Paradoxe

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Pensées, désordonnées, persistantes, qui continuent à projeter leurs ombres sur le chemin de mes jours. Difficulté à vivre, symptôme assez récurrent: excusez-vous de ne pas pouvoir mettre mes pensées en veille.  Quelques fois, j'aimerai tellement les ignorer, les supprimer, comme j'ignore les réveils, ce qui explique mes légers retards ces derniers temps. A bout de force, à bout de souffle, sans envie, sans désir, sans plaisir. Épuisée, et chaque légèreté entraîne une réflexion profonde, une anticipation de toutes les possibilités imaginables de l'effondrement d'un bonheur parfait. Anticipation qui me mènera un jour jusqu'au paroxysme de la folie, de l'abandon de soi, et chaque pensée m'achève un peu plus et m'entraine vers ma perte. Difficulté à vivre, et je ne répèterai jamais assez fort. Pourquoi je n'arrive pas à être normale? Pourquoi je suis incapable de lâcher prise, de laisser le courant m'emporter vers un futur non planifié? Pourquoi chaque mot pèse sur moi, chaque action affaisse lentement mais méticuleusement mon être ? Quelques fois, j'aimerai simplement être moi même, sans devoir à démentir toutes les idées reçues qu'ont les gens de moi.
Je démentis. En affichant le contraire de ce que je suis, en riant aux éclats sur des sujets futiles sans forcément y penser ou établir un lien logique. C'est comme si mes pensées, épuisées à leur tour par la gymnastique de l'anticipation, s'arrêtent, s'éteignent enfin. Mais la raison les suit inévitablement.
Ce désir de contrôle se transforme alors en dénuement total de raison. Je sais que mes propos peuvent paraître abstraits, ou même insensés. Mais c'est vrai: ma raison lâche prise.
Enfin affranchie de ces pensées qui me hantaient, je deviens folle. Je ne pense pas. Je n'anticipe pas. Et dans cette euphorie incontrôlée, je deviens vulnérable. Rien ne m'importe plus, rien n'a d'importance et le futur hasardeux n'a pas lieu d'être, puisqu'à cet instant précis, il n'existe plus.
Chaque nuit me parait alors éternelle. Je me surprends à espérer, au plus profond de mon être, que le soleil ne se lève finalement pas, que le temps stagne enfin et que cette euphorie ne disparaisse plus jamais.
Prise dans une vague déferlante de folie, je divague, ou devrais-je dire, je me noie. Je ne pense pas une seule seconde aux répercussions, certaine et convaincue que le soleil ne projettera plus jamais ses rayons, que je n'aurai jamais à affronter la réalité.
On dit souvent que les regrets ne sont mieux cachés qu'au fond de nos coeurs, je comprends mieux maintenant. Les regrets. Ils me guettent. Ils nourrissent mes pensées, mes appréhensions, et détruisent brutalement mon désir insistant de contrôle.
Paradoxes emboîtés et complexité humaine.

Je ne suis qu'un paradoxe soutenu par une attelle.

ÉphémèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant