La fête de Léonie

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Le samedi suivant à 20h23, Francis se trouvait là, seul, assis sur le canapé. Les yeux rivés sur le temps qui passait. Tandis que tout le monde dansait et que les lumières vibraient sur les murs, il était entouré mais se sentait seul. Terriblement seul. L'odeur de l'alcool, des chips et de la transpiration lui donnait la nausée. Il n'était pas d'humeur de toute façon. Il avait trop chaud. Vous vous demandez comment il en est arrivé là ?

Un peu plus tôt ce jour là, il y était préparé. Ajustant son blouson préféré et ses nouvelles chaussures, il s'était senti propre et beau. Son image dans le miroir le mettait en confiance tandis qu'il fixait ses cheveux avec du gel. Tout devait être parfait, il était venu pour s'amuser de toute façon. Et puis il avait hâte de voir les amis qu'il ne voyait pas souvent...il avait hâte de voir Apollo. Une semaine était passé, les choses avaient changé. Apollo enlaçait Léonie en premier en arrivant au collège. Il avait l'impression, souvent, d'être à la deuxième place.  Mais, Francis s'était finalement réjoui pour son pote et sa possible conquête du soir. Il s'était dit que peut être lui aussi pourrait trouver quelqu'un cette nuit... et s'en vanter. Peut être alors qu'Apollo serait jaloux de sa copine, et que Francis lui manquerait. Même si, cela devait être le moindre de ses soucis.

Quand Apollo le vit arriver il s'écria :

« Beau gosse ! »

Francis sourit et lui tapa dans l'épaule joyeusement.

« Toi aussi. »

Apollo lui fit un clin d'œil avant de l'emmener vers la salle principale. La fête avait déjà commencé. Francis reconnut certaines personnes, d'autres moins et d'autres pas du tout. Il ne connaissait pas très bien les amis de Léonie, il ne connaissait pas trop Léonie non plus. Francis ne l'aimait pas, elle cherchait toujours de l'attention, elle rigolait fort, elle était très collante... surtout avec Apollo. Alors tandis qu'il s'avançait dans cette fête, il se sentait plutôt irrité. On aurait même dit, un peu nerveux.

Mais Francis suivait Apollo, lui faisant confiance. Et ça se passait tellement bien ! Leur chanson préférée passa...leur chanson. Apollo se tourna vers lui, un sourire grand jusqu'aux oreilles. Et ils chantèrent jusqu'à en perdre la voix. Ils dansèrent jusqu'à ne plus sentir leurs jambes. La foule était grande et bruyante mais on aurait dit qu'il n'y avait qu'eux sur la piste de danse. Ils étaient ensemble et Francis semblait être la priorité d'Apollo. Ils étaient redevenus comme avant, l'époque où aucune fille ne pouvait les séparer. La joie qui explosait dans son cœur ne s'arrêta pas. Il trouvait que les lumières multicolores qui s'échangeait et qui tournaient sur le visage d'Apollo, le rendait beau. Encore plus qu'avant. Si c'était possible.

Au bout d'un moment, Apollo était trop fatigué pour continuer à danser. Il invita Francis à s'asseoir a côté de lui sur le canapé. Ils passèrent devant le bar, attrapant deux bières puis ils se vautrèrent dans le canapé avec un soupir de contentement. Ils se regardèrent et éclatèrent de rire, l'énergie les rendait un peu ivres. Apollo regardait les gens danser tandis qu'il parlait de tout et de rien, livrant ses nouvelles histoires à Francis qui écoutait attentivement. Comme au bon vieux temps. Francis espérait que ça allait durer.

Mais quelque chose vint les interrompre. Quelque chose en forme d'une adolescente souriante en jolie robe noire de soirée. Quelque chose sous forme de Léonie. Apollo s'arrêta net dans sa discussion.

« Hey Léonie. »

Les joues de Léonie se tintèrent de rose.

« Salut Apollo. Tu viens danser ? »

Elle jeta un rapide coup d'œil à Francis. Apollo se leva laissant une place vide dans le canapé.

« Bien sur. »

Naturellement ils enlacèrent leurs doigts et se dirigèrent vers la musique. Même pas un signe d'au revoir. Ils laissèrent Francis seul avec lui même. Il regarda sa montre, 20h23. Il se sentait déjà à bout de forces. Mais Francis était très confus.

Maintenant qu'il était seul, il allait pouvoir réfléchir. Beaucoup de questions se bousculaient dans sa tête. Il avait l'impression de ressentir une mini crise identitaire. Il ressentait comme des papillons dans le ventre depuis qu'ils s'étaient vus avec Apollo à cette soirée. Pourquoi ? Il n'avait pas pris d'alcool, pas encore. Et pourtant il avait la tête qui tournait et le cœur qui battait très vite. Il avait eu le temps de se reposer sur le canapé, donc ce n'était pas la fatigue d'avoir dansé. Alors quoi ? Pourquoi cet amas d'émotions soudain. Quel message essayait-on de lui faire passer. Une idée... ici depuis un moment grandissait comme un doute dans son esprit. Une idée qu'il repoussait comme il le pouvait. Une idée dangereuse mais si belle. Alors tandis que ses idées se battaient entre elles, le temps passait. Et enfin, la conclusion était là. Il ne pourrait pas l'éviter pour toujours. Il devait se résoudre à l'accepter.

Francis était amoureux. Amoureux d'Apollo.

Mais une soudaine tristesse l'envahit. Apollo ne l'aimerait jamais de cette façon. Apollo aimait Léonie. Apollo aimait les filles. Apollo aimait les filles ? Francis et lui n'avait jamais eu de discussion a ce sujet. Ils s'étaient dit qu'ils rentraient tous deux dans la « norme ». Mais même si Apollo ne l'aimait pas pour l'instant, il n'était pas en couple...pas encore. Peut être pouvait il changer d'avis. Fallait-il toujours avoir de l'espoir ? Francis opina qu'il serait beaucoup plus malheureux de ne pas savoir la réponse. Il préférait se faire rejeter que de ne jamais savoir ce que ressentait Apollo. Francis ne savait pas d'où venait ce rare courage mais il devait affronter sa peur. Il devait tout avouer à Apollo. Il avait tout à perdre. Même s'il pouvait tout perdre il le perdrait, juste pour savoir, pour avoir un peu d'espoir. Car l'idée qu'Apollo puisse ressentir la même chose lui donnait le tournis. Un vertige euphorique.

Il se leva de son canapé, le cœur battant à la chamade. Ses yeux cherchèrent Apollo dans la foule mais en vain. Il fallait se rendre à l'évidence, Apollo et Léonie n'était plus sur la piste de danse. Etait il trop tard ? Il s'avança et se fit bousculer de partout. La musique était très forte mais les battements de son cœur prenaient le dessus. A travers la foule il sentait l'air frais provenant de dehors. Il suivit cet air, la chaleur l'étouffait. Il se glissa parmi les gens et enfin... il l'aperçût. Sa touffe blonde dans le vent. Il était assis dehors sur une chaise en métal, seul. Aucune trace de Léonie. Il contemplait. Peut être qu'il n'était pas trop tard. Peut être que rien ne s'était passé. Cette pensée rassura Francis qui parvint enfin à se faufiler hors de la foule. Laissant la musique derrière il s'approcha d'Apollo le pas chancelant. Apollo se retourna, un sourire sur le visage quand il le reconnut.

« Ça va ? »

Francis s'assit sur une chaise a cote de lui.

« ...Oui. »

« Ok »

Ils se regardèrent en silence. Comme si une force inconnue s'était mise entre eux. Francis soupira formant une buée d'air frais.

« Je dois te dire quelque chose... »

Apollo hocha la tête.

« Moi aussi. »

Devant Apollo, Francis retrouvait sa peur. Il ne parvenait pas à dire quoi que ce soit à part :

« Commence. »

Apollo se mordit la joue puis esquissa un petit sourire.

« Je sors avec Léonie... Elle m'a embrassé. »

A l'intérieur de Francis tout s'effondra. Il se sentit terriblement bête. Il ne pourrait rien dire maintenant. Il s'efforça de sourire.

« Je suis content pour toi. »

Puis il prit une gorgée de bière qu'il avait gardé dans la main. Un mur était ici à présent, entre les deux. Un mur froid et infranchissable. Le liquide amer lui brula la gorge et il ravala son envie de pleurer.

Apollo et FrancisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant