprimant parfaitement notre désarroi. 
"-Oui bon, on va pas rester bloqué dessus toute la journée ! nous réprimanda Anna.
-Oui, répondit Chuck, une petite moue sur son visage.
-On va délivrer Anaïs ! m'écriais-je, en essayant de paraître aussi optimiste que possible.
-Non, je t'arrête, on ne va nulle part ... me répondit Anna en s'asseyant sur le sol dur et froid.
-Mais pourquoi ? demanda Chuck.
-Il se montrera pour négocier, lança Anna, les yeux d'un bleu aussi glacial que la montagne."
Je me mis à réfléchir à une stratégie pour sauver Anaïs des dangereuses griffes de Liam.
À s'en tenir aux propos d'Anna, son frère avait pour projet de négocier avec nous, mais ne tiendrait pas son engagement. Il nous fallait donc rentrer dans son jeu pour  le coiffer sur le poteau. Si on examine sa technique : la désorientation de ses ennemis et l'isolement dû à de la fumée, puis en enlever un pour s'en servir de monnaie d'échange.
S'ils avaient possédé d'une force de frappe suffisante, ils auraient sûrement attaqué de front.
Le problème était que ne pouvions être sûr de rien, car même si cette technique révélait sûrement un manque de puissance, c'était peut-être justement ce que cherchaient Liam et ses troupes.
Pour pouvoir agir, il faudrait faire quitte ou double ... Si une fois la négociation finie, ils amenaient Anaïs avec un petit comité, pas plus de cinq personnes, nous pourrions tenter d'intervenir mais si une douzaine d'hommes venait, nous serions obligés de respecter le plan, ce qui ne nous arrangerais guère.
J'expliquais le fruit de ma réflexion à mes compagnons.
"-C'est de la folie pure de tenter ça ! s'écria Anna.
-Mais c'est tout ce qu'on peut tenter, compléta Chuck."
Chuck n'avait pas bu une goutte d'alcool depuis la mort de Jack. Il répétait les mêmes erreurs à la mort de chacun de nos équipiers : il ne buvait plus pour les honorer et quand il se rendait compte qu'il n'arrivait pas tenir, il se remettait à boire. Au début, c'est pour oublier la mort et ensuite pour oublier sa faiblesse.
Je ne lui laissais que quelques jours avant de reprendre sa consommation habituelle.
"-Donc, répondis-je en m'essayant à mon tour, il ne reste qu'a attendre et se reposer."
J'étendis mes mains derrière ma nuque, rabattis mon chapeau de paille sur mes yeux et m'endormis.
Je fus réveillé par des petits coups de pieds d'Anna, qui se transformèrent peu à peu en grandes frappes. Je me relevais et remis en place mon chapeau de paille. La barrière de mon amie était détruite, ou plutôt elle avait disparue. Aucun débris et aucune marque sur terre.
"-Que-ce qui c'est passé ? demandais-je d'une voix endormie.
-Madame a vu une branche tomber d'un arbre et à enlevée son champ protecteur. annonça Chuck, tout en regardant Anna d'un air accusateur.
- Si vous ne me croyez pas, regardez plutôt ça ! lança cette dernière en nous tendant la branche en question."
Je l'examinais en détail et remarquais une minuscule feuille de papier roulée et peinte de la couleur du bois. Je la décrochais délicatement et me mis à lire à haute voix :
"-Nous pouvons discuter en haut de la montagne, nous vous donnerons plus de détails une fois là-bas"
Sans un mot, nous nous mîmes à grimper, pensant à nos retrouvailles avec Anaïs.
Il était environ quatre heures de l'après-midi quand nous arrivâmes au sommet.
Je mis mes mains au dessus de mes yeux pour distinguer des silhouettes qui étaient dos au soleil. Elles tenaient fermement une personne  que je reconnu aussitôt.
"-Lâchez la immédiatement ! m'écriais-je.
-Ou sinon ? me nargua un inconnu, un peu à l'écart du groupe.
«Sûrement Liam ... pensais-je »
Je ne pris pas la peine de répondre, je claquais juste une fois des doigts.
Ce fut le dernier son qu'ils entendirent. Un simple claquement, et ce fut tout. Une déflagration violente partit du dos d'Anaïs.
Les hommes furent littéralement réduits en cendres. Seuls deux hommes étaient encore debout : Liam, restait à l'écart et une femme, semblant avoir une armure d'écailles.
Je vis mes compagnons, interloqués. Seule Anaïs comprenait ce que Jack voulait dire par " la protéger ". La pièce qu'il lui avait donné était en fait une bombe sonore : si un bruit particulier se fait entendre, la pièce explose. Un mécanisme simple mais mortel. 
Liam, le visage écarlate de rage, lança la contre attaque : une horde de soldats gelés sortit de la paume de sa main.
Anaïs arriva à nous rejoindre avant que ces blocs de glaces, avant que ces choses ne nous encerclent. Liam lança une nouvelle bourrasque et les gardes s'en servirent pour s'armer de lances et de couteaux. Ils resserrèrent tellement leur cercle que le bout de leurs armes menaçaient de nous entailler les flancs.
Leur chef, visiblement calmé, vint nous narguer :
"-C'est une bonne chose que vous ayez tué mes hommes, ceux là sont bien meilleurs ! annonça Liam, en désignant du menton le cercle."
Je remarquais soudain qu'Anaïs avait des menottes faites en acétol : un matériau capable d'annuler les pouvoirs.
Ce matériau est très solide et nous ne parvînmes pas à enlever les terribles entraves de notre amie.
Nous étions donc trois contre une armée de glace, le frère d'Anna et une mystérieuse femme faites d'écailles. Une rude bataille allait s'engager sur cette montagne.

Carnet d'expédition n•1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant