9 - Shotgun

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Si je dois résumer le voyage du retour, ça tient en deux mots : « des questions ». Mike n'a pas arrêté de me poser des questions, sur moi, sur les conséquences de « mes » actes, sur ce qu'on allait faire de la fille, sur... bref. Des questions d'humain, quoi. J'ai été patient, parce que c'est Kuhma et que c'est pote, mais je pense que j'aurais tordu l'esprit à n'importe qui d'autre. Sauf peut-être à George, ma coloc'. Mike pile dans un parking désert, pas loin de la clinique véto où je bosse.

— Genevieve va être dans une situation...

— Je sais, Kuhma, mais on peut pas laisser un Wendigo au contact des humains. Je sais que c'est dégueulasse pour Ginny, que c'est dégueulasse pour tout le monde, mais ce truc leur aurait arraché la tête et les aurait dévorés. Voire pire, y'a des chances qu'elle puisse leur transmettre cette... cette saloperie.

— Tu sais à quel point elle se souvient de quand elle...

— La petite ?

La gamine respire plus calmement, elle dort toujours sur mes genoux sous les couvertures.

— De rien, rien du tout. Il y a souvent des cas d'humains qui ne se souviennent même plus de qui ils sont, après la morsure. C'est mieux.

— Ils se souviendront pas de nous, tu penses ?

— De toi, si. Tu vas me déposer à la clinique deux minutes, que je récupère deux-trois petits trucs et me ramener à la maison.

— Qu'est-ce que tu vas dire à George ? me demande Mike, l'air soucieux. Elle ne risquera rien, avec... ça... avec le Wendigo ?

— Si. Mais jusqu'à preuve du contraire, personne n'est hors de danger.

— Mais à part te battre avec, il y a une solution ?

— J'croyais que c'était la solution à tous les problèmes.

— Audeclar...

— Ça va demander pas mal de travail, j'élude en secouant la tête, caressant machinalement les cheveux noirs de la fille.

L'homme se tend. Il pose les yeux sur moi :

— Je t'ai toujours fait confiance, Audeclar. Là, on a dépassé les bornes.

— Je préfère le terme « repoussé » mais bon.

— Si tu veux. Mais tu dois me promettre que les choses se passeront bien, qu'il n'y aura pas de victimes.

Il regarde la fille, me regarde encore. Je ne fouille pas ses pensées mais c'est comme si : il a peur que je la tue.

— Je vais prendre un anesthésiant à la clinique, c'est dimanche, il n'y aura personne.

— Un stupéfiant ?

— Kuhma...

— Tu sais très bien que je n'aime pas que tu dévies un stupéfiant.

Je m'adosse contre la banquette et lui adresse une grimace :

— George va pas apprécier si un Wendigo ravage notre appart'.

— Tu pourrais éviter de prendre un stupéfiant, tout de même. Prends quelque chose qui n'entre pas dans les registres.

— Mike tu es chiant.

— Je suis flic.

On vient de commettre une douzaine de délits et au moins autant de crimes en l'espace d'une demi-heure, Mickaël Kuhma.

— C'était des cas de force majeure. Tu ne peux pas... l'hypnotiser, là, lui... lui tordre l'esprit ?

— Sous sa forme humaine, oui. Pas lorsqu'elle est sous forme de Wendigo. Tu penses, je me serais pas fait arracher l'épaule si ça avait suffi. Ceci dit... j'ajoute, pensif. J'ai un oncle qui est balaise dans la torsion des esprits. Il arrive pas à sortir les crocs, mais pour manipuler, ça... un vrai trou du cul, ce type, je peux pas le voir.

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⏰ Dernière mise à jour : Jun 08, 2020 ⏰

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Mircea DraculeaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant