...nous desservirons au terminus Paris Saint-Lazare dans 5 minutes.
La voix qui s'échappait des hauts-parleurs le réveilla brutalement. Julien avait été dans un demi-sommeil pendant plusieurs heures. Sa bouche était pâteuse, il se sentait encore un peu dans les vapes. Néanmoins il sortit le premier du wagon, empoignant sa valise comme si sa vie en dépendait.
Julien sortit du bâtiment. Il leva la tête en direction du ciel nuageux, la pluie commença à mouiller ses vêtements. Il continua de marcher, jetant furtivement des regards aux bars parisiens bondés. Il apercevait de petits groupes, trinquant joyeusement en l'honneur du week-end qui venait de commencer. L'odeur caractéristique de la cigarette vint titiller ses narines, il inhala ce délicieux poison et pressa le pas. Les lampadaires illuminait son visage renfermé, la pluie avait fini de le tremper de la tête aux pieds. Une demi-heure de marche suffit, il s'arrêta net à l'entrée d'une ruelle sombre. Il s'avança prudemment évitant les cadavres de bières.
Il aperçut une mèche rousse dépassant d'un petit renfoncement. Il s'approcha un peu plus, humectant le parfum vanillé qui s'en dégageait. Les yeux dans les yeux, Julien se rapprocha tel un félin de la jeune femme et déposa un doux baiser sur ses lèvres pulpeuses.
Jeremy profitait de l'absence de pollution sonore et visuelle pour contempler le ciel étoilé. Accoudé à la rambarde et les yeux mi-clos, il fumait tranquillement sa troisième cigarette. Dos à la porte, il l'entendit s'ouvrir délicatement.
-Je nous ai apporté des infusions de thé.
Gaël s'assit à côté de son ami et lui tendit la tasse.
- Merci mec.
Jeremy se délecta de l'odeur fruitée du breuvage, il y trempa prudemment ses lèvres.
- C'est une belle soirée.
Gaël leva la tête à son tour.
- C'est reposant.
Il fixait à présent Jeremy.
- Si Julien avait été là, on se serait fait une nuit à la belle étoile. Comme quand on était des ados débiles.
Jeremy rigola.
- C'était inconfortable, dangereux et sans aucun intérêt. Mais étrangement j'en garde un bon souvenir.
- Gaël...
Le Gaël en question sourit.
- Quand Julien et moi nous nous sommes disputés, j'ai eu une réaction à chaud et j'ai pas forcément pesé le poids de mes mots. On se connaît depuis quasiment toujours, j'ai pas envie de mettre un terme à notre amitié pour de bêtes histoires d'engueulades.
Gaël se rapprocha de Jeremy.
- Ce genre de choses arrive parfois malheureusement...mais Julien t'aime trop pour t'abandonner sur un coup de tête.Jeremy leva de nouveau les yeux vers le ciel.
- Tu sais, c'est peut-être bizarre mais j'ai toujours plus ou moins pensé que Julien et toi...
Gaël marqua une pause.
-... vous étiez ensemble.
Jeremy écarquilla ses yeux, sa respiration se coupa. Il eut un blanc d'une dizaine de secondes.
- Comment ça ?
- Je sais pas mais il y a comme une sorte d'ambiguïté entre vous...
Gaël bégaya
- ...ce qui n'est pas un problème en soit...
- Je sais que c'est pas un problème. (*)
Jeremy baissa la tête.
- Julien ne voudrait jamais-
- Et toi ?
Gaël but la dernière gorgée de sa boisson, désormais froide.
- Si c'était possible entre vous deux, comment tu l'envisagerais ?
Jeremy se contenta de poser sa tasse. Il se leva d'un air maussade, rangea son briquet et partit d'un pas lent vers la lourde porte en chêne.
Enroulé dans les draps tachés d'une misérable chambre d'hôtel, Julien parcourait avidement de ses mains moites le doux corps qui se mouvait sous son torse. Il explorait précieusement le trésor interdit, libérant ses pulsions charnelles en un râle rauque. Julien sentait des phalanges expertes caresser son intimité, quelques frissons lui parcoururent l'échine. Son érection se frotta bestialement aux lèvres mouillées de sa partenaire.
- ... attends un peu...
Julien se releva, surplombant la demoiselle. Elle le fixa langoureusement.
La poitrine à nue, ses longs cheveux bouclés lui encadrant le visage et un sourire angélique magnifiant son visage. Julien ne pouvait qu'admirer sa beauté.
- Je peux pas continuer.
Le sourire de la jeune fille disparut, l'incompréhension s'empara d'elle.
- Pourquoi tu veux arrêter chéri ?
Julien baissa les yeux.
- Réponds-moi.
Les mots semblaient être coincés au fond de sa gorge.
- Je peux pas c'est tout.
Julien se dégagea rapidement du lit et saisit son boxer.
- Et mon fric ? C'est pas gratuit chéri.
Il lui tendit un billet de 50.
- Ça ira pour la demi-heure.
Elle attrapa le billet d'une main hésitante. Julien enfila son jean et réunit les quelques vêtements encore éparpillés au sol.
- T'as trompé ta meuf c'est ça ?
Elle eut un léger rictus. Julien stoppa toute activité.
- J'ai fait bien pire.
- Ah bon ? Quoi ?
Julien ramassa sa valise et entrouvrit la porte.
- Je me suis trompé.
Sur tout.
(*) Certain.e.s trouveront probablement la référence.