partie 1 , épisode 1 :La séparation

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Maudit soit ce jour où mon père m'appela dans sa chambre et me dit avec un air abattu, mon fils, cire, il est temps pour toi de nous quitter. Il est temps de suivre les traces de ton père. Il est temps pour toi d'aller à l'aventure. Il est temps d'apprendre à devenir un homme et au fur des années d'occuper mon fauteuil. Tu dois rejoindre l'école coranique, prépares tes baguages, tu pars demain. Mon père faisait tout pour que je ne sente pas la peine qui l'anime, mais soudain une larme s'échappa de ses yeux et il me dit automatiquement, vas, vas-y mon fils. Je ne sais pas ce que je ressentais à cet instant, car tout s'est passé si vite, mais je n'ai pas pleuré. Peut-être que je n'avais pas compris.

Une fois la porte de la case de mon père franchi, j'ai aperçu ma mère qui semblait avoir pleuré de toutes ses forces pendant tout le temps que je parlais à mon papa. Elle était entrain de me préparer le couscous communément appelé "lathiri ndiorndi". Je m'approchai d'elle puis dis : mère, qu'y a-t-il ? y a-t-il eut un décès quelque part ?  Elle répondit non mon fils "wolahawlou wolahouwat". Je pleure parce que je vais me séparer de toi. Dieu seul sait si on se reverra. Comme le dit l'adage, quelqu'un qui s'apprête à partir à la bataille ne connait que son heure de départ. Son retour n'est pas garanti et en plus, nous prenons de l'age moi et ton papa, Dieu seul sait et elle se mit encore à pleurer. Je restais de marbre, je ne savais pas quoi dire ou quoi faire. J'avais juste 5 ans.

Mon père sortit pour se préparer pour la prière de midi et aperçu ma mère en sanglot. Il s'approcha avec ses grandes oreilles et son nez épaté qui lui permettez de savoir ce qui était dans la marmite sans même l'ouvrir. Il avait bien vu que ma mère était en larme, même si cette dernière a tenté de masquer ça dès qu'elle l'a vu s'approcher, mais il a voulu zapper ça. Peut-être que c'était sa manière de la réconforter, car ma mère aimait sa cuisine, elle cuisinait très bien.  Il dit hum, tu prépares du "gniri gawri" qui est un plat à base de mil. Ma maman répondue oui "bamou tidianie" qui veut dire le père de tidianie en l'occurrence mon grand frère aîné qui est, lui aussi, élève coranique depuis plus de 3 ans. Personnellement, je n'ai pas de souvenir de lui. Mon père pris la bouilloire pour faire ses ablutions et lança à ma mère "wad hen nebam sirma ha hewa"(met y beaucoup d'huile végétale) et ma mère laissa échapper un petit sourire. Ainsi, je partis dans la case de ma mère pour rassembler mes bagages ou du moins ma case aussi. En effet, il y avait deux cases dans la maison. La case de mon père qui était en quelque sorte sa case de retraite spirituelle. Seuls les hommes y entré, même ma mère n'y avait pas accès. Dans la chambre était entreposée des livres coraniques de tous genres, des manuscrits écrits à la main, surement légué par ses parents, car d'après ce que j'ai appris ici, la connaissance se transmet de génération en génération. Raison pour laquelle mon père voulait tant que j'aille apprendre le plus tôt possible afin qu'il puisse m'enseigner lui-même le pouvoir mystique. Il y avait aussi des canaris dans la case qu'il remplissait d'eau bénite qu'il nous donnait souvent pour la protection. Dans l'autre case, celle de ma mère, il y avait un lit en bois fabriqué par elle-même, couvert par un drap assez lourd qui faisait office de matelas. Surement, ils l'ont acheté à Podor chez les colons. Il y avait un canari aussi, mais cette fois pas avec de l'eau bénite, mais avec de l'eau normale. Je vivais aussi dans la chambre, mais je n'avais pas droit à un lit. J'étalais un pagne de ma mère sur le sol et je me couvrais avec une autre de ses pagnes. Le matin, après avoir bu du "lathiri kosam", j'amenais les brebis au pâturage. Je jouais à longueur de journée, mais aujourd'hui semble être le dernier jour de liberté, car je serais sous peu sous l'autorité d'un autre chef qui n'hésitera surement pas à me frapper.

La journée passa très rapidement tellement je ne voulais pas qu'elle finisse. Après la prière du soir, mon père m'appela dans la cour de la maison sur une natte de paille qu'il partageait avec ma mère. Il demanda d'abord à ma mère si mes baguages étaient prêts. Cette dernière répondue par l'affirmative. En cette année 1934, on n'avait pas assez de bagage, juste de quoi manger pour le voyage, car on voyageait à pied et de quoi se protéger du froid. Cette fois, ma mère paraissait avoir plus de retenu, peut-être parce qu'elle avait discuté avec mon père avant ma venue. Et mon père me dit cireyelam mon fils ! Comme je te l'ai dit tout à l'heure, tu vas apprendre à devenir un homme, à supporter des conditions difficiles, à supporter la faim, la soif et le froid, mais le plus important tu vas apprendre à savoir se focaliser sur ton objectif. Et il poursuit, moi et ta maman ici présente, nous avons prié pour toi, que le bon dieu te protège et te ramène parmi nous sain et sauf. Dès que nous verrons quelqu'un qui part de votre côté, nous lui enverront des vivres et de nos nouvelles. N'aie jamais peur, dieu protège tous ceux qui se demande refuge auprès de lui. Ton marabout me remplace, il occupe la place de père pour toi, respecte le et fait tout ce qu'il te demande. Et enfin souvient toi qui voles un œuf volera un bœuf. Peu importe la difficulté, ne t'adonne pas aux vols ni aux mensonges, car dès que tu t'y habitues, tu ne pourras plus t'en lasser. Dis au revoir à ta maman, aujourd'hui, tu passes la nuit dans ma case. Je vais t'amener après la prière de l'aube.

Je serrais ma mère très fort, je pleurais et pendant quelque instant mon père me dit viens. Je reculais lentement en regardant la silhouette de ma mère dans le noir assise sur la natte jusqu'à que je ne l'ai vu plus. 


De la mendicité au trôneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant