- Traître ! -

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Le jeune homme, à qui j'avais parlé plus tôt dans la journée, m'y attendait. A sa main, un fin poignard, au bout duquel perlait une goutte de sang.

Voyant que mon regard s'attardait sur l'arme, il m'expliqua :

- "Tout ne se passe pas toujours comme prévu."

Il passa devant moi, agile comme un chat, et je lui emboitai le pas. Etonnamment, j'avais une confiance aveugle en une personne qui m'était inconnue il y a encore quelques heures. Cependant, mon intuition me dictait de le suivre, et c'est ce que je fis.

Nous retraversâmes le dédale de couloirs blancs, mais nous n'avions pas encore rencontré de gardes, à mon plus grand malheur. J'avais l'intention de me jeter dans leurs bras, et d'enfin voir le visage de celui qui me retenait enfermée ici. Depuis mon rêve, mon seul but était de le rencontrer. Je ne savais rien de lui, même pas son prénom. Pourtant, je savais qu'il était mon père.

Mon guide parcourait les couloirs, choisissait les chemins avec une assurance surprenante. Il avait du explorer la prison, ou étudier minutieusement les plans. Ou alors était il garde ? Cela voudrait dire que toute cette évasion n'était qu'une gigantesque mascarade.

Cela ne me dérangeait pas ; mon seul but était de voir son visage - réellement - . Pour ce qui était du reste, je haussai les épaules.

C'est alors que je percutai quelque chose de grand et dur. Le choc me mit à terre. A moitié sonnée, je grommelai.

- "Qui a mis un rocher dans cette foutue prison ?!"

Une main couvrit aussitôt ma bouche. J'écarquillai les yeux. Le rocher que j'avais percuté c'était le garçon ! Et il me regardait avec ses yeux clairs lançant des éclairs, la main toujours plaquée sur ma bouche.

- "Tu veux attirer les sentinelles ou quoi ?"

Je l'observai attentivement. Ses pupilles étaient dilatées, sa respiration saccadée, ses dents serrées. Il avait peur ?

Il enleva sa main. Je soutins son regard.

- "Mais qui es tu ? soufflai-je."

Il ne répondit pas. Il se contenta de me jeter un regard triste. Il se redressa, me tourna le dos, et me fit signe de le suivre.

Nous arrivâmes facilement devant une immense porte en acier blindé, au bout d'un long corridor. De chaque côté de cette porte, une sentinelle en armure noire surveillait les allers et venues vers l'aile ouest du titanesque bâtiment. Un peu plus loin derrière cette porte se trouvait la sortie.

- "Une autorisation ? demanda la sentinelle de droite.

- Le boss m'a envoyé la chercher, répondit mon guide.

- Mais son bureau est de l'autre côté du bâtiment, renchérit la deuxième sentinelle, soupçonneuse.

- Demande personnelle du directeur. Obéissez !"

Sa voix était pleine d'assurance, et il mentait avec un aplomb surprenant. Je remarquai alors, et seulement maintenant, qu'il revêtait lui aussi une tenue de sentinelle !

Les gardes ouvrirent la lourde porte qui grinça affreusement. Je fus saisie de de panique. Si je passais cette porte, je n'aurais plus aucune chance de voir le directeur !

Alors, dans un effort désespéré, je me mis à me débattre. Mon guide, qui, j'en étais sûre, était un traître, m'attrapa par la taille, bloqua mes bras dans mon dos, et m'asséna un violent coup de poing dans le haut de la nuque. Je m'écroulai à ses pieds, évanouie.

fugitifsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant