Chapitre 3

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      C’était enfin le week-end, Rose se réveilla à 11h, elle avait bien récupéré le sommeil perdu pendant la semaine. Elle attrapa une veste dans son armoire et descendit rejoindre sa mère en bas.
      - Réveillée ? Regarde ce que je t’ai acheté !
      May tendit à sa fille un petit calepin lié par un fil à un stylo.
      - Comme tu ne peux pas parler… ça pourrait t’aider avec moi ou tes amis. Si tu veux me dire quelque chose…
      Rose écouta à peine la fin de la phrase de sa mère. Elle admirait le petit carnet beige, orné de fleurs de cerisiers. Elle attrapa le stylo et écrivit à sa mère « Merci ».
      Celle-ci eu un pincement au coeur, c’était la première fois que sa fille lui « parlait ».
      - Et heu... comme c’est le week-end on pourrait prendre un peu de temps ensemble ? Il y a une patinoire en ville…
      « Je dois finir mes devoirs » écrivit Rose.
      May, déçue, hocha la tête et reprit à ses occupations, pendant que Rose remonta dans sa chambre. Son téléphone vibra. 

      Hélène : Patinoire cette aprem ?

      Rose : Ok !

      L’après-midi arriva, Rose mentit à sa mère en lui écrivant qu’elle allait chez Hélène pour travailler. Un avantage à son mutisme : elle ne pouvait pas être trahie par des bafouillages.
      En arrivant, elle trouva sans difficulté son amie, qui lui faisait de grands signes devant le bâtiment de la patinoire. Elle l’avait guidée au téléphone, et Rose avait eu beaucoup de mal à trouver son chemin. C’était une petite ville pourtant, mais les routes étaient nombreuses, et le bâtiment isolé. Lorsque qu’elles rentrèrent dans le hall, il n’y avait personne, omis une grand-mère à l’accueil. Hélène lui présenta la vieille dame, c’était sa grand-mère et elle gardait le bâtiment, car un jour, Hélène le reprendrait et le rénoverait. Il n’y avait personne car récemment, une plus grande patinoire avait été construite en ville.
      Les patins enfilés, Hélène entraîna Rose sur la patinoire. La jolie rousse glissa sans difficulté sur la glace, alors que Rose tomba sur les fesses dès le premier pas.
      - Prends mes mains ! elle ricana en l’aidant à se relever.
      Rose prit les mains de son amie et glissa avec elle. Hélène allait très vite, Rose tomba plusieurs fois, mais elle comprit vite comment garder son équilibre. Hélène voulut accélérer et elle tomba en avant, emportant Rose dans sa chute. Hélène explosa de rire et son amie ne pu s’empêcher de la rejoindre. Quand elle s’en rendit compte, elle s’arrêta net et plaqua une main sur sa gorge. Ce n’était que du souffle qui était sorti, mais elle n’avait jamais été aussi proche de la parole. Hélène s’était aussi arrêtée brusquement de rire. Elle planta tristement ses yeux dans ceux de Rose.
      - J’ai failli entendre ta voix… (elle marqua une pause), est-ce qu’un jour je l’entendrai ?
      Rose baissa la tête. Elle n’y arriverai plus.
      Hélène pinça les lèvres, et aida son amie à se relever. Un lourd silence s’installa. Les deux amies étaient très proches l’une de l’autre, tant que leur souffle se mélangeait. Hélène posa une main délicate sur la joue de son amie, et posa un baiser sur ses lèvres. Rose ne bougea pas, les yeux grands ouverts.
      - Je suis désolée… elle souffla.
      Hélène tourna lentement le dos à son amie et voulut quitter la glace, mais Rose se précipita sur elle, déclenchant une nouvelle chute, et atterrit sur la rousse. Un sourire sincère éclaira le visage des deux filles, et à son tour, Rose posa ses lèvres sur les siennes. Elle ne savait pas vraiment si c’était de vrais sentiments, mais elle ne voulut pas trop se poser la question. Rose était bien tout contre Hélène.

