Le manoir

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Le manoir se cachait dans un petit parc en friche, au milieu d'un quartier résidentiel totalement désert : seules quelques voitures abandonnées et un bus carbonisé complétaient le décor.

Du haut de ses trois niveaux, la demeure présentait une imposante façade en bois blanc, parée d'une longue rangée de fenêtres semblables à des vitraux d'église ; près du porche intégralement recouvert de lierre, un petit bow-window dessinait l'angle d'un pignon.

Depuis l'extérieur, tout paraissait normal.

Pourtant, à l'intérieur, c'était très différent.

Dans toutes les pièces, de nombreuses infiltrations commençaient à faire pourrir les murs, et les plafonds manquaient par endroits de s'effondrer. Au rez-de-chaussée, dans ce qui semblait être la cuisine, le sol était couvert de flaques d'eau noire et les fenêtres crasseuses obturaient la lumière. Une odeur rance emplissait l'espace, et au fond, au-dessous d'une armoire éventrée, était entreposé un gros réfrigérateur resté ouvert. À l'intérieur s'entassaient divers plats de matière blanchâtre en décomposition, et des amas de viande gris desséchés.

Marguerite se tenait là, les yeux vitreux et les lèvres bleutées. De longs râles rauques accompagnaient chacun de ses efforts, et ses bras tendus laissaient pendre des mains tremblantes. Elle s'empara d'un morceau de viande qu'elle mit dans sa bouche écumante, puis mâcha bruyamment en éructant à chaque déglutition.

MargueriteOù les histoires vivent. Découvrez maintenant