Mon Idéal

Chapitre 11

Rahim
Avec la tête qu'elle fait, Safie croit sûrement que je suis fâché contre elle. Ce n'est pas parce qu'un homme l'appelle la femme de sa vie qu'il se passe forcément quelque chose entre eux. Et vue sa réaction de tout à l'heure, elle n'avait pas l'air de quelqu'un qui avait quelque chose à se reprocher.
C'est vrai que je suis très remonté, mais contre cet immature de Younouss Aïdara.
Même si Safie était sa petite amie, il ne devait pas réagir de la sorte. Malheureusement les jeunes d'aujourd'hui n'en font qu'à leur tête.
J'ai vu comment Safie le regardait et j'en ai déduit qu'elle ne voulait pas de sa présence. C'est pourquoi j'ai abdiqué lorsqu'elle m'a demandé si on pouvait partir.

Lorsque je me gare devant son lieu de travail, elle me demande:

elle: tu es fâché?(d'une toute petite voix)

Moi: non trésor, je suis juste surpris.

Elle ne dit rien et baisse la tête.

Moi: je sais très bien que tu ne fréquentes personne sauf moi. Par contre, j'aimerais bien savoir pourquoi mon client Younouss Aidara t'appelle la femme de sa vie.
Mais puisque c'est déjà l'heure de la reprise, on en reparlera plus tard.

Elle: d'accord.
Donc, je peux y aller?

Je souris face à sa question et lui dit:

moi: depuis quand tu es polie jeune fille?

Elle: depuis toujours mon vieux

Moi: qui est vieux ici?

Elle: il n'y a que toi et moi ici à ce que je sache (en tournant de gauche à droite)

Moi: ah ok, tu peux parler maintenant.

Elle décide de ne pas répondre et se contente juste de sourire, puis me dit:

elle: bon j'y vais, bon après-midi (en me donnant une bise).

Bizarre! C'est la première fois que ça arrive depuis que nous sommes ensemble.

Je retourne au cabinet mais ne vois pas mon assistante, elle n'est sûrement pas encore revenue de sa pause. J'entre dans mon bureau et trouve ma femme assise tranquillement sur le canapé, les jambes croisées.

Moi: Marianne!
Quelle surprise, que fais-tu là ?

Elle: puis-je savoir où est-ce que tu étais passé Abdou Rahim Guissé?
Je t'attends depuis plus d'une heure et c'est maintenant que tu daignes te pointer (en se levant).

Je ne dis rien, mais elle continue

Elle: c'est à toi que je m'adresse Abdou (en haussant le ton)

Moi: baisses d'un ton Marianne, je ne suis pas ton égal. Et puis c'est quoi ton problème! N'ai-je plus le droit d'aller déjeuner?

Elle: ne me prends pas pour une idiote Abdou, tu attendais toujours d'arriver à la maison pour manger.

Moi: tu sais quoi, c'est bon!
Laisses moi travailler, on finira cette discussion une fois à la maison (en lui ouvrant la porte).

Furieuse, elle arrache son sac et sort du bureau.

Elle: tu me trouveras à la maison!

Ma femme ne vient jamais me voir au bureau. Alors si elle le fait aujourd'hui, c'est sûrement parce qu'il y a quelque chose.
Je décide de ne pas y penser pour le moment.

Marianne Guissé
Mon mari commence vraiment à m'inquiéter. C'est vrai qu'il est toujours le même mais j'ai des doutes depuis que Ndella, mon amie d'enfance qui travaille en ville, m'a dit l'avoir vu à deux reprises avec une jeune femme voilée.
J'ai essayé à multi reprises de fouiller son téléphone mais il l'a codé, et bizarre il répond toujours aux appels devant moi.
Des fois, je me dis que je m'inquiète pour rien. Mais quand je pense à l'idée qu'il peut me tromper, je deviens folle.
Ce qui vient de se passer dans son bureau me fait encore plus douter.
C'est vrai que je ne vais jamais à son lieu de travail, mais aujourd'hui j'avais décidé de lui faire une surprise après que Ndella m'ait conseillé de me ressaisir pour plus ferrer mon homme.
À mon arrivée, son assistante m'a fait savoir qu'il n'était pas revenu au cabinet après son procès. Je me suis alors dit qu'il avait sûrement des choses à finir et qu'il serait bientôt de retour.
J'ai passé plus d'une heure à attendre et pas l'ombre de mon mari. Je l'ai appelé à plusieurs reprises en vain.
C'est lorsque je décide de rentrer que la porte s'ouvre sur lui.
Furieuse, je me suis mise à l'attaquer, mais j'ai regretté à la minute où il m'a mis à la porte.
Il ne paie rien pour attendre, je l'attends de pied ferme à la maison.

Safie
J'ai eu la peur de ma vie, moi qui croyais que Rahim serait fâché.
Maintenant j'appréhende sa réaction lorsque je lui parlerai de mon histoire avec Cherif et tout ce dont  j'ai eu à vivre avec ce dernier.
Cherif et moi sommes sortis pour la première fois quand j'avais 18 ans, lui avait à l'époque 25 ans. Il fut  mon premier amour, mon seul et vrai petit ami à part une petite amourette que j'ai eu à vivre avec un de mes professeurs au lycée, quand j'étais en classe de terminale.
J'avais coupé tous ponts avec lui, après qu'il a été contraint par ses parents d'épouser sa cousine.
Ce n'est pas parce qu'il s'est marié que je me suis éloigné de lui, non. Mais parce que ses parents ne voulaient pas d'une fille issue d'une famille pauvre comme belle fille. Alors je me suis juré que plus jamais je ne fréquenterais leur fils malgré l'amour que je lui portais.
Je suis peut-être pauvre, mais j'ai ma dignité et c'est le sang de noble qui coule dans mes veines.
Certains disent que "si aujourd'hui beaucoup de couples ne durent pas, c'est parce qu'on préfère abandonner à chaque obstacle". Moi je pense que dans certains cas, mieux vaut abandonner que se faire rabaisser.
Cherif me suppliait de me battre à ses côtés afin que ses parents reviennent sur leur décision en m'acceptant, mais je me voyais pas devenir leur belle-fille après qu'ils m'aient déjà montré qu'ils ne m'aimaient pas et ne m'aimeraient jamais.
Si on s'était marié malgré leur refus, c'est moi la femme qui allait le plus en souffrir.
Avec le temps, j'ai appris à l'oublier.
Apres notre rupture, j'avais perdu confiance, et fuyais les hommes comme pas possible.
J'avais peur de m'engager de nouveau et revivre la même chose qu'avec Cherif.
Mais sûrement parce que je n'avais pas encore rencontré mon Rahim. Quand j'ai connu ce dernier,je me suis dit qu'il fallait que je saisisse ma chance.

Je commençais à avoir un mal de tête, alors je range mes affaires et décide de rentrer.
Arrivée à la maison, je prends mes comprimés et m'allonge.