Les Chroniques d'Hostoclass

Al-Doshi: Magicien?

Sous haute escorte, je fus mené dans une enceinte aux hautes murailles. Un château ? Non, Etioport en était dépourvu. Une prison lugubre alors, ça ne pouvait être que cela. Oh la la qu'allait-il m'arriver ? On m'avait menotté avec de grosses chaines noires qui pesaient au bas mot, une quinzaine de kilos. Je soupçonnais l'étrange matériau qui les constituait d'être un barrage anti-magie. Lourdes, aussi sombres que les ténèbres les plus effrayantes et ornées de petites lettres s'apparentant à des runes, ces menottes avaient tout l'air de remplir leur rôle à merveille...encore fallait-il qu'elles soient utilisées sur la bonne personne.

Même lorsque je fus enfermé dans une cellule aux grilles de la même matière que mes entraves, on ne me les retira pas, je devais vraiment représenter pour ces chevaliers une menace hors du commun. J'étais passé par un stade d'angoisse et de terreur exceptionnel, mais au vu des dispositifs mis en place pour me contenir, je me sentais juste agacé. J'avais hâte qu'on reconnaisse que j'étais aussi innocent qu'une jeune fille découvrant les prémices de l'amour, cependant j'avais le pressentiment du contraire. Le peuple des forêts n'attendait que moi et même avant le réel début de mes aventures, je me retrouvais déjà dans le pétrin. Au moins, j'avais un début d'explication quant au fait que tout le monde me fuyait à la mention de mon nom. Al-Doshi devait être un très grand sorcier qui fut exilé et étant donné le peu de connaissances que les gens d'Eclota ont d'eux, il était tout à fait possible que toute la ville m'ait confondu avec, peut-être un de mes aïeuls. Comment allais-je faire comprendre à ce peuple fermé d'esprit que mon nom...n'était, eh bien, qu'un nom ?

Je cogitais sur cette question pendant des heures me sembla-t-il, j'avais le ventre vide et je commençais à le ressentir sévèrement lorsque cinq hommes se présentèrent devant ma cellule. Quatre étaient vêtus d'armures d'acier qui me paraissaient indestructibles, pour le pauvre mortel que j'étais. Le dernier me tapa dans l'œil, sans arrière-pensées s'il vous plait, étonnamment musclé et couvert de cicatrices pour son jeune âge, il avait des yeux d'ambre dont la pupille était une fente, identique à celle des félins, et ses cheveux attachés sur sa nuque étaient d'un vert d'eau hypnotisant. A la différence des autres il ne portait pas d'attirail guerrier, pas même le moindre couteau pour se défendre. C'est là que je compris, il s'agissait d'une fée ou tout au moins de quelque chose s'en rapprochant, car d'après mes connaissances les fées étaient pourvues d'ailes, mais lui, n'en possédait pas. Mais pourquoi était-il présent ici ? j'avais appris que les peuples des forêts étaient en conflit permanent avec les humains. J'étais perplexe. Il sembla le remarquer car il m'afficha un large sourire :

- Al-Doshi c'est ça ? Sachez que votre arrestation a fait le tour de la ville. Alors mon bon sorcier que faites-vous ici ?

Son sourire s'était fendu en un rictus carnassier à m'en faire frissonner l'échine. Je repris mon aplomb :

- Pour la millième fois, comprenez bien que je n'ai rien à voir avec la magie.

Les chevaliers ricanèrent mais si je n'étais pas menotté je doute qu'ils se seraient présentés devant cette grille. L'homme fée les toisa pour les faire taire, mais il se fit toiser à son tour comme s'il venait de prendre une place qui n'était pas la sienne. Les relations entre ces hommes me laissaient pantois. Pour mettre fin à cette gêne, il soupira avant de me regarder, ses pupilles s'élargissant pour s'habituer à la luminosité qui déclinait :

- Je m'appelle Eden, demi-homme fée, Chevalier de l'Espoir.

Je remarquai qu'il fit un énorme effort pour ne pas cracher ce nom. Il poursuivit :

- J'ai été convoqué ici depuis la VilleMère, sachez que ce n'est pas un voyage de tout repos, alors sincèrement, j'espère déceler en vous des traces de magie, après tout la rumeur dit que le grand Al' d'il y un millénaire vient de ressurgir pour se venger des habitants d'Eclota.