𝖈𝖍𝖆𝖕𝖎𝖙𝖗𝖊 𝖈𝖎𝖓𝖖

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Sa capuche rabattue sur ses cheveux verts, son masque bien remonté sur son nez, Yoongi déambule dans les rues. Le soleil brille fortement dans le ciel, et le jeune homme soulève des regards interrogateurs quant à sa tenue. Après tout, il fait chaud, et il est couvert des pieds à la tête. Pourtant, il ne souffre pas de la chaleur. Son esprit froid suffit à lui faire garder la bonne température.

Aujourd'hui, il a prévu de faire des repérages dans une petite boutique, très fréquentée. Cela fait plusieurs jours qu'il vient à différentes heures, pour voir comment le public évolue au fil des heures. Le jeune homme a repéré toutes les caméras, et lorsqu'il s'est penché pour prendre une bouteille d'alcool, proche du comptoir, il a remarqué qu'il n'y avait pas de bouton d'alarme. Donc, pas de possible arrivée des flics.

Donc, pas de Hoseok.

Cela fait deux semaines qu'il ne s'est pas fait arrêté. Le vert en a profité pour dealer un peu, et a accepté le défi qu'un type lui proposait lors d'une course de voiture. Étant donné qu'il n'a pas de voiture de course, contrairement à la majorité de ses adversaires, il s'est lié d'amitié avec un concessionnaire de luxe. Il est un client régulier, et a percé à jour l'homme, qui arnaque le gouvernement en détournant une partie des fonds. 

Leur relation est basée sur l'amitié et les menaces, mais c'est ce dont Yoongi a l'habitude. Il ne sait pas comment faire pour être totalement honnête avec des gens. Gens qui peuvent potentiellement lui faire du mal. Il a toujours besoin d'avoir au moins deux coups d'avance. Pour se protéger.

Le vieil homme le regarde entrer, toujours sur ses gardes. Il est dans les alentours d'une heure de l'après-midi, et le magasin est bondé. Les clients achètent de quoi faire un pique-nique, avec le beau temps dehors. 

Comme à son habitude, il attrape une bouteille de rhum, et se dirige vers la caisse. Le jeune homme sait parfaitement que les autres clients le dévisagent, le cataloguent comme déchet de la société ou comme voyou et honnêtement, il s'en fiche totalement. Cela fait bien longtemps qu'il a cessé de se préoccuper du regard des gens. 

Le vert est sur le point de prendre sa monnaie lorsque le mouvement des portes automatiques le fait se retourner. Son regard se fige lorsqu'il reconnît la démarche et la silhouette parfaite de Hoseok. Sa peau miel, ses cheveux noirs et ondulés, son grand sourire et ses yeux brillants... 

D'accord, il est vraiment atteint.

Yoongi se hâte de prendre a bouteille et sa monnaie, qu'il fourre dans sa poche, avant de quitter la petite échoppe. Malheureusement pour lui, l'officier le reconnaît également, et le hèle :

— Hé, Yoongi !

Une main se pose sur son épaule et l'empêche de sortir du magasin. Furieux, Yoongi ôte violemment la main du policier et le regarde sans état d'âme.

— Ça fait deux semaines qu'on s'est pas vu, reprend-il avec un sourire éclatant. Tout va bien de ton côté ?

Non. Tout va mal. Parfois, quand je vais sur le toit pour boire comme un trou, j'ai envie de sauter. J'ai besoin de l'adrénaline dans mon sang pour savoir que je suis vivant. Je ne suis plus qu'une putain de loque qui se contente de survivre sans aucun but dans sa misérable et pathétique vie.

— Ça va, grogne-t-il en tournant les talons.

Il sort de la boutique et accélère le pas quand il se rend compte que Jung le suit. Une nouvelle fois, il l'arrête, et cette fois-ci, il ôte sa capuche, l'air plus sérieux.

— Qu'est-ce que tu comptes faire avec cette bouteille ? s'inquiète le bouclé.

— Chasser les zèbres, répond nonchalamment le plus jeune. Vous avez fini votre interrogatoire, je peux y aller ?

—  Excuse-moi de m'inquiéter pour toi, souffle Hoseok en haussant les sourcils.

— J'ai pas besoin qu'on s'inquiète pour moi.

Si au contraire, je t'en supplie, empêche-moi de partir, prend-moi dans tes bras et dis-moi que tout ira bien...

— Oh. Et bien... on se reverra la prochaine fois alors, Yoongi.

Visiblement blessé, l'officier tourne les talons et entra dans la boutique, laissant le vert dans la rue, seul. Encore une fois. 

Ses doigts se rafferment sur la bouteille, et le coloré rabat sa capuche sur sa tête. Peut-être qu'il n'a plus peur du regard des gens, mais la foule continue à l'angoisser, et il se sent bizarrement à nu sans la protection de sa capuche.

Désormais, son esprit est bouillant. Il aurait tant aimé que le bouclé le retienne, insiste, encore et encore, et l'aide. Pourtant, il n'a pas su discerner ses appels à l'aide à travers son ton froid et distant. Mais c'est de sa faute, pas vrai ? Il a toujours été comme ça.

Yoongi quitte la rue. Et il ne voit pas le policier retourner sur ses pas pour le chercher.


Le coloré est complètement ivre. Contrairement aux personnes normales lorsqu'elles sont torchées, il n'a pas un sourire niais sur les lèvres. Il n'a ni l'alcool heureux, ni l'alcool triste. Mieux encore, l'alcool le rend entièrement neutre. Il ne réagirait pas, si un meurtre se déroulait devant ses yeux. Et c'est pour ça qu'il aime autant boire : son subconscient le lâche pendant quelques heures, et il se sent tranquille, apaisé.

Sans rien pour le juger.

Ses doigts se crispent autour du volant, et le moteur de sa voiture de course rugit avec puissance. L'adrénaline coule à flot dans ses veines, et il se sent revivre pour l'une des premières fois depuis longtemps. Ses pupilles brillent d'excitation. 

À ses côtés, son adversaire a le même mouvement du pied, et appuie régulièrement sur l'accélérateur pour faire vrombir la voiture. Face à eux, une demoiselle en short très court agite un drapeau devant eux, comme dans les films. Mais peut-être n'est-ce qu'une création de l'esprit de Yoongi. À l'instant où elle l'abaisserait, la course commencerait. 

Yoongi avait une très bonne réputation pour les courses de voiture. Il a ses propres fans, des nanas en chaleur qui lui montrent leurs seins, complètement stones, ou des mecs qui rêvent d'une chose : le mettre dans leur lit. 

Le public hurle, lève le poing en l'air en encourageant les deux participants. 

Et puis, en l'espace d'une demi-seconde, la jeune femme habillée très court en face des deux bolides abaisse le drapeau. La première voiture qui s'élance est celle du vert, qui évite de peu la présence féminine. 

Les deux véhicules sont au coude à coude. Ils se cognent régulièrement. Ils roulent beaucoup trop vite dans les rues de la capitale, si bien qu'une dizaine de minutes après le départ de la course, des voitures de police se lancent à leurs trousses. 

Le vert accélère encore et encore, jusqu'à ce qu'il arrive à un point où il ne peut pas aller plus vite. Il a semé la voiture de son adversaire, qui semble hors de lui, dans le rétroviseur. Lorsqu'il termine la boucle du circuit le premier, le public en chaleur hurle son prénom. Mais alors que tous pensaient que le conducteur allait ralentir, ce dernier, dans les nuages à cause de l'alcool, perd le contrôle de sa voiture. Mais l'a-t-il réellement perdu ou n'a-t-il simplement pas eu l'envie de freiner ?

Les lumières qui éclairent le visage saignant du coloré ne sont plus celles des véhicules de police, mais celles des ambulances.

shadow like me | sopeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant