Chapitre 3

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Nathan

Ce samedi, je décide de profiter des premières neiges et de la préouverture des pistes, de la station voisine. Elle ouvre souvent une semaine avant celle de mon village. En arrivant sur le télésiège, je me retrouve côte-à-côte avec Noémie, elle-même en snowboard.

— Toi ici ! me lance-t-elle.

— Oui, j'ai voulu profiter d'un week-end sans match, et des pistes avant que les touristes débarquent.

— Et sur l'immensité du domaine, fallait qu'on tombe l'un sur l'autre.

— C'est le karma.

— Si tu le dis.

Après un long silence, je demande :

— Sinon, ça va ?

— Ne te sens pas obligé de faire la conversation.

— Ok...

— Je peux te poser une question ? reprend-elle néanmoins quelques secondes plus tard.

— Ouais, si je peux y répondre.

— Pourquoi...

— Pourquoi quoi ?

— Pourquoi tu t'es comporté comme ça avec Sophie ?

— Oh... J'avais dix-huit ans, j'étais loin d'ici et de la majorité de mes proches, y compris elle. Puis quoi qu'elle ait pu te dire, ce n'était pas non plus la grande joie entre nous. Le peu qu'on se voyait, on se prenait la tête. Elle était hyper jalouse, ça frôlait limite l'hystérie. A côté de ça, je commençais à sortir avec des copains de fac, et puis il y a eu cette fille. Et un jour j'ai craqué.

— Mais pourquoi tu n'as jamais tenté de recoller les morceaux ou de t'expliquer avec Sophie ?

— Pour quelqu'un qui ne voulait pas parler, ça fait beaucoup de questions, dis-je en souriant.

— Pardon.

— C'était fini, c'est tout. Ça m'a permis de prendre conscience qu'on n'était plus sur la même longueur d'onde et que je n'avais pas de sentiments.

— Tu n'as jamais eu de regret ?

— Non... enfin... un seul : ça m'a fait perdre quelqu'un qui comptait vraiment pour moi, avoué-je.

Je jette un regard à Noémie, qui ne me répond pas. Puis, le télésiège arrive à bon port. Nous relevons le garde-corps et nous apprêtons à descendre. Alors que nous nous levons et commençons à glisser pour dégager l'arrivée, je vois le snowboard de Noémie dévier et m'entraîner dans sa chute.

— Tu peux pas faire attention, râle-t-elle.

— Euh... C'est toi qui viens de nous faire tomber.

— C'est... c'est de ta faute !

— Ma faute ?

— Oui. Tu... tu m'as... perturbée.

— Parce que je te perturbe maintenant ?

Je ne peux m'empêcher de sourire face à sa réflexion.

— Tu m'as très bien comprise.

Je lui tends la main pour l'aider à se relever.

— Merci...

Nous nous observons un moment, puis Noémie propose :

— Tant qu'on est là, tous les deux, ça te dit qu'on fasse du snow ensemble ?

— Merci, mais je tiens à ma vie.

— Comme tu veux, c'était pour être polie.

— C'est bon, je te suis.

Nous passons un bon moment ensemble. A croire que mes confidences ont un peu débloqué nos relations car je trouve Noémie beaucoup plus détendue dans nos échanges. Un peu comme avant. Si j'avais su, j'aurais insisté davantage pour lui parler dès le départ, nous n'aurions pas perdu six ans. Au fil de la journée, je me rends compte qu'elle m'avait manqué ces dernières années, même si j'avais d'autres amis sur lesquels compter, je n'ai jamais retrouvé la même complicité qu'avec elle.

***

Le lendemain, en fin de journée, je me rends au Sharks. J'ai promis à Matt que je passerai, n'ayant pas eu le courage de l'accompagner en boîte de nuit la veille, après ma journée de snowboard. Je remarque que Noémie travaille aussi aujourd'hui. Elle est en compagnie de Sophie, dont les yeux me lancent des éclairs dès que je la croise. Je m'approche du bar et m'installe face à Matt, après lui avoir serré amicalement la main.

— Ca va mec ?

— Ouais.

— Je te sers quelque chose ? Je viens d'inventer un nouveau cocktail si tu veux ?

— Ok. Je vais goûter ça.

Je le regarde préparer son cocktail, tout en l'écoutant me parler de la soirée de la veille et de sa conquête de la nuit. Noémie s'approche de nous, en boitant. Elle s'est fait mal au genou hier, en se réceptionnant mal pour éviter une chute.

— Tout va bien ? s'inquiète-t-elle, face à nos deux regards posés sur elle.

— Oui, mieux que toi, sourit Matt.

— Ah ah ah.

— Elle est de mauvais poil, me précise Matt. Elle s'est fait mal au genou en snow. Un mec qui lui a coupé la piste.

— Oui, c'est ça. Il y en a qui ferait mieux d'apprendre à en faire avant d'aller sur les pistes, râle-t-elle d'un ton provocant.

— Puis il y en a qui devrait regarder devant elle sur les pistes aussi, rétorqué-je.

— Fallait bien que je me rattrape comme j'ai pu pour éviter que monsieur me rentre dedans ! balance-t-elle avant de repartir vers des clients.

— C'est donc toi le con qui ne sait pas faire du snow ? remarque Matt.

— Euh... Presque.

— Et comment se fait-il que vous étiez ensemble ?

— On s'est croisé sur les pistes, du coup on a passé un moment ensemble. Ça nous a permis de discuter un peu.

— Comme au bon vieux temps.

— Ouais, c'est à peu près ça. C'était sympa, mais bon...

— L'ombre de Sophie plane, conclut Matt.

— On dirait.

Je jette un coup d'œil en direction de Noémie qui parle maintenant avec Sophie et son fiancé.

— Tiens, voilà Don Juan, remarque Matt.

— Qui ça ?

— Julien ! Ça fait bientôt trois mois qu'il fait la cour à Noémie, avec le soutien de Sophie qui le pousse à fond, mais il n'a pas l'air de percuter qu'elle le considère juste comme un ami.

— Faut reconnaître que Noémie est une jolie fille, ça se comprend qu'il tente sa chance.

Cela fait au moins deux fois en un mois que je remarque que Noémie est une belle femme. Je l'ai toujours su, mais je ne l'avais jamais considérée comme une jeune femme avec un potentiel de séduction. Je la voyais comme un pote...

— Ouais, c'est sûr. Mais ça ne marche pas pour lui. Il n'a pas le truc qui fait le déclic, faut croire.

Bizarrement, je n'imagine pas du tout Noémie avec ce garçon, et cela me fait plaisir de savoir qu'elle n'a pas l'air de vouloir lui laisser une chance. Non pas que ça me concerne, mais elle mérite mieux qu'un coup arrangé par une copine.

Quand l'amour s'en mêleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant