Chapitre 2: Sujet n°2

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Chapitre 2

Sujet n°2

 

 

     « Souvent la peur d’un mal nous conduit dans un pire », N. Boileau.

     -Stop !

     De l’autre côté de la vitre de la salle de sport, mon instructeur relève la tête sans toutefois arrêter le tapis de course. Il me toise avec une totale indifférence avant de continuer à prendre des notes. L’ordinateur, lui, voit bien que je suis arrivé au bout, mais avec Max comme avec mon père, il faut toujours que j’en fasse plus. Je ne connais que trop ce regard, ce regard qui à lui tout seul vous fait savoir que vous êtes décevant, que vous êtes un moins que rien, un incapable.

     Ils m’en demandent encore plus depuis que j’ai été sélectionné pour les Jeux. Mais contrairement à ce qu’ils pensent tous les deux, je donne déjà mon maximum en temps normal et je ne suis guère capable d’en faire plus. Depuis des années je ne cesse jamais de donner tout ce que j’ai pour ne plus voir ce regard méprisant dans les yeux de mon père. Mais rien n’y fait et là, je suis vraiment à bout.

     -Pourquoi tu t’arrêtes de courir ?! hurle Max alors que je descends du tapis.

     -Courir n’est pas la seule chose que je vais devoir faire dans cette arène.

     Je remets mon IP en mode « Normal » et enfile mon tee-shirt pour sortir de la salle. Mais avant que je ne franchisse la porte, Max me rejoint et m’empoigne le bras pour me retenir. La pression des ses doigts sur mon biceps me fait l’effet d’une décharge si bien que d’un geste vif, je me libère de son emprise pour faire plusieurs pas en arrière. Les yeux fixés sur son bras de peur qu’il ne recommence, je mets dans mon dos la main sur la poignée, prêt à sortir.

     -Je suis désolé, concède Max qui me regarde avec inquiétude.

     Je me retourne alors et prends la porte. La bouffée de chaleur qui est montée en moi s’estompe sous l’air plus frais du couloir. Je longe celui-ci jusqu’à mon dortoir dans l’optique de prendre une douche mais le Général hèle mon nom au loin. De l’autre bout du couloir, il me fait signe de revenir sur mes pas. Anxieux, je me hâte et me présente au garde à vous devant le supérieur de mon père.

     -Repos Palder.

     Ce grand homme d’une quarantaine d’années a une carrure si impressionnante qu’il impose forcément le respect.

     -J’aimerais que tu te consacres à la préparation des Jeux, il est important que tu réussisses. Oublie ta séance de Qi-Gong pour aujourd’hui et va plutôt voir le Colonel White.

     -Oui mon Général, m’exécuté-je.

     Déçu à l’idée de rater une séance, je me rends tout de même au dortoir pour prendre une douche avant d’aller m’entretenir avec le Colonel.

     J’ai pour habitude de me rendre dans une zone verte pour faire un peu de Qi-Gong avec maître Joshi. Ce passe-temps m’apprend à maitriser mon énergie vitale et à me sentir mieux dans mon corps. Sur la base, personne ne croit en l’efficacité de cette discipline et pourtant, en m’aidant à évacuer ce qui me mange de l’intérieur, elle me donne l’impression d’être plus fort. Cependant, elle ne me donne pas la force de tenir tête au Colonel, ni même à mon père. Je n’ose pas imaginer les représailles si je n’allais pas voir White à la brigade.

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