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Juliette,

La première fois que je t'ai vue, tu t'étais dissimulée derrière ce rideau de fumée que tu aimais tant, ce voile gris qui cachait tes yeux, cette brume qui te rendait si spéciale ; elle entourait ton cou comme une écharpe d'argent. La première fois que tu m'as vue, le ciel ne brillait pas. Les vapeurs d'alcool dans notre sang diluait notre pathétique réalité. La musique emplissait nos oreilles, mais le silence gagnait nos coeurs.

Juliette, ce soir-là tu étais si belle, avec tes boucles brunes qui dansaient au vent et qui encadraient ton visage angélique, avec les insolentes provocations que lançait ton sourire au monde, avec ton adresse en jouant de ta cigarette entre tes doigts écorchés, et avec ces deux prunelles sombres qui me dévisageaient ; tu étais si belle. Je ne ferai pas l'affront de te comparer à un ange ; comme tu me l'as avoué, le ciel t'avait lâchée et tu n'y croyais plus, à cette hypocrisie céleste, mais tu venais d'un autre monde. Tu étais mon apparition, mon hallucination démentielle, mon tout qui me faisait espérer.

T'étais si belle, si bonne même, que toute décence quittait mon âme chaque fois que mes yeux te dévoraient ; j'oubliais les codes, j'oubliais mes bonnes manières, mes trucs de fille bien élevée, mon âme bien réglée. Je les laissais aux abysses pour toi, toi et ta fureur tranquille, toi et ton regard glacial, toi et la cendre que tu piétinais chaque fois qu'elle touchait le sol, comme les espoirs des gens qui venaient te parler. Toi et ton allure d'ange des ténèbres quand tu déployais tes ailes. 

Toi et les galaxies qui traînaient dans tes prunelles.

J'oubliais tout ce qu'on avait ancré en moi, ces principes qui me dégoûtent, ces règles sombres qui nous embrouillent. Quand mes yeux se posaient sur tes délicieuses hanches, les fleuves de l'espoir jaillissaient du bordel de mon esprit.

JulietteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant