Chapitre 2 - Mikazuki

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Mikazuki

La mortalité est un carcan. C'est seulement quand la mort arrive que chaque être peut enfin s'épanouir. Être libre c'est de ne pas être contraint par quelque chose. Dans la mort, nous n'avons pas besoin de respirer, de manger ou encore bien ressentir quoi que ce soit afin de pouvoir survivre... Puisque nous sommes libres.

En tout cas, c'est ce que Nurarihyon nous explique à chaque fois qu'une âme récemment détachée de sa mortalité vient le rejoindre. C'est un cycle sans fin.

Je