Chapitre 3: Adieux.

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Ses yeux rouges me transperçaient depuis plus d'une heure, me fixant sans dire un mot tandis que, assise à un mètre de lui sur le canapé, je tentais vainement de fermer mes yeux pour dormir. Aucune respiration, il ne cillait pas et il dégageait une aura malfaisante et glaciale, littéralement glaciale. Je tremblais, de froid mais aussi de peur alors pour me donner une certaine contenance, je fixais droit devant moi, ignorant les lumières des autres appartement alentours. Mon portable vibrait soudainement, et je sursautais. Je le prenais et regardais l'écran, sentant que tous mes gestes étaient observés. Je me raclais la gorge avant de décrocher.

– Allô ? Demandais-je.

– Allô ma chérie, c'est maman ! Répondit la voix.

– Oh... Bonjour maman ! Dis-je en français, mon accent du sud-est ressortant. Je vis du coin de l'œil que le blond souriait méchamment. Je réprimais un nouveau frisson et demandais :

– Comment ça va ?

– Oh ça va bien, la routine de tous les jours. Je te réveille ? Tu as la voix endormie, si tu veux je te rappelle plus tard.

– Non, maman, ce n'est rien, je n'étais pas bien aujourd'hui, je me suis réveillée il y a une heure. Il est tard, c'est la nuit même mais ne t'inquiètes pas, j'ai du mal à dormir depuis quelques temps.

– Oh, pourquoi ?

– Je me demande si j'ai fait le bon choix. De venir aux USA je veux dire. Le boulot est mal payé et le patron me traite comme s'il m'avait trouvé au Bois de Boulogne, expliquais-je en soupirant.

Il m'observait encore plus intensément, si c'était possible. Je sentais aussi que ses deux frères avaient les yeux tournés vers moi.

– Comment ça ? Il fait quoi ? Demandait ma mère, soudain inquiète.

Devais-je lui raconter la vérité ?

– Hum... rien, rien, laisse tomber maman, je ne suis là que pour un an, alors, je ne vais pas faire de scandale.

– Mais s'il te parle mal ou je ne sais pas quoi, il faut t'en plaindre aux autorités !

– Je sais... Peu importe, comment va papa ?

– Il va bien, il est parti rentrer les poules, les poussins ont bien grandi maintenant !

Je la sentais sourire. Je souriais malgré moi sous les regards rouge sang des trois hommes. Quoique pendant un moment, j'étais persuadée que les yeux du blond étaient devenus noirs, lorsque je parlais de mon ignoble patron. Je m'autorisais à le regarder pendant une seconde. Ils étaient redevenus rouges et me fixait avec mépris.

– Oui, j'ai vu les photos que tu m'as jointes aux mails, ils sont vraiment beaux ! Répondais-je. Tu as quelle météo ?

– Il fait beau et chaud, on est en été, et c'est dur de dormir ou de bouger. Et toi ?

– Un peu pareil, mais j'ai la climatisation dans l'appartement, je dois avoir dix-huit degrés à peu près...

– Tu as de la chance, soufflait ma mère.

– Ouais..., lui disais-je peu sûre.

Quand je parlais de climatisation, je parlais surtout des trois hommes dans la pièce, ils avaient fait chuter le thermomètre. De ce temps-ci je n'allais pas trop m'en plaindre, bien que j'aimerais qu'ils arrêtent de me regarder comme s'ils allaient me dévorer. Même moi, je ne regarde pas un gâteau au chocolat avec une telle lueur dans les yeux. Évidemment, je n'allais pas en parler avec elle. Ils souriaient, renforçant cette lumière sadique qui éclairait leurs visages blancs comme le marbre.

Les Yeux RougesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant