Chapitre 1: Au revoir.

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 – Tu as tout ? Tu n'as rien oublié ? Répétait maman pour la centième fois.

– Non, maman, j'ai tout, soupirais-je.

– Ton ordinateur, son chargeur, téléphone, chargeur, écouteurs..., énumérait-elle en lisant la liste que j'avais faite pour ne rien oublier.

– Tout y est, ainsi que tout le reste.

– N'oublie pas pour l'argent...

– Quand je vais arriver je leur demanderai de m'aider à convertir mon argent, ne t'en fais pas. Je devrai aussi avoir un boulot là où Mary travaille. J'ai hâte d'être dans mon nouveau chez moi, mais ça va faire bizarre de ne pas avoir de bons petits plats le dimanche.

– Tu sais cuisiner.

– Je sais mais il n'y a que la nourriture de sa mère qui soit la meilleure au monde. Je ne ferais pas aussi bien.

– Je te fais confiance, je sais que tu ne vas pas t'intoxiquer, disait maman en riant, et je riais à mon tour.

Elle me prenait dans ses bras avant de me porter à l'aéroport une fois que j'avais dit au revoir à mon père qui partait sur un chantier. Dire au revoir à ses parents, même si ce n'était que pour dix mois ce n'était pas facile. J'allais radicalement changer de vie, et allais devenir complètement autonome.

J'allais vivre pas très loin de New York dans une ville qui s'appelait Albany, j'avais cherché il y a quelques mois des correspondants provenant de cette ville et m'étais faite une amie qui s'appelait Mary Johnson et elle travaillait dans un petit restaurant qui était spécialisé dans les petits plats français et le patron, Georges, avait vécu en France pendant une dizaine d'années. J'avais aussitôt sauté sur l'occasion de pouvoir y travailler, je savais qu'ils avaient besoin de quelqu'un, alors je lui avais demandé si je pouvais être prise, et elle m'avait assuré que les volontaires étaient rares, mais elle ne m'avait pas dit pourquoi. Au moins j'avais une amie sur place. Il fallait se le dire clairement, c'était une année incroyable qui m'attendait !

Mon avion avait décollé depuis plus de quatre heures maintenant, et même si je détestais les avions, je finissais par m'endormir. J'avais tellement hâte d'être arrivée que je n'avais pas bien dormi depuis des jours, alors inévitablement je tombais de sommeil.

A un moment, j'avais reçu un coup de coude plutôt douloureux de mon voisin qui avait gardé ses lunettes de soleil et était vêtu de noir. Quand je lui avais demandé pourquoi il avait fait ça, il m'avait seulement dit que c'était parce que je ronflais. Sa voix était très belle et mélodieuse, malgré le mépris si évident qu'un sourd pouvait l'entendre, ses cheveux blonds presque blancs comme la neige tombaient sur ses épaules. Je l'avais fixé comme une idiote pendant plusieurs minutes, ébahie, avant de m'en rendre compte. Je me collais encore plus contre le hublot les yeux dans le vague avant que l'hôtesse de l'air – qui draguait clairement mon voisin en se dandinant – nous indique que nous allions atterrir. J'étais très nerveuse, je n'arrêtais pas de gigoter, et mon gentil camarade blond me le faisait comprendre en m'attrapant très fermement le poignet d'une main froide comme la mort, un frisson me parcourais dès qu'il me touchait. A la troisième fois, un courant électrique me parcourait au moment même où nos regards se croisaient pour la première fois. Il avait les yeux rouges, des lentilles sans doute. Il semblait l'avoir senti aussi car il m'avait lâchée et se frottait discrètement la main pendant que je faisais de même avec mon poignet endolori par sa force et par le contact gelé. Pour un premier voyage en avion, j'étais déçue de l'avoir à mes côtés, surtout que je l'avais vu parler avec d'autres passagers, eux aussi vêtus de noirs et qui portaient des lunettes de soleil, et je l'avais même entendu rire quand un homme aux cheveux noirs souriant lui avait dit quelque chose, si je ne me trompais pas, en italien. Ce n'était pas si important, ce n'était pas comme si j'allais le revoir un jour.

Les Yeux RougesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant