La nuit ne s'est pas encore couchée ce soir. Ce soir la ville me paraît grande, ce soir elle me paraît belle. C'est fou comme un si court instant peut faire autant de bien. Le ciel est bleu et moi je ne te vois plus. Tu ne me hante plus, soit en fier, c'est ce que tu voulais non ? L'air est plus pur en cet instant et ton visage s'estompe, ton désir s'efface. Bientôt la nuit tombera et tu réapparaîtras mais qu'importe pour l'instant tu n'es pas là. Seule moi compte. Soyons égoïste, il le faut. J'aimerais m'envoler mais pas comme hier, juste voler pour voir la vie des gens, leur routine, leur attente. Est-ce que tu les vois ? Et est-ce qu'ils te voient ? Ou peut-être n'es-tu dédié qu'à moi. C'est drôle cette idée qui hier me paraissait merveilleuse aujourd'hui m'apparaît absurde. Il faut croire que je grandis. En tout cas ton ombre a rapetissé ça je le sais. Et si demain tu étais là comme avant ? Et si demain tu m'attendais au bord des rails, le long des rambardes ou à côté des voitures ? Comment te résister ? Comment espérer que toujours tout sera comme aujourd'hui ? Aujourd'hui était parfait, trop peut-être... Peut-être qu'aujourd'hui n'était qu'un rêve, que tout à l'heure je me réveillerais et me dirais en te voyant combien j'aimerais me rendormir. Ne reviens pas s'il te plaît. Je peux me passer de toi, j'en suis sûr maintenant. Vas-t-en ! Quitte-moi puisse que dans tous les cas tu ne veux pas de moi ! Je ne t'attendrai plus, je le promets, je ne t'appellerais plus, je le promets. Laisse-moi seule ! Je me sens mieux seule. Et ses gens autour de moi, ils m'aident je le sais. Eux ne le savent pas mais ils m'aident. Ils m'aident à te résister encore et encore. Je ne peux plus te voir. Je ne veux plus te voir.
Ça y est la nuit tombe. La ville est animée ce soir. Ma ville brille ce soir. Je suis entouré par ceux qui me sont chers. Ils sont là avec moi. Ils me suffisent. Mais il me faut les quitter. Voilà mon bus qui arrive et me voilà dedans. À peine je suis assise que te voilà. Que fais-tu là ! Je ne t'ai pas appelé que je sache ! Je ne te veux pas, ne m'as tu donc pas entendu ? Pourquoi maintenant, pourquoi ici, là où pour la première fois je t'ai aperçu. Je ne te veux pas, je ne veux même plus te voir. Alors je t'ignore et je pris pour que tu en fasses de même. Et ça marche. Tu ne t'arrête pas à ma hauteur. Oh Dieu que je te bénis de m'avoir fait résister.
Tu n'es pas là pour moi. Tu t'arrêtes et tu t'installes derrière moi, là où une fille s'assoit tous les soirs mais je ne l'avais jamais remarqué. Pourquoi ? Car tu prenais toute mon attention. Tu occupais toutes mes pensées. Tu es là à côté d'elle, ta main sur la sienne, sa présence comme la seule à ses yeux et alors qu'ils dérivent le long de la route, je sais exactement à quoi elle pense. À quoi on pense à cet instant. Alors je me lève et je te domine un court moment et je m'installe à ses côtés. Je te remplace pour ce soir. Elle me regarde surprise et comprend. Mes yeux lui parlent, mes yeux lui racontent une histoire qu'elle ne connaît que trop bien. Je te vois t'évanouir et ça me fait plaisir. On ne dit pas un mot, on n'en a pas besoin. On a juste besoin de se savoir là, de savoir que ce soir on n'est pas seule. Demain peut-être que tu reviendras me voir, la voir mais tant pis, seul compte aujourd'hui.
Jour après jour, heure après heure, c'est comme ça que tu disparais et cela me suffit.
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Nouvelles
De Todo"La rue Barthimolie longeait le port de Marseille. On y trouvait toute sorte de personne. Les marins se mélangeaient aux ouvriers et les bourgeois aux paysans. Plus rien ne différencie un homme d'un autre. La rue était sale et étroite. Les passants...