Chapitre 6

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     Je cogne fort à la porte et patiente, même si la patience c'est pas ma came

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     Je cogne fort à la porte et patiente, même si la patience c'est pas ma came. Je renifle car je viens de me défoncer. J'ai décidé de venir ici parce que j'en avais ras le cul de me coltiner cette monotone routine. J'ai l'impression d'être cloîtré dans un labyrinthe infernal dont il est impossible d'émerger. La porte s'ouvre sur une jeune femme tout de noir vêtue, à peu près la vingtaine, elle me scrute de ses grands yeux noisette. Son tailleur et ses cheveux bruns noués en un chignon lui confère un air sévère, mais son joli minois exprime tout le contraire.

     — Je suis à la bourre, je sais, débité-je.

     — C'est bien de l'avoir remarqué. Qui es-tu ? Je ne me souviens pas t'avoir déjà vu dans ma classe.

     — C'est parce que je ne viens pas souvent, éludé-je.

     — Et pourquoi ?

     — Parce que je n'en vois pas l'utilité, ironisé-je en humectant mes lèvres.

     — Et pourquoi as-tu subitement décidé de venir ? questionne-t-elle, un sourcil arqué.

     — Disons que je me faisais chier, flanqué-je.

     Elle me lance un regard interdit, mais m'invite à entrer. Je pénètre dans la salle de classe et me dirige vers le fond où je m'assois sur une chaise. Tous les regards convergent vers moi et des billes medusées se heurtent à ma personne. Je les observe, inflexible. Je flirte avec ce sentiment de captiver toute l'attention.

      — Reprenons là où nous nous étions arrêtés, déclare la professeure.

     Je profite de mater son cul, légèrement bombé, en humidifiant à nouveau mes lèvres. C'est fou à quel point les fringues nous empêchent de respirer. J'extrais un cahier et un stylo de mon sac et les dispose sur la table. J'ignorais que j'en possédais encore. Les bidules scolaires, c'est pas trop ma came.

     Je suis resté jusqu'à la fin des cours. La curiosité que j'allume chez les gens me happe, mais j'aime la sensation inédite que ça me procure. Cette nouveauté a évincé le sentiment d'extrême médiocrité dans lequel je flotte. C'est en ayant toute l'attention polarisée sur moi que je m'arrache de l'établissement.

    J'écrase ma clope sous la semelle de ma chaussure, puis la lance d'une pichenette à travers la fenêtre. J'ouvre ensuite la porte de l'appartement avant d'y accéder. Je me déchausse et balance mon keus sur le fauteuil. Je me sers un verre d'eau que j'avale d'une traite, c'est à ce moment qu'il apparaît. Il m'a l'air d'être parfaitement lucide. J'ignore si je dois m'en réjouir ou maintenir mon apathie machinale. Le malheur se dissimule parfois, il te donne l'illusion d'être invisible, et attend le moment idéal pour t'achever.

     — T'étais où ? demande-t-il, bourru.

     — Au lycée, réponds-je brièvement.

     — Tant mieux.

     Notre succinct échange se conclu ainsi. Je ramasse mes affaires avant d'aller m'enfermer dans ma chambre. Je broie du noir en contemplant mon plafond. Plus je cogite, plus j'arrive à cette rude conclusion : le bonheur est une ville tellement lointaine que même en rêve il m'est impossible d'y accéder.


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