chapitre 17

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"Est ce que tu as des antécédents ? Des allergies ? Des intolérances ?"

Le médecin de l'armée imitait des cercles avec son stéthoscope froid le long de mon dos. J'ai simplement hoché la tête. Je ne voulais pas lui répondre. Il voyait très bien dans mon dossier étudié et réétudié que la réponse était non.

Le stéthoscope a aussitôt quitté mon dos, le médecin s'est redressé et il est retourné à son bureau, fixant ma nudité à travers ses lunettes.
Je grelottai sur le brancard de guerre. J'avais vraiment très froid. Mon estomac se retournait depuis quelques jours puisque je mangeais plus grand chose.
Et j'avais un très forte fièvre. J'étais à bout physiquement.

Je jettai parfois un coup d'œil à la perfusion qui coulait dans mon bras gauche, un liquide transparent sensé faire passer l'injection qui me tuerait.

Et après mettre déchirer le cœur, je me remettais à dévisager ce monsieur. Il avait l'air fasciné par mon dossier qu'il survolait, surlignait et classait entre deux intercalaires. Et en même temps, il me semblait méfiant. Il ne me regardait jamais dans les yeux, ses interrogatoires ressemblaient à des questions/réponses, rien de plus, et, malgré les obligations de son taff, je sentais qu'il avait peur de me toucher.

Pourquoi est ce que je leur faisais autant peur ? Est ce que j'étais un spécimen si grave que ça ?

Je ne pensai pas. Je pensai juste qu'ils étaient stupides, les uns comme les autres. Rien de plus.
10 minutes plus tard, il a quitté mon dossier des yeux pour me regarder :

" Tu as encore une chance de rejoindre la science. Tu est vraiment sûr de ton choix ?

- Si je n'étais pas sûr, qu'est ce que je foutrais ici colonel ?"

Le médecin arqua son sourcil. Ses yeux bleus se dévoilaient devant moi. Ma décision semblait le perturber mais il faisait tout pour rester professionnel. Cruel.
Pareil pour moi.
Il croisa ses mains.

" Jaden, tu est très jeune. J'ai un fils qui a exactement le même age que toi et il va bientôt entrer dans son équipe de volley. Tu as encore de la vie devant toi."

Je ne répondai pas.

" Au moins avec la science et ce nouveau programme, ta capacité sera protégé et ton corps pourra servir à l'humanité. "

Il parlait de mon corps comme si il était déjà mort. Sa cruauté me dégoûtait. J'avais croisé des hommes cruelles depuis mon arrivée ici, mais même la torture physique que j'avais subi était moins profonde que les mots qu'il me disait.

" Tu seras un héros. Tu imagines ?"

Ses yeux brillaient faussement. J'eus la nausée. Il me donnait envie de vomir. Je finis par cracher de dégoût dans la paume de ma main, quelque chose qui était devenu normal pour moi depuis quelques jours.
J'avais probablement attrapé une connerie de maladie ici.

" Jaden... Et ta famille... Tu as pensé à eux ?"

J'ai relevé ma tête raide. Un coup m'a pris dans la poitrine. C'est vrai que quand j'allais mourir, j'allais perdre ma mère et ma petite sœur.

Mes larmes se sont écoulés seuls.
C'était la fin de ma vie. La fin de mon existence.

" Jaden , tu souhaites vraiment mourir ainsi ? "

Il claqua l'aiguille de sa seringue entre ses doigts comme pour activer le poison.
Puis un sourire brusque m'attrapa.

" Et si je souhaitai une autre mort ? Qu'est ce que vous me feriez ? "

Il se retourna interloqué comme ci j'avais éveillé sa curiosité.

" Du moment que tu meurs , je l'accepterai.

- Excellent.

- Et qu'est ce que tu voudrais ?

- l'Exil."

Le médecin interrompit ses claquements de doigts. Il me scruta du regard.

" L'Exil....

- Ouais. Dans l'océan. Et je ne reviendrai plus sur Terre. C'est mieux que de mourir tétanisé sous une seringue, non ?

- C'est votre dernière volonté ? "

Je hocha de la tête. Le médecin se releva et alla se pencher près de la fenêtre. Il avait soudain un air plus sceptique. Je suivais ses doigts qui dansaient sur le rebord de la fenêtre.
Et oui... En quoi l'Exil serait un problème ?

Il se retourna vers moi avec un sourire. L'espoir renaissait.

" J'en parle avec les militaires mais ça devrais pouvoir être fait.

- Vraiment ?

- Vous ne tiendrez pas plus de 20 minutes seulement dans l'eau. La fatigue physique, l'essoufflement, l'affaissement musculaire... Vous êtes sûrs de vouloir mourir de cette façon ?

- Comment ça ?

- Mourir noyer ? Vous en êtes sûr ?

- Oui... Dis-je cette fois surpris de parler de ma propre mort.

- Vous m'avez l'air hésitant.

- Et vous, vous m'avez l'air déçu."

Il s'est approché à nouveau de moi mais cette fois avec un regard désespéré. Il ne pouvait pas le cacher. C'était comme-ci, il passait à côté de son plus grand cobaye humain . Il me dégoûtait à en vomir.

Finalement , il s'est assis face à son bureau et a fermé mon dossier. Cette fois, il a fixé mon corps en lambeau puis regarda la fenêtre.

" Que le ciel nous pardonne de te
supprimer ainsi . "

C'est les dernières paroles qu'il m'a dite.

" Jaden s'il te plaît !"

Un garde me fit signe à nouveau de me lever et de le suivre . Je quitta la salle du médecin sans même lui adresser un mot.
Il n'y avait plus rien a dire à ce monstre...
J'ai suivi à nouveau le gardien dans le sous terrain .

Cette fois, pour rentrer, nous avons traversé un long et interminable couloir gris qui ressemblait au sous terrain d'un bucker de guerre.
Le froid me faisait éternuer des poumons, j'étais glacé jusqu'au os.
Deux autres gardiens nous ont finalement rejoint et au fond la lumière a commencé à paraître.

Cette fois, j'avais compris.

Ce ne serait pas pour demain.
Enfaite, mon Exil serait prêt pour aujourd'hui.

Lotus of the BreathOù les histoires vivent. Découvrez maintenant