Chapitre XV - Partie 2

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– Cette gamine est douée.

Les paroles soufflées par le maître Loistava parvinrent de loin à Mayele. Le garçon, comme le reste de la caravane était fasciné par la performance de la jeune femme. Ce qui le perturbait résidait dans le fait qu'il savait pertinemment que Kuraja ne croyait en rien de ce qu'elle racontait. Et pourtant...

– Je dois expier ! Je veux être pardonné et entendu !

La voix grave du fameux Gladir raisonnait clairement et fit frissonner Mayele. Imire l'avait observé assez longuement pour qu'il ne soit plus un visage anonyme pour leur petit groupe d'intrigants. Mayele se pencha sans même s'en rendre compte, quel secret le soldat récalcitrant avait-il à donner pour...

Un « cri » de loup le fit sursauter. Le garçon tourna la tête juste assez vite pour apercevoir la grimace qui tordit le visage de son maître. Son professeur le regarda en haussant les sourcils. Légèrement agacé de ne pas pouvoir connaître le fin mot de l'histoire du soldat, le garçon se mit tout de même en route. Le signal d'Imire ne pouvait indiquer qu'une seule chose : la rencontre allait avoir lieu.

Sa disparition fut facile, Kuraja avait réussi son pari : personne ne patrouillait plus autour des roulottes. Il courut se réfugier dans l'obscurité des bois alentour, les plis de sa propre cape sombre bien serrés autour de lui. Il crut se perdre plusieurs fois. La forêt prenait toujours une dimension monstrueuse la nuit tombée. Les branches se transformaient en bras crochus, les yeux jaunes des animaux nocturnes guettaient chacun de ses pas. Ses pieds se prirent plusieurs fois dans des racines et, seule l'écorce rugueuse d'un chêne, l'empêcha de chuter au sol.

Il se releva difficilement et avisa les environs. Il n'était pas fait pour ce type d'exercice. Un éclat de lumière l'attira et il se mit à courir dans sa direction. Alors qu'il s'en rapprochait et que des échos de voix lui parvenaient, il fut brutalement tiré sur le côté. Sa tête se cogna durement au tronc d'un autre arbre. Mayele, paniqué se figea et ouvrit grand les yeux sur... ceux bien plus calmes d'Imire. Le petit s'était collé, sa petite main plaquée contre sa bouche. Il attendit que Mayele hoche doucement la tête avant de le libérer et de s'éloigner en direction de l'agitation.

– Ah le môme est de retour ! s'écria d'une voix forte un inconnu. Alors, tu nous as apporté la lettre du capitaine ? Bon gamin, pas bavard, mais efficace.

Mayele pencha doucement la tête et vit enfin de quoi il en retournait. La silhouette minuscule d'Imire se découpait à peine à travers la faible lumière dégagée par deux torches. Celles-ci étaient tenues par des bonhommes à la carrure solide. Mayele plissa les yeux d'ici il ne pouvait pas voir grand-chose. Leur maître ne l'avait pas formé comme il avait commencé à le faire avec les autres et l'enfant se trouvait un peu désemparé. Les comptes rendus de ses camarades, et le résumé qu'il en faisait à son professeur, étaient les seules choses qu'il avait à faire. Rien de tout cela ne l'avait préparé à une mission de reconnaissance dans la nature. Le garçon n'avait rien d'un filombre !

La vision d'un Imire lui montrant ce qu'il avait appris le jour même avec le maître lui traversa l'esprit. Le petit brun ne parlait toujours pas et se contentait donc de mimer tout ce qu'il faisait ou voyait. Mayele décida d'imiter certaines de ses techniques. Il se mit en position accroupie et s'approcha tant bien que mal de la lumière et des hommes qui avaient apostrophé Imire. Un bruit de pas traînant et d'habit qu'on chiffonne le fit plonger à terre.

– Qui va là ? hurla une voix bien trop proche de lui à son goût.

– Un problème ? répondit la voix grave de tout à l'heure. Tu as entendu quelqu'un Sateq... Tinezar est censé s'être occupé de faire diversion.

La Chute du JoyauOù les histoires vivent. Découvrez maintenant