Je prends place, ou plutôt m'écrase, sur un tabouret au bar de la cuisine, face à ma mère. Elle me regarde en fronçant les sourcils.
— Sois délicat, Jace ! siffle-t-elle.
Je grogne, pour répondre. Elle radote. Le petit déjeuner est presque prêt, je meurs de faim. Elle se donne du mal, alors qu'elle vient de se réveiller. D'ailleurs, pourquoi se lever si tôt, un samedi ? Elle ne travaille pas, pourquoi ne pas profiter ? Je ne comprendrai jamais ma génitrice. Vu le niveau de fatigue dans lequel je me trouve, je suis incapable de l'aider. J'attrape mes cheveux en baissant la tête, ils s'emmêlent autour de mes doigts. Mon cerveau n'est pas en état et pourtant, il carbure. J'ai besoin qu'il se mette en pause.
— Qu'est-ce que tu as ? me demande-t-elle, gentiment.
Je déteste qu'elle me connaisse autant, elle serait capable de deviner que j'ai un bouton sur le cul sans même le voir. Je prétexte un mal de tête. Bon... je ne lui mens pas vraiment mais comment lui dire, lui avouer ce que je vis, ce que j'ai découvert ? Elle ne me croirait pas. Personne ne le peut, d'ailleurs. Un miroir magique qui me montre une brune... une belle brune.
Putain, une brune diablement belle !
— Ça a un rapport avec le miroir ?
Et merde, mais pourquoi ? Pourquoi, il faut qu'elle pige toujours tout ! Elle reprend sans me laisser le temps d'intégrer chaque mot, sans me laisser le temps de trouver une réponse ou encore, un subterfuge adéquat.
— Tu le regardais comme s'il allait t'apporter la vie éternelle.
Elle se moque ou je rêve ?
Ok, c'est officiel, je suis foutu ! Elle me connait vraiment trop bien. Je flippe ! Dès que je vais partir, elle va aller le chercher. J'essaie de retrouver confiance en moi, de récupérer une contenance suffisante afin de donner le change. Je redresse la tête pour ancrer mes pupilles aux siennes. Peine perdue, ma mère m'observe avec son sourire en coin, elle n'est pas dupe.
J'avoue ?
Je change de sujet ?Je crève d'envie de lui en parler, c'est ma maman et je sais qu'elle pourrait m'aider, me soutenir, trouver une solution.
Ai-je envie d'en obtenir une ?
J'ai besoin de conseils, d'avis, mais je n'arrive pas à trouver les mots. Elle va me prendre pour un fou ! Je tire encore sur ma tignasse. Finir chauve n'est pourtant pas dans mes projets ?! Si je choisis de lui montrer, de lui dévoiler le miroir, il risque de ne pas afficher ses talents.
Cet abruti d'objet ne s'éclaircit jamais quand il faut !
Je souffle, ce qui lui prouve qu'au moins, je réfléchis.
Elle dépose un café brûlant ainsi qu'une aspirine juste devant moi. J'englobe le mug avec mes doigts. La chaleur de la boisson me picote la peau alors que l'odeur envahit mes narines. Délicatement, ses mains viennent se poser sur les miennes, son geste est tendre, encourageant. Elle veut que je lui livre mes peurs, mes craintes. J'en suis incapable. Comment avouer que je me suis fait retourner le cerveau par une fille que je ne connais pas, que je n'ai même, jamais rencontrée. Je me sens trop... honteux pour lui révéler quoi que soit.
— Jace, je sais que tu n'es plus un enfant, mais parle-moi.
Son regard s'attriste, la lueur de chagrin qui transparaît dans ses pupilles me brise. C'est de ma faute ! Son visage se baisse, elle admire ce breuvage sombre qui bouge, la fumée qui s'en dégage, se confond avec la tristesse de ses traits. Elle reprend à voix basse :
— Ne me laisse pas de côté, s'il te plait, mon garçon. Et ne me prends pas pour une imbécile, je sais que ça n'a aucun rapport avec le match.
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À travers mon reflet
RomancePlus le sommet est haut, plus la chute est rude... Jace n'a qu'une idée en tête : se casser du Bronx, le quartier dans lequel il a grandi. Pour parvenir à ses fins, il doit obtenir une bourse pour la fac. Mais il est traqué par un gang qui ne souha...