Chapitre 7

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Délivre-moi. Juste une caresse. Un baiser. Les rêves pouvaient s'envoler. Nul besoin de les repousser. Inutile de se battre. Elle n'avait pas besoin de faire semblant de ressentir. C'était là. Simplement. Elle en sourit. Elle en gloussa, aussi. Enlacée, entre deux volutes de fumée. Juste la chaleur des flammes et des peaux serrées. De quoi avait-elle peur, avant ce moment ? De perdre ce qu'elle n'avait pas ? De ne jamais l'avoir ? De la mort ? De voir ses proches souffrir ?

C'était ridicule. Elle s'esclaffa. Une lueur verte-orange apparut au-dessus de la kitchenette. De profil au poêle, l'une de ses joues aurait moins chaud si des lèvres n'y étaient pas posées. Le vieux sofa était le plus confortable qu'elle n'avait jamais rencontré.

Ses doigts se promenaient sur cette étrange peau. Inconnue. Mais déjà ressentie par le passé. Dans ses souvenirs, elle était quelque part. Avant elle, ou au sein de sa propre vie, c'était une sensation familière qu'elle désirait amplifier. Les souffles près de son oreille insufflaient la vie dans le foyer. Le poêle allait fondre. Elle aussi, éventuellement. Mais elle n'était pas inquiète. Elle rejoignit les lèvres. Narguer le feu. Qu'il grossisse encore de jalousie.

Mais les pleurs, elle ne pouvait les éviter.

Elle dut céder à la réalité.

Confuse, elle se réveilla, son fils entre Lexa et elle. La gardienne aussi se réveillait, perturbée. Ils s'étaient tous endormis sur le canapé. Même le feu du poêle n'avait pas survécu. Il faisait sombre. Les nuages et les arbres cachaient la lumière du soleil. Aden arrêta de pleurer dès l'attention de sa mère obtenue. Il avait faim.

Clarke le prit contre elle et lui donna le sein. Elle ne s'en cacha pas, cette fois. Elle faisait confiance à Lexa. Cependant, elle se sentait étrange. Elle n'avait pas fait de tel rêve depuis longtemps. Jamais au sujet du père de son fils. Il y avait quelque chose, en Lexa, qui rendait leur relation plus mystérieuse. Car il était évident que ce rêve concernait Lexa. Par ailleurs, la gardienne était allée se réfugier dans la salle de bain, comme si elle aussi avait eu un sommeil agité.

Bientôt deux jours complets qu'elles s'étaient réfugiées dans cette cabane forestière. Les bois étaient calmes, et la région semblait peu habitée. Il était tentant d'y rester éternellement. Rien qu'eux trois. Mais même si elles parvenaient à renouveler toutes leurs ressources, elles finiraient par s'ennuyer. L'espace était étroit. Et Aden méritait de grandir avec d'autres enfants. Ici, il ne rencontrerait jamais personne.

La conversation devait avoir lieu entre les deux femmes. Où aller ensuite ? Que faire ? Elles avaient des opinions différentes sur le sujet. Clarke n'était pas certaine de pouvoir rester calme si la gardienne lui conseillait encore une fois de retourner à la métropole. Même si Lexa avait raison. Même si c'était la meilleure chose à faire pour Aden. Clarke avait peur de subir les conséquences de son départ, mais avant tout de retrouver les souvenirs du mal-être qui l'avait poussée à quitter le campus.

La cabane resta longtemps figée dans le silence. Aden s'était rendormi pendant sa digestion. Clarke le gardait contre elle. Finalement, elle avait accompli un rêve de son Précédent. Porter un enfant. Connaître toutes les sensations relatives au développement d'un bébé au creux de son propre corps. Clarke en était fière, malgré les difficultés rencontrées. Elle se voyait avoir un autre enfant, un jour, dans un monde où tout irait pour le mieux. Dans sa situation actuelle, Clarke peinait à voir le lendemain.

La silhouette de Lexa s'extirpa de la salle de bain. Un regard suffit à enclencher la conversation. Elles s'étaient silencieusement mises d'accord. Il fallait parler. Prendre une décision maintenant.

Lexa s'assit doucement à côté d'elle pour ne pas réveiller le nourrisson.

- On ne peut pas rester ici, commença Lexa.

Un passé sans desseinOù les histoires vivent. Découvrez maintenant