Chapitre 2

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— Il y a quelqu'un ? demandé-je aussi stupidement qu'il me vienne à l'esprit de faire.

Merci, Iola de te jeter dans la gueule du loup ! T'en as d'autres des comme ça ? Aucune réponse, seul un cri de douleur qui pourrait me fendre le cœur si le mien à force que je n'avance ne l'était pas déjà. Voilà ce qui était passé sous les roues sans me faire perdre le contrôle, un sac à dos, et pas des moindres. Si ce sac de grand baroudeur traîne près de mes roues arrière, où est son propriétaire ?

— Faites demi-tour, reprit la voix qui avait réclamé de l'aide, j'arrive à vous voir !

Je fais volte-face et me penche en prenant soin de ne pas atterrir en bas. Un homme au visage rouge crispé de douleurs se plie puis se déplie comme s'il cherchait à se relever seul en vain.

— Vous êtes ma lueur d'espoir, soupire-t-il la tête en arrière. J'ai bien cru que j'allais mourir ici.

Le regard inquiet, j'en oublie de lui répondre. Il ne saigne de nulle part mais son pied gauche tordu et retourné sur lui-même est coincé entre deux roches. Je retiens mon souffle pour ne pas le vexer mais cette image reste atroce à regarder. Depuis quand est-il ici ? Et surtout, comment a-t-il fait pour tenir tout ce temps ?

— Il faut que nous vous remontions, lui dis-je sans avoir de plan précis en tête, vous êtes dans un sale état !

— Sans blague ! ironise-t-il entre deux crispations. Et comment ? Sans vouloir vous vexer, je ne pense pas que vous pouvez à vous seule me porter, mademoiselle !

— Je ne vais pas le faire, rassurez-vous ! Ma voiture va s'en charger !

— Quoi ? sursaute-t-il tant bien que mal alors que je suis déjà dans ma voiture.

Je la gare au plus près de la bordure de route en veillant à ne pas tomber dans la fosse et par la même occasion sur le blessé. En sortant, j'attache laborieusement à son poignet un reste de corde trouvé dans mon coffre puis le relie à mon pot d'échappement. Vu comme ça, l'idée apparaît scabreuse et ses chances quasi-nulles mais c'est la seule idée qu'il me vient à l'esprit. En revenant vers lui, j'embarque son sac sur mon dos.

— Je ne sens pas du tout cette idée, me précise-t-il rageusement, si vous êtes venue pour me tuer, laissez-moi crever sur le bord de cette route !

— Bien ! Sachez juste que votre infection va vous ronger jusqu'à la moelle puis une fois que la gangrène sera installée, les hyènes du coin n'hésiteront pas à faire de vous leur dîner.

— Êtes-vous en train de me demander si je préfère mourir d'une hémorragie du dos ou être manger par des hyènes ? peste-t-il toujours autant.

Soudain, il s'arrête et ses yeux ne quittent plus les miens comme pour me défier. Un ultime cri lui échappe et fait pencher la balance en faveur de mon plan, un sourire satisfait ravive mon visage en sueur. Il ne m'était pas arrivé de petite expérience aussi existante depuis une éternité. Période révolue.

Au volant de ma voiture, les mains moites agrippées au cuir défraichi et glissant, j'enfonce mon pied le plus vigoureusement que je ne le peux en temps normal sur l'accélérateur. Allez poupée, donne-moi tout ce que tu as dans le ventre ! Je ne sens que de peu de mouvement et mon rétroviseur brisé en quelques morceaux m'indique qu'il n'avait pas assez bougé pour en être dégagé. Fonce, Iola, fonce !

Les yeux clos, je tente de me remémorer ces moments de courses, de fuites et de pagailles semées dans mon enfance.

— Stoooooooop ! Je vous en supplie, stop !


Extra Baby Tome I: SidersWhere stories live. Discover now