Nouveau conseil n°3

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Introduisez sur le territoire français un virus mortel

Ben quoi, tous les moyens sont bons, non? Alors disons que vous partez en vacances dans un pays exotique, genre le Luxembourg, et que vous ramenez dans vos bagages un microbe tueur potentiellement transmissible à toute personne ayant dépassé l'âge pivot de la retraite, petite bébête dont le nom est inspiré d'une marque de bière aromatisée à l'urine de bovin.

Tout ça est purement hypothétique et ne se produira jamais, ou bien vous auriez une sacrée veine. Vous avez entendu parler de la fois où le lycée a cramé et que la rentrée a été reportée de deux semaines? Ça serait encore meilleur, dans le genre fantasme de lycéen. Enfin, ce serait tragique, mais les dommages collatéraux pourraient faire vos affaires. Voilà comment les événements se dérouleraient.

Pendant que d'autres s'improvisent experts en contrebande de masque chirurgicaux périmés, ou investissent leur précieux temps dans la réalisation de tutos sur la fabrication de gel hydroalcoolique à partir de jus de céleri, vous restez concentré sur votre objectif principal: foirer le bac avec les honneurs.

Foncez sur votre téléphone pré-payé et dénoncez héroïquement, et de façon anonyme, un prof au hasard en affirmant, preuve à l'appui, que des rumeurs prétendent que cet individu se serait rendu au cœur du foyer de l'infection dans le cadre de ses recherches sur les mœurs des adolescentes pré-pubères indigènes. Vous n'avez pas besoin de comprendre ce que ça veut dire, contentez-vous de dire la phrase avec des tremblements dans la voix, comme quand vous réclamez de l'argent de poche à vos parents pour une urgence vitale, comme le concert des BTS par exemple. Résultat garanti.

Bref, vous verrez vos efforts se concrétiser dans les 24 heures: fermeture du bahut, et confinement du prof concerné, en attendant sa mise en accusation.

C'est à ce moment que vos parents recevront par mail le petit flyer au format pdf qui leur expliquera que dans le cadre de la lutte contre la propagation du Kronenbourg-virus, les élèves sont invités à rester chez eux, mais aucune inquiétude car les professeur veilleront à assurer la assurer la « continuité pédagogique », même si personne ne sait vraiment ce que ça signifie, au moyen de l'ENT et de tous les moyens de communication à leur disposition. Donc juste de l'ENT, en fait.

Arf, la belle blague. Déjà qu'en temps normal, les profs arrivent à peine à informer un tiers des parents, et encore ils vous obligent à copier un mot dans votre carnet de liaison, que vous consentez à montrer à la maison parce que ça vous arrange de pouvoir faire sauter les cours du mardi matin quand il y a sortie ciné. En ce qui concerne l'ENT, la moitié de votre classe a perdu ses identifiants, un quart ne les a jamais eus, et tout le reste ne s'en sert jamais parce qu'il n'y a jamais rien d'utile dessus.

Et donc, du jour au lendemain, ce formidable outil de communication va remplacer les cours, les exos, les devoirs et les corrigés. Génial. Mais alors, si on peut fonctionner comme ça, pourquoi on le fait pas tout le temps?

Pendant que vous tenterez désespérément de dégager la substantifique moelle du cours de philo sur la responsabilité politique dans les œuvres d'art conceptuelles Est-Allemandes des années 50 à 70, bien installés devant votre écran d'ordi dans votre chambre où vos parents vous auront enfermés pour vous laisser apprécier les joies télétravail, les gens ordinaires seront bien trop occupés à s'entretuer pour des paquets de pâtes et du papier toilette pour s'inquiéter de vos petits soucis de lycéens. Et pendant ce temps, le temps file...

Certains diront qu'un petit mois de quarantaine à la maison à mater des séries sur Netflix et à manger des coquillettes, ça peut pas faire de mal, mais ceux là n'ont pas comme vous un gros exam à foirer.

Comment foirer son bac - spécial réformeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant