Les tourments du samedi

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Les yeux gris de Tord ne lâchaient plus l'horloge murale de sa cuisine, qu'il s'était surpris à détester plus d'une fois.
Faudrait vraiment qu'il pense à la jeter.
En parlant de penser, il n'arrêtait pas de le faire depuis ce qui lui semblait être une éternité.

La lune était haute et pleine dehors, il s'était résigné à arrêter de compter les minutes.
Ce n'était pas moins douloureux de fermer les yeux et de compter les secondes, pour se rendre compte que l'horloge affichait encore et toujours la même heure.

Il avait peur, là allongé sur ce canapé où Tom passait la plupart de son temps.
L'angoisse dessinait des larmes au coin de ses orbites.
Il ne pouvait rien faire à part attendre.

Pourtant, il savait qu'il n'arrivera rien.
Il n'arrivait jamais rien.
Mais, c'était plus fort que lui.

Quand Tom avait eut ce boulot en tant que compositeur, Tord avait partagé sa joie. Il l'avait même écouter pendant des heures alors qu'il lui racontait ses journées. Qu'elles soient passionnantes ou pas.
Puis, Tom s'était mis à travailler de nuit.
Faisant des heures supplémentaires pour terminer chacun des morceaux qui lui avaient été demandés.
Tord savait que son brun aimait tellement son boulot qu'il ne remarquait jamais l'heure tardive à laquelle il rentrait.
Alors, il ne disait rien et l'encourageait.

Puis, au bout d'un moment, une angoisse sourde est née dans son cœur.
L'angoisse de finir par perdre Tom.

Ils avaient leurs habitudes à eux.
De loin, on avait l'impression que leur couple était le fruit de la routine.
Leurs "Je t'aime" devenaient parfois mécaniques, automatiques.
Un simple réflexe.

Au fond, Tord avait toujours eut un côté sensible qui attendrissait Tom sous ses airs de brute.
Ils s'aimaient énormément, beaucoup trop.
Tord le savait bien, mais c'était juste impossible pour lui d'avoir l'esprit tranquille.

Il s'imaginait des trucs incroyables.
Des raisons pour lesquelles Tom ne rentrerait pas.
D'abord des accidents, puis des images teintés de sang.
Et enfin, cette fille.

Cette fille qui détournera son homme de lui.
Il la traçait dans sa tête comme une douce torture pour son âme.
Elle s'appelait Sarah, elle était chanteuse.
Il se l'imaginait brune comme lui, une nuance plus clair et les yeux gris.
Elle avait du talent, Tom serait subjugué par ses courbes qu'il pensait parfaite.

Puis, lui, il finira pas l'oublier.
Parce que "Sarah" sera mieux que lui.

- Arhg...

Heureusement, le cliquetis discret de la serrure finit par retentir dans ses conduits auditifs.
La sonorité de la délivrance.
Il quitta enfin ses pensées sombres.

Tom vint le prendre dans ses bras, sans un mot.
Sachant pertinemment qu'ils n'avaient pas besoin de mots.

Heureusement, Sarah ne s'était pointée ce soir.

𝐷𝑎𝑖𝑙𝑦 𝑡ℎ𝑖𝑛𝑔𝑠 Où les histoires vivent. Découvrez maintenant