      Lorsqu’elle rentra, il faisait déjà nuit, mais elle ne trouva personne dans la maison. Sa mère était sûrement allée faire les courses. Rose monta dans sa chambre, prit une douche et se coucha le ventre vide.
      Un brouhaha au rez de chaussé interrompit le sommeil de la jeune fille. Elle regarda l’heure : 3h. Qu’est-ce que c’était ce bazar qui l’empêchait de dormir ? Les yeux mi-clos, elle enfila une veste et descendit dans le séjour. Ce qu’elle vit la laissa de marbre : des femmes, des hommes, tous à moitié dénudés étaient dans le salon. Une machine à chicha était en plein milieu de la cuisine, les gens fumaient, et de la poudre blanche était étalée sur la table. De la musique sortait du poste radio, et May était étalée sur le canapé, sous les pieds d’un homme et sur le corps d’une autre femme. Rose secoua l’épaule de sa mère, mais ce fut sans succès. Des verres d’alcool étaient posés à côté d’elle, et du vomi était collé au coin de sa bouche.
      - Eh petite, tu fais quoi là ? lui lança un homme complètement ivre mais encore vivant.
      Rose ne répondit pas, alors l’homme s’avança vers elle.
      - Laisse-là tranquille, c’est qu’une gamine ! cria un homme plus loin.
      Mais un sourire mesquin assombrissait son visage, il avançait, chancelant un petit peu. Rose recula et se retrouva prise au piège contre le mur.
      - T’es toutes mignonne toi… t’as quoi ? 19… 20 ans ?
      Sa voix était rauque, son haleine empestait l’alcool et ses yeux étaient rouges. Rose essaya de se défaire de lui, mais il la tenait fermement par les hanches. Ses mains répugnantes se baladèrent sur le corps de la jeune fille, terrorisée, bougeant dans tous les sens pour le dégager. Quand sa main remonta le pull de Rose et frôla sa peau nue, elle arriva à le pousser et courut jusqu’à sa chambre.
      - Mmh… On joue au chat et la souris ?
      Rose referma la porte de sa chambre et s’appuya dessus de tout son poids. Les escaliers craquaient, et son coeur battait beaucoup trop vite pour un corps si fragile. La porte s’ouvrit dans un fracas, projetant la jeune fille en arrière. L’homme regardait Rose comme un morceau de viande, comme un trophée qu’il allait enfin voler. Non, il ne la toucherait pas, il n’avait pas le droit. De toute sa force, elle le poussa en arrière, l’entraînant dans une terrible chute dans les escaliers pentus. Rose eut du mal à reprendre son souffle, elle ne pouvait pas rester ici. Elle descendit les escaliers quatre à quatre et sortit de chez elle, dans la rue. Où est-ce qu’elle pourrait aller ?  Rose avait besoin de voir quelqu’un, et vite. La porte de chez elle s’ouvrit, l’homme était sur le palier, le visage en sang. Paniquée, elle courut sans réfléchir chez la voisine. Elle tambourina à la porte, mais personne ne vint.
      - Eh beh… tu veux plus jouer avec moi ? Petite garce, je vais t’apprendre les bonnes manières moi...
      L’homme menaçant s’approchait dangereusement de la jeune fille, qui continuait de tambouriner, le visage en larmes, implorant silencieusement que quelqu’un vienne la secourir. Il n’était qu’à quelques mètres lorsque la porte s’ouvrit, sur une femme énervée. Son énervement ne resta qu’un fraction de seconde, puisqu’elle découvrit l’état de Rose , et l’homme qui avançait à grands pas vers elles. La voisine tira la jeune fille dans sa maison et ferma la maison à clef. L’homme se jeta sur celle-ci, tambourina, et essaya de forcer la porte. Rose se réfugia dans les bras de sa voisine, la serrant si fort que celle-ci manqua de s’étouffer. Elle avait peur, peur que cet homme lui fasse du mal, peur que cette femme ne puisse pas l’aider. Ses tremblements redoublaient, ses larmes dévalaient sans plus vouloir s’arrêter.
      Les minutes passèrent, la femme et Rose étaient sur le canapé, le visage de la jeune enfouit contre le torse de sa voisine. L’homme était parti, le souffle de Rose devenait plus calme, ses larmes séchaient et la femme passait et repassait une main doucereuse dans le dos de la jeune fille.
      - Ca va aller… C’est fini… elle chuchota.
      Rose releva difficilement sa tête vers Emilie, qui la tenait encore tout contre elle. Elle voulut la remercier, mais encore une fois, ses mots restèrent coincés. Elle revoyait l’homme, ses mains sur son corps, son haleine… Son souffle s’accéléra de nouveau, mais Emilie plaça ses deux mains sur les joues de Rose.
      - Chut… c’est fini, je te le promets.
      Rose se noya alors dans le regard mentholé de son enseignante, et elle la remercia, silencieusement, dans un sourire brisé, faussé par de douloureuses larmes. Emilie ne su quoi faire, elle avait eu peur pour son élève, et elle se demandait où était May. Rose finit par s’endormir tout contre elle, pendant que la femme restait sur ses gardes tout le reste de la nuit.

       Emilie avait ramené Rose chez elle et avait mise au courant May sur l’épisode de la veille, folle de rage. Rose était dans sa chambre à ce moment là, la tête enfouit sous son coussin, elle entendait tout.
      - Ca fait trop longtemps que ça dure May ! Trop longtemps que tu fais ces soirées, que tu bois, que tu te drogues ! Je pensais que tu allais arrêter avec la venue de ta fille, mais rien n’a changé !
      Rose entendit des pleurs, des reniflements, qui n’appartenaient pas à son enseignante.
      - Je suis désolée Emilie… je m’en veux, tu peux pas savoir comme je m’en veux… mais je n’arrive plus à m’en défaire, je suis foutue…
      - Non, non tu n’es pas foutue… (la voix d’Emilie se fit plus douce). Fais une cure de désintox.
      - Je ne peux pas, j’y arriverai pas, et ça reviendrai à laisser Rose… je l’ai déjà abandonné une fois…
      - May… fait-le pour elle. Elle ne sera pas heureuse si tu continues. Comment elle grandirai? Et son éducation ? Tu veux qu’elle devienne comme toi ?
      Le ton d’Emilie était doux, mais ses paroles tranchantes. Pourtant, Rose était d’accord.
      - Je vais changer, renifla May.

Rose [ProfxElève / ♀️x♀️]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant