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Je suis encore occupé à gonfler le matelas quand Jeongin revient dans ma chambre. Il s'est changé, portant mes habits qui lui vont plutôt bien. Je pensais qu'ils auraient été trop grands, mais je remarque finalement qu'il est un peu plus grand que moi, bien qu'il soit beaucoup plus mince.
Timidement, il me tend ses affaires mouillées que je m'empresse de les prendre pour les mettre dans la manne à linge où d'autres de mes affaires attendent d'être lavées. Il m'aide ensuite à finir de préparer le lit improvisé avant de descendre pour manger. Sa mère et lui ne parlent que très peur pendant le repas. Jeongin mange comme si c'était la première fois qu'il le faisait depuis un certain temps alors que sa mère mange plus calmement tout en répondant aux questions de mes parents. Elle nous révèle aussi les circonstances de la mort de son mari et je crois voir des larmes aux coins des yeux de Jeongin.
Ce jour-là, son père avait emmené Jeongin avec lui dans le sud du pays pour lui apprendre son métier, mais Jeongin, bien trop curieux, c'était approcher trop près de la frontière et son père n'avait qu'eut le temps de le protéger avant de se faire tirer dans le dos, entre les omoplates, par un soldat. Il est mort quelques minutes après, dans les bras de son fils.
Quand le repas se finit enfin, ma mère nous autorise à monter dans ma chambre et Jeongin ne perd pas de temps pour conduire la marche. Il monte les marches assez lentement, sûrement fatigué par ce qu'il avait vécu depuis plus d'un an. Quand il pousse enfin la porte, il se dirige directement vers le matelas gonflable, prêt à se jeter sous les couvertures pour pouvoir enfin profiter d'une nuit de sommeil correcte, mais dans ma tête, je n'avais pas gonflé ce matelas pour lui. Alors avant qu'il ne se penche, je pose ma main sur son épaule et le relève.
- Ça, c'est mon lit. Le tien est là.
Je lui pointe du doigt mon lit et il ne semble pas comprendre directement que je préférais qu'il dorme dedans. Je le pousse alors vers celui-ci avant de soulever la couverture sur le matelas gonflable et me coucher dessous.
Une fois bien couché, je tourne le regard vers ma gauche, posant mes yeux sur les chevilles du plus jeune, à quelques centimètres de moi. Elles sont aussi fines que ses poignets et je sens mon cœur se serrer en remontant mon regard sur ses jambes toutes frêles. Je ne peux même pas imaginer ce que Jeongin a pu vivre pendant sa traversée.
Doucement, je le vois se glisser sous la couverture, s'enroulant dedans comme un chat. Jamais je n'aurais pu imaginer discuter au téléphone avec un garçon aussi mignon. Il était bien plus beau que j'aurai pu l'espérer et mes yeux ne veulent pas se décrocher de son visage apaisé. Il a posé celui-ci sur le bord du lit et je dois un peu relever ma tête pour pouvoir le regarder. J'aurais aimé le regarder pendant des heures, mais il décide d'ouvrir les yeux pour me regarder, tendant une main, peu sûr, vers la lampe de chevet.