6. let me go

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-    Allô, Abi ? Tu ne devineras jamais avec qui je vais emménager ? commençais-je toute excitée – attention, je vois déjà venir les esprits pervers, bien sûr on ne parle pas du même "excitée".

-    Dis toujours. Flemme des devinettes, répond-elle indifférente à mon excitation.

-    Samuel Benitez Flores.

-    Te fous pas de moi, chérie. Les blagues, c'est marrant un moment mais là c'est trop. Tu crois vraiment que tu vas me faire gober un truc pareil ? Shayna, il faisait parti des MI – Mecs Inapprochables – quand on était au lycée. Et puis, vous vous êtes jamais adressé la parole, rétorque-t-elle en riant.

-    Putain, Abi. Je vois pas ce que je gagnerai à te raconter de la merde. C'est la vérité, et puis je tiens à t'informer que Sam et moi, on se connaissait, continuai-je, agacée.

-    Ouais, ouais, c'est ça, et moi, je me suis déjà tapé Noah Centineo.

-    Mais, puisque je te dis que c'est la vérité. Sam et moi, on faisait du théâtre ensemble et on était super proches.

-    Bon, admettons que tu dises vrai, ce que je doute fort, comment se fait-il qu'il ne te parlait jamais pendant la pause ou à la cantine ?

-    Pour la simple et bonne raison que je l'évitais.

-    Et aurais-tu l'amabilité de m'expliquer la raison de cette distance physique entre vous deux ?

-    ...

-    J'attends, Shayna, s'impatiente-t-elle.

-    Toi, tu te fous clairement de ma gueule. Pourquoi tu parles comme une pauvre aristocrate ?

-    Bah, quoi. On a bien le droit de rigoler un peu, non ?

-    ...

-    Tu m'en veux ? S'enquiert-elle face à mon silence

-    Évidemment que je t'en veux. T'es ma meilleure amie et tu me crois même pas.

-    Si si, je te crois ma belle. Bon, maintenant dis-moi, pourquoi tu l'évitais ?

-    Parce que je faisais tâche à côté et je voulais pas que les gens se foutent de lui, répondis-je tristement.

-    Ah, merde. Shayna, tu n'as toujours pas confiance en toi ? Combien de fois vais-je te le dire ? Tu vas finir par me tuer un de ces quatre. Shayna, pourquoi tu penses encore comme ça ? Regarde-toi, un peu ! Et quand tu te seras bien regardé, tu me diras ce que tu as vu et je peux t'assurer d'avance que tu vas voir une personne merveilleuse. Crois-moi. Allez, je te laisse, ma mère m'invite au restaurant, une première. Ciao.

-    Bye.

      Elle a tort de croire que je suis merveilleuse ou je ne sais quoi. Tout ce que je peux dire c'est que je suis contente parce que j'ai trouvé un appart où vivre et que j'emménage demain. Tout ce que je veux c'est rentrer chez moi et l'annoncer à ma mère qui doit sûrement m'attendre.

Je hâte le pas jusqu'à l'arrêt de bus et je m'assieds sur le banc en l'attendant. J'ai rien de mieux à faire de toute façon

____

-     Maman, maman, devine quoi ? J'ai trouvé un appart et je pars demain, criais-je de joie à peine entrer dans l'appartement.

-     Demain ? C'est beaucoup trop tôt.

-     Maman, quand est-ce que tu vas me laisser voler de mes propres ailes ? Jamais ? Maman, écoute, je l'ai eu à un bon prix et j'économise depuis des mois pour partir. Je t'aime beaucoup, maman, et j'ai de la chance de t'avoir mais tu ne m'empêcheras pas de partir. Je sais que c'est dur sans papa et sans moi j'ose même pas imaginer mais maman, je te demande juste d'enfin tourner la page. Je sais pas moi, trouve-toi un amoureux, fais du shopping avec tes amis ou pars en voyage à Dubaï et ne te laisse plus ronger par la perte de papa. Il aurait détesté te voir dans cet état.

-     Je n'arriverai jamais à oublier ton père, mon ange, bien tenté.

-     Bon, mais au moins laisse-moi partir. Je viendrais te rendre visite souvent et tu pourras venir me voir. On pourra manger à midi ensemble quand tu veux, maman, mais laisse-moi partir.

-     Tu as gagné, chérie. Tu peux partir mais saches que tu vas beaucoup me manquer.

-     Tu vas me manquer aussi, maman. J'ai pas envie de te laisser seule et aussi, maman, j'étais sérieuse, trouve-toi un mec. C'est pas de l'infidélité, je dirais plus que c'est une alternative pour embrasser le bonheur à nouveau.

-     On verra bien. Tu as mangé ?

-     Oui, un sandwich.

-     Seulement ? Tu ne veux pas que je te fasse quelque chose à manger ?

-     Non merci maman, ça va.

      Je me dirige vers ma chambre et je commence à faire mes valises. Rapide ou pas, mon départ était inévitable. Ma garde-robe n'est pas immense, je ne suis même pas étonnée de constater qu'elle tient dans deux grandes valises. Au bout de trente minutes ma mère est venue m'aider à faire mes cartons. Mon réveil, ma lampe de bureau, mes livres, mes carnets, mes innombrables stylos, en bref tout. Ma chambre est complètement vide, il ne reste que les meubles. Je n'ai plus qu'à préparer mes trousses de toilette et de maquillage que je vais mettre dans mon sac. Pour cette dernière nuit avec ma mère, j'ai décidé de dormir avec elle. Blotties dans le grand lit, nous pleurons ensemble, mais ne vous inquiétez pas, on a fini par s'endormir – heureusement.

us. [EN PAUSE]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant