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Mon sang chauffe dans mes veines. Je décide de regarder, au lieu de me faire un film pour rien tant bien. Un coup d'oeil derrière moi m'apprend que c'est un jeune homme qui court à distance. Je m'arrête, soudain essoufflée. Sûrement le stress. Il a dû comprendre qu'il m'a effrayée, car il ralenti jusqu'à s'arrêter une fois arrivé à ma hauteur.

— Salut, dit-il le souffle court.

J'hoche la tête en guise de réponse, encore à bout de souffle. Mes yeux le survolent en un coup de vent, mais cela suffit pour que mon ventre se contorsionne et que mes joues s'enflamment davantage. Ses cheveux noirs ondulés sont parsemés de gouttes d'eau, flamboyants à la lumière du soleil qui s'est dégagé. Son regard, tout aussi sombre que ses iris, me jaugent également de la tête aux pieds. Un sourire en coin creuse discrètement sa joue. Mes joues, déjà cramoisies, me picotent terriblement.

— Désolé si je t'ai fais peur, mais en général je ne croise jamais personne ici. Faut croire qu'on a le même parcours, s'amuse-t-il en haussant un sourcil.

Et il fait de l'humour. Son timbre de voix particulièrement chaud et rauque contracte mon bas-ventre. Je déglutis afin de lui répondre, pour éviter qu'il ne me prenne soit pour une muette, soit pour une idiote.

— Je découvre, c'est la première fois que je cours dans ces bois. En fait, c'est la première fois que je cours dans cette ville tout court, je viens d'arriver.

— Oui, je t'ai vu aujourd'hui au lycée. Je ne savais pas que tu vivais par ici.

Je souris. Ça fait bien une heure voir plus que je cours. Je dois être loin de chez moi maintenant. Je ne sais même pas où je suis.

— À vrai dire, je ne sais même pas où je suis, je lui avoue. Ça fait un moment que je cours, alors je dois être assez loin de chez moi.

— Eh bien, je te suis depuis une bonne vingtaine de minutes je dirai. Alors si tu veux, on peut faire demi-tour jusqu'à chez moi, et de là, je te ramènerai chez toi en voiture. La nuit commence à tomber, ça ne serai pas prudent de continuer par les bois, on ne sait pas ce qui traîne dans le coin.

Ma première réaction est de me méfier. Qui sait si ce n'est pas lui le danger ? Mais il a raison sur un point : la nuit va bientôt tomber et ce n'est pas prudent de rester dans les bois. De plus, je ne sais pas si je serai capable de rebrousser chemin dans la nuit, je risquerais de me perdre. Je l'observe un instant, avec son regard de braise et son visage à tomber. Il a tout du parfait tueur en série. Il pourrait très bien m'enterrer dans ces bois. Mais je décide de lui faire confiance. Il aurait eu tout le temps de me tuer depuis ces vingts dernières minutes s'il l'avait voulu.

— Ça marche. J'espère que je ne vais pas finir découpée en morceaux et enterrée au fond de ces bois, je m'exclame.

Il lâche un petit rire en me jetant une oeillade, puis on s'élance tous les deux dans le sens inverse. On cale notre rythme l'un à l'autre, et je le laisse passer devant pour qu'il me montre la voie. Les muscles de son dos roulent sous son t-shirt noir serré. Je me surprends à reluquer ses fesses dissimulées sous un short ample, et détourne aussitôt les yeux. Le ciel s'obscurcit de plus en plus, les arbres paraissent être des géants noirs, les buissons si chaleureux sont désormais des cachettes gorgées de dangers, et les bruits que je savourais me semblent dès alors effrayants. On ne dit pas un mot de tout le trajet, se concentrant sur le chemin et ce qui l'entrave. Finalement, on arrive sur un chemin tracé et bordé de lampions qui mènent à un petit portail blanc. Il se retourne vers moi et me lance un sourire éclatant.

— Bienvenue chez moi..

Il s'arrête en plein élan.

— Je ne t'ai même pas demandé comment tu t'appelais, remarque-t-il.

Cursed Huntress⏤ original storyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant