Chapitre 5

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Métro de Chicago.

Égorgé et disposé en croix, ça voulait dire représailles du Concile, réfléchit Isabelle, assise dans un wagon quasiment vide. Qu'a bien pu faire Héphaïstos ? Et surtout, qui a été chargé du sale boulot ?

La Veuve noire, la tueuse à gages qui travaillait souvent pour le cartel ?

Oui, probablement.

Elle était fascinée par la Veuve noire : le peu de témoignages qu'ils avaient pu recueillir la disait formée par le Concile dans l'unique but de tuer. Sa réputation en faisait une femme impitoyable et sans merci. On prétendait qu'elle acceptait parfois de tuer pour d'autres, mais à un prix si prohibitif que peu pouvaient se le permettre. La tueuse à gages ne laissait – volontairement – qu'un indice sur ses scènes de crime, un long cheveu brun en travers du visage du mort. Sauf pour les cibles qu'on n'arrive pas à relier au Concile. Une preuve pour ses maîtres ? se demanda Isabelle. Quoi qu'il en fût, la Veuve noire atteignait la perfection dans son domaine. Le cheveu ne menait jamais à rien, si ce n'était à la relier à d'autres assassinats. Cette signature apprenait seulement à la police que la Veuve noire était une femme blanche, d'une trentaine d'années, aux cheveux bruns et longs.

Une autre rumeur disait que c'était Arès qui s'était personnellement occupé d'elle, et qu'il lui avait trouvé son surnom. Ce n'est pas ça qui nous aide... Isabelle, qui avait lu tout ce qu'il y avait à lire sur le sujet, y songea tout le long du trajet. Elle est retorse et rusée, mais pas infaillible, personne ne l'est, pensa-t-elle encore, avant d'arriver, enfin.

***

Deux Chrysler noires aux vitres teintées les emmenèrent à l'aéroport. Ils décollèrent à midi et le vol se passa sans encombre. Le soleil tapait plus fort encore qu'à Chicago, mais la chaleur y était différente, plus sèche. Ils réglèrent tous leur montre sur quinze heures. Le décalage horaire faisait toujours un drôle d'effet à la jeune femme qui se massa les tempes, sentant poindre une migraine, avant d'enfiler ses lunettes de soleil, déjà écrasée par la chaleur. Quand ils arrivèrent enfin à l'hôtel, elle se sentait sale et ne rêvait que d'une chose : une bonne douche. Fait rarissime, ils avaient chacun leur chambre, toutes au neuvième étage du bâtiment. David les interpella au sortir de l'ascenseur et leur donna rendez-vous dans sa chambre deux heures plus tard.

Isabelle prit son temps sous la douche, laissant l'eau froide couler sur son corps aux muscles fatigués par le voyage et la tension nerveuse. Elle enfilait un peignoir quand on frappa à la porte ; c'était Alysson qui venait la chercher pour descendre au bar :

— Quoi, pas encore habillée ? J'ai une faim de loup, tu viens manger un truc en bas avec moi ?

Souriant devant l'enthousiasme permanent de sa collègue, Isabelle accepta et s'habilla rapidement. Arrivées au bar, elles s'installèrent avec les deux hommes qui mangeaient déjà un énorme sandwich au salami et au fromage, et se commandèrent la même chose.

— Moi qui croyais que les filles ne mangeaient que des yaourts allégés et des bagels nature, se moqua Joe, la bouche pleine. C'est de la bombe calorique, ce qu'on mange là, faites gaffe !

Le crépuscule des DieuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant