Marche funèbre

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Recroquevillé dans un coin de sa cellule, Cyril regardait dans le vide. Un grattement, un couinement. Une souris avait tenté de prendre son maigre repas.

- Laisse-moi !

Un garde se retourna au son de sa voix, le réprima d'un regard. Tout était silencieux dans cette prison. Pas le droit de parler. Les seuls bruits qu'on pouvait percevoir étaient les chaînes des captifs qui bougeaient. Pendant ce temps, la souris s'était enfuit loin du jeune garçon. Il regarda alors son assiette en carton, comportant quelques croûte de pain et un os presque dépouillé de sa viande. Il s'approcha, faisant cliqueter les entraves métalliques qui l'attachaient au mur. Il attrapa l'assiette contenant son repas frugal.
Tel était la hiérarchie de la prison. Les plus faibles, les derniers arrivés et les plus jeunes étaient opprimés par les plus fort, les premiers arrivés et les plus vieux. La loi du plus fort, en somme. Une loi normalement puérile, que les enfants appliquent au parc ou dans la cour de récréation. Mais ici, c'est la règle la plus importante de toute.
Après que Cyril eu fini de manger, un garde arriva.

-C'est l'heure des visites.

Une clé à la main, il attrapa sans douceur les poignets du jeune homme, et le détacha. Il fit de même avec ses chevilles. Il se leva avec difficulté, ses jambes frêles tremblaient, pouvant à peine supporter le poids du garçon. Ses parents ne l'avaient pas conçu fort et robuste, et le manque de nourriture le rendait encore plus faible. Une fois debout, il s'appuya sur le mur de pierres froides. Mais le gardien l'empoigna à l'épaule.

-Pas le temps de se reposer, dépêche-toi !

Il passa lui passa les menottes et ils sortirent de la cellule, Cyril à moitié tiré par le garde. Ils arrivent devant les parloirs, d'autre prisonniers étaient déjà là. Il s'assit sur une chaise, devant une vitre épaisse.
De l'autre côté, personne. Personne n'est là, et personne ne viendra. Il le savait pertinemment, mais il ne pouvait se résoudre à laisser tomber. Voir quelqu'un venir pour lui, c'était son dernier espoir, cette flamme qui le faisait vivre.
Il n'était pas le seul comme ça. Très peu de personne venait voir les détenus. Ici ce trouvait tous les reclus de la société, les pires hors-la-loi.
« Je ne suis pas comme ça, pensa Cyril, je ne devrais pas être là, moi ! »
Les visites devaient bientôt finir, et il retournerait dans son enfer de pierres et de chaînes.
« Non, je ne peux pas me laisser faire ! »
Et dans un élan de courage, il se leva, et de sa main frêle, donna un coup dans la vitre. Puis un autre, et encore un autre. Les larmes coulaient sur ses joues, ses cris encombraient la pièce. 
« Je ne veux pas mourir ici ! »
Mais tout était vain. Les gardes allaient bientôt débarquer, et ça sera la fin. Et pourtant, même si il savait tout ça, Cyril s'était rebellé. Était-ce de la bravoure, une volonté de renverser le système de la prison ? Ou juste un acte désespéré, pour essayer de faire vivre sa lueur d'espoir un peu plus longtemps ? Nous ne le saurons jamais.
Les gardiens arrivèrent, le stoppant dans son élan. Ils l'attrapèrent, l'écartèrent de la vitre. Cyril tenta de résister, mais son faible corps ne le pouvait pas.
Les pas lourds des gardes, résonnant dans le couloir, rythmaient la danse funèbre qui se jouait, la marche légère et traînante de Cyril en chantonnait la mélodie.
Arrivés à la cellule, il fut jeté, frappé, battu. Les gardes le laissèrent alors, à l'agonie. Il n'en restait plus qu'une masse difforme. Une mare de sang l'entourait, s'étendant de plus en plus, amoindrissant les chances de survie du jeune homme.
Les battements de cœur ralentissaient, pour finir par s'arrêter. Son âme s'échappa alors, s'envolant vers les cieux, laissant derrière elle son cadavre. 

Rayons de luneOù les histoires vivent. Découvrez maintenant