Chapitre 2

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— Il t'a dit quoi ?

Je suis obligée d'écarter le combiné de mon oreille tant la voix de Mireille, une collègue en congé maternité, me transperce les tympans. Ne sachant pas à qui parler de ma mésaventure sans éveiller de soupçon mal placé, je l'ai appelée. Je la connaissais à l'université, elle a quatre ans de plus que moi et a toujours été de bons conseils.

— Pfft, ne me fais pas répéter, Mimi... Tu as très bien compris, grogné-je en lâchant mes cheveux.

Il fait si chaud qu'ils me collent dans le dos, mon débardeur étant décolleté. Il devient urgent de les couper. Je me dévisage dans le miroir, les relevant, pour voir de combien de centimètres je dois les raccourcir. Je les garderais bien au moins juste au-dessus des épaules pour qu'ils encadrent mon visage et que je puisse continuer à les attacher.

— Désolée, mais ce qui me surprend dans cette histoire, c'est que personne ne t'ait draguée jusqu'à présent !

— Si, ça m'est arrivé quelques fois, mais jamais de manière aussi frontale. En plus, c'est un de mes étudiants ! Tu imagines la honte ?

J'ai dû me ridiculiser avec ma bouche ouverte qui était incapable de sortir un mot alors que pour lui tout semblait d'une absurde normalité.

— C'est clair ! Te faire draguer par un post-adolescent boutonneux, ce n'est pas très valorisant ! ricane-t-elle.

Je ne me joins pas à son hilarité. Elle ne peut pas être plus loin de la réalité. J'ai trouvé ça très flatteur qu'il me montre de l'intérêt. C'est plutôt moi qui ne me sens pas à la hauteur, il a l'air bien trop cool pour une associable comme moi. Il semble plus âgé que ses camarades, et, je me mords les lèvres en me rappelant la charge de testostérone qui émanait de lui et m'a frappée de plein fouet. Des picotements agréables envahissent mon visage au souvenir de ses lèvres pleines sur lesquelles j'ai louchées.

— Mireille, je suis très mal-à-l'aise. Qu'est-ce que je peux faire ?

La raison principale de mon appel était de pouvoir déterminer quelle attitude adopter face à Jesse. Merde, je ne devrais pas l'appeler par son prénom, même en me parlant à moi-même. Je m'assois sur le canapé, raide comme un piquet, essayant d'endiguer la vague de chaleur qui inonde mon corps à cet instant. Est-ce le fait qu'il s'intéresse à moi qui me perturbe ? Ou suis-je réellement attirée par ce mec ? Comment savoir décortiquer les réactions de mon traître de corps ? C'est Natasha qui va bien se foutre de ma gueule ! D'ailleurs, je ne devrais pas lui en parler, ça risquerait d'empirer les choses avec son caractère volatile, elle serait capable de tout faire pour me mettre dans le lit de Jesse... Son lit, en y songeant, je suis obligée de serrer les cuisses pour calmer l'excitation qui me tiraille au niveau de l'entrejambe. Mireille ricane dans le combiné :

— Je ne sais pas quoi te dire ma belle. Il n'a rien fait de grave, il t'a juste proposé de sortir avec lui. Les hormones travaillent les hommes et comme il doit être submergé de travail, il se fait un fantasme qu'il a dû trouver sur un site pornographique et tu étais juste là au mauvais moment. Fais-moi confiance, ça lui passera.

C'est un coup de poing droit dans l'ego même si c'est criant de vérité, une sorte de douche froide, mais qui a le mérite de me remettre les idées en place et de calmer mes ardeurs.

— Merci, Mimi, c'est tout ce que j'avais besoin d'entendre.

J'ai le moral plombé, mais, tant pis pour moi, je n'ai qu'à ne pas être si fleur bleue ! Je suis une adulte et ne dois pas réagir comme quelqu'un d'immature laissant ses émotions prendre le dessus. Non, je ne suis plus cette personne.

— De rien ma belle. Je dois te laisser, mais on se rappelle très vite ! Bises !

— Oui, à bientôt !

Je raccroche et pose mon téléphone portable sur la table basse. Après la discussion avec Jesse tout à l'heure, j'ai eu du mal à me concentrer sur les cours. Heureusement que je finissais tôt et que j'ai pu vite aller me réfugier dans ma grotte, alias mon appartement, situé à quelques rues de mon lieu de travail. En passant dans les couloirs de l'établissement, j'avais l'impression que tous les regards étaient braqués sur moi. C'était très désagréable, mais ça ne devait être que le fruit de mon imagination, car, personne ne peut être au courant.

Poussée par une curiosité malsaine j'en conviens, mais peut-être pas stupide étant donné le contexte, je prends mon ordinateur et me rends sur le site Internet de l'école. Je fais une recherche dans l'annuaire des élèves et tombe rapidement sur celui que je cherche. Mon cœur s'emballe quand je vois sa photo, sur laquelle il arbore un petit sourire suffisant. C'est dingue ! Tout le monde est plus ou moins moche sur les photos, mais lui, il arrive à être plus que correct, ce n'est pas juste pour les autres ! J'ai l'impression de fouiller dans son intimité, mais après tout si ces informations sont accessibles aux professeurs, c'est que ce n'est pas mal. Alors j'apprends qu'il s'appelle Jesse Williams, il doit donc être d'origine anglaise ou américaine. Pourtant il n'a aucun accent quand il parle. Il a 25 ans donc j'avais raison, il n'est pas si jeune que ça. Mais c'est étonnant qu'il soit uniquement en deuxième année à son âge. Dans son parcours, je vois qu'il a travaillé dans de nombreux pays en missions humanitaires. Pourquoi ne pas avoir fait directement des études après son baccalauréat ? Il a pourtant des notes exceptionnelles. Je ne pousse pas le vice jusqu'à regarder d'autres informations comme son adresse. Ça passerait vraiment pour du harcèlement. Je me déconnecte et ferme l'écran de mon ordinateur.

Je m'étire paresseusement et décide d'aller chez le coiffeur pour voir s'ils ont de la place. Il faut que je me change les idées et que j'arrête de penser à Jesse. Ma réaction est démesurée par rapport à ce qu'il m'a dit, ce n'est pas normal. Je dois me ressaisir ou alors ça risque de devenir incontrôlable.












Troubled [New Romance - Auto-édité]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant