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Basil veille à ce que je ne me fasse pas mal en traversant les bois, et me donne sa veste pour que je me couvre dans la voiture. Il est contrarié, ses mains restent crispées sur le volant. On passe un bout de chemin sans parler, mais il finit enfin par s'exprimer tout haut.

— Mais enfin Théa, explique-moi pourquoi tu es partie seule dans les bois comme ça ? C'est dangereux ! Tu le sais mieux que personne aux vues de ce qu'on a découvert l'autre soir. Je ne savais où tu étais passée, si quelqu'un te faisait du mal ou si tu étais entrain de faire un coma dans un coin !

— Excuse moi, j'avais besoin d'air. Cette fête m'étouffait, je me sentais bizarre.

Il hoche la tête et je prends ça pour un pardon. Malgré que les tensions se soient réduites, je le sens toujours préoccupé. Je ne crois pas que ça soit à cause de moi.

— Tu comptes dormir où ce soir ? il me demande soudain.

Je cligne des yeux, surprise.

— Eh bien, chez moi.

Je percute en même temps que je réponds. Je suis censée dormir chez Amelia ce soir, si je rentre en pleine nuit, mon père ne va pas comprendre. Je pince les lèvres.

— Je te ramène chez moi, m'annonce-t-il sans me questionner.

Au point où j'en suis, autant franchir toutes les limites. Cette nuit, tous les interdits tombent j'ai l'impression. Il enfonce son pied sur l'accélérateur et emprunte la route qui contourne le centre-ville, longeant les bois.

— Comment tu fais pour ingérer autant d'alcool et ne pas être complètement saoul ? je lance d'un coup.

Il esquisse un petit sourire.

— J'ai un bon métabolisme.

Il se fout de moi, il a bu plus que la plupart des jeunes présents, et il est encore complètement lucide. Il devrait au moins y voir flou, ou ne serait-ce qu'être un peu trop joyeux. Je ne pipe mot. Ma baignade nocturne m'a aidée à faire redescendre l'alcool, mais en revanche ça m'a épuisée. Sous nos deux vestes bien chaudes et le chauffage à fond, mes yeux deviennent lourds. Je cale ma tête confortablement et me concentre sur le ronronnement de la voiture.

J'émerge alors que Basil détache ma ceinture, penché sur moi. Il me sourit, et chuchote qu'on est arrivés. Je jette un coup d'oeil, et reconnais le bâtiment en crépit blanc. Son parfum boisé me caresse le visage. Je dois me forcer pour ne pas replonger et sortir de mon cocon tout chaud. À peine j'arrive à m'extirper de la voiture, que Basil me soulève du sol. Il me porte comme si je n'étais pas plus lourde qu'un chaton. J'ai le nez dans sa veste en cuir, respirant son odeur sensuelle et réconfortante à pleines narines. C'est à peine si je sens qu'on monte des escaliers. On entre dans une pièce sombre et il me dépose sur un lit moelleux. Lorsqu'il éclaire la pièce, je me rends compte qu'on se trouve dans sa chambre.

Je suis surprise par la décoration sobrement sombre. Les murs sont peints d'un bleu nuit profond, contrastant avec les grandes portes-fenêtres qui offrent une vue imprenable sur la forêt. Les draps sont en soie noirs, glissant agréablement sous mes doigts. Un dressing ouvert habille une partie du mur du fond, juste à côté d'une bibliothèque remplie de divers livres et albums. Un bureau est tapit dans le coin de la pièce, vêtu d'un MacBook et d'un plateau relevable où trône une feuille vierge. Quelques dessins sont affichés juste au-dessus. Je m'approche pour mieux voir. Il y a des paysages et des portraits, chacun exécutés au crayon gris. Il est très doué, c'est magnifique. Basil revient, vêtu d'un simple short bleu foncé. J'hausse les sourcils et détourne les yeux, gênée.

— Tiens, dit-il en me tendant un vêtement noir. Ton jean est trempé, et les paillettes ça ne doit pas être très confortable pour dormir.

J'attrape le vêtement et le déplie. C'est un t-shirt, un peu grand pour moi. Je le remercie d'un signe de la tête et il s'éclipse de nouveau. J'ôte mes vêtements avec une lenteur exaspérante, puis enfile le t-shirt. Il est assez long pour me couvrir jusqu'à la moitié des cuisses, c'est le principal. Lorsque Basil réapparaît, il transporte un sac de couchage et un coussin. Il balance le tout à terre et soupire.

Cursed Huntress⏤ original storyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant