Chapitre 11 - L'attaque

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Un million de reflets iridescents d'un soleil naissant se réverbéraient sur le miroir et éblouissaient Adélie, alors qu'Églantine apportait de ses mains blanches la touche finale à sa tenue : un pendentif en diamant brillant comme un soleil.


— Vous voilà fin prête, Madame. J'espère que vous ne regrettez pas de m'avoir laissé la chance de vous aider ce matin.


C'était la première fois que la bonne officiait en tant que camériste, après des semaines de suppliques auprès de sa maîtresse.

La comtesse se pencha vers la glace et inspecta son reflet. Une ombre nacrée de couleur pêche couvrait ses paupières et s'accordait à merveille avec son teint frais. Sa bouche se parait d'un framboise délicieux, assorti aux rubans qui ornaient sa robe en dentelle blanche. Enfin, elle porta ses doigts à son cou et caressa avec délicatesse la pierre qui y pendait.


— Merci beaucoup, Églantine. C'est parfait. Que diriez-vous de poursuivre cette expérience les prochains jours ?


Le visage de la servante rayonna et Adélie la vit réfréner un saut de joie, avant de se courber dans une élégante révérence. Il faut dire qu'elle n'avait jusqu'alors jamais ressenti le besoin de se faire assister dans sa présentation. Mais elle devait admettre que se faire choyer ce matin lui avait été fort agréable.


— Avec plaisir, Madame ! Merci pour votre confiance, Madame.


Un sourire accroché aux lèvres, la comtesse la congédia d'un discret signe de la main. Églantine quitta la pièce avec contenance, mais le bruit de ses pieds sautillant contre le parquet résonna et arracha un éclat de rire à la maîtresse de maison.

Adélie se leva et se détailla encore une seconde. Il ne manquait rien à part un nuage de parfum savamment choisi. D'un pas léger, elle se dirigea vers son précieux coffret et en souleva le couvercle. Une main erra, indécise, au-dessus des flacons, avant de saisir l'un d'entre eux. Elle enleva le capuchon avec prudence et huma l'effluve suave d'une eau de rose relevée d'une note de gingembre. Apposant la bague de la bouteille contre l'intérieur de son poignet, elle la retourna d'un geste bref et expert. L'exquis liquide brillait en un petit cercle sous la lumière. La comtesse frotta ses poignets, puis à l'aide de son index et son majeur droit, elle récupéra un peu d'essence, qu'elle apposa derrière ses oreilles. Elle rangea soigneusement le contenant, referma la boîte et, lissant une dernière fois sa robe, sortit à son tour, ses talons frappant le parquet sous la démarche guillerette qui ne l'avait pas quittée depuis la condamnation de son père.

Sa joie irradiait alors qu'elle arriva dans le hall, où ses employés exhibaient une mine ravie et allaient bon train. Près de l'escalier, un Thibault radieux l'attendait, une missive à la main. L'insouciance et le bonheur qu'affichait Adélie lui réchauffèrent le cœur.


— Un courrier de Monsieur Helaire, Madame.
— Ah, il doit s'agir du plan d'investissement que je lui ai demandé. Merci Thibault, vous pouvez le déposer dans mon bureau, je le regarderai en détail à mon retour du palais.


La nouvelle délivra le jeune homme du dernier poids qui pesait sur sa poitrine. Il entrevoyait enfin un avenir sans la marquise de Callès. Il camoufla autant que possible son soulagement et poursuivit.


— Comme vous voudrez, Madame. Dois-je faire apprêter la voiture ?
— Oui, s'il vous plaît.

Intrigues à la Cour [1]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant