13 - Hallucination

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Le lendemain matin, ce fut le froid qui poussa Steve à se lever. Sa vieille couverture, trop mince, ne le protégeait pas de cette sensation affreuse qui pénétrait au plus profond de sa chair et engourdissait ses muscles. Bien sûr, hors de son lit, c'était pire, et Steve avait beau mettre le chauffage à fond, sa maison restait froide. De plus en plus, au fur à mesure que l'hivers faisait tomber la nuit plus vite et rendait invivable les pièces immenses, il s'y sentait seul. Dans tout cet espace, le moindre bruit grandissait, plein d'échos lugubres qui résonnaient jusqu'au fond des ombres derrière lesquelles  Steve ne discernait rien. Il avait finit par s'installer un lit dans une pièce qui avait un jour servit de dressing à sa mère, quand ses parents habitaient encore réellement là. Il s'y sentait mieux : quand il se réveillait au milieu de la nuit à cause d'un cauchemar, aucune ombre, aucun écho, n'était là pour le terrifier encore plus. 

L'odeur du café, dans la cuisine pleine de métal aux lignes pures et impersonnelles, réussit à peine à instaurer cette ambiance chaleureuse qui allait normalement avec. Mais sa tasse lui permettrait d'être assez réveiller pour... pour tenter de faire quelque chose de sa journée, et c'était le plus important. 

La première gorgée lui envoya une décharge d'énergie pure et, comme si cette vague avait reversée une barrière, ses souvenirs de la veille affluèrent. 

West Side Story avait copié l'intrigue de Roméo et Juliette. 

Nancy et Jonathan était séparé et cela faisait le bonheur de ce dernier. 

Il avait volé les médicaments de Billy. 

Eh merde !

La petite boite, trop innocente pour être sincère, détonnait dans cette cuisine moderne, avec son écriture calligraphiée et ses dessins rococo. Elle semblait lui crier : mais qu'est ce que tu as fait comme connerie !? Ou en fait non, c'était lui qui se le criait. Et le mur, du fond invisible de la pièce, lui renvoya son cri, déformé et comme sortant d'un enfer répétitif.

Son cœur battant à tout rompre envoya un afflux de stress à son cerveau et bientôt il commença à manquer de souffle : qu'allait-il se passer si Billy ne prenait pas ses médicaments ? Qu'allait-il lui arriver ? Et si ces médicaments servaient en réalité à contrôler le flagelleur mental ? Qui après tout pouvait très bien être encore en Billy, simplement tenu à distance ! Il avait peut-être lâché sur Hawkins le monstre qu'ils avaient eu tant de mal à faire disparaître ! Et le pire était sans doute qu'il ne savait même pas pourquoi il avait fait ça ! Il n'avait pas de raisons, pas d'excuses, pour la connerie monumentale qu'il venait de faire ! Un instant sa vision se brouilla et il dû s'accrocher au bord de la table pour ne pas tomber. Le métal glacé l'aida à retrouver suffisamment ses esprits pour enfoncer ses ongles dans sa paumes, le plus violemment possibles. Seul un afflux de douleur d'une force égale pouvait combattre un afflux de stress. 

Et effectivement cela marcha. La conscience du monde lui revient lentement, au rythme de la douleur qui circulait dans ses nerfs, jusqu'à qu'il puisse à nouveau penser et se dire que, au vue de la vitesse à laquelle il avalait ces maudites pastilles, Billy en avait sans nul doute une réserve. Dans ce cas là, tout allait bien : il allait pouvoir étudier les effets de ses étranges "médicaments" sans que cela cause de dégâts. En plus, c'était un mardi, jour de congé : il avait donc tout son temps. 

Les petites pilules ressemblait à des perles, joliment entassées les une sur les autres et brillant sous la lumière trop cru d'un spot de cinéma (apparemment le nouveau truc à la mode), et Steve les trouva jolie, avant de se dire que c'était stupide. Il en prit une, la fit rouler entre ses doigts et en apprécia la texture : fraîche et douce. Il hésitait : pouvait-il en goûter une ? Il ne savait pas vraiment quels en étaient les effets, mais il savait qu'ils devaient être plutôt fort, alors ce n'était sans doute pas une très bonne idée. Pourtant il en avait tellement envie. 

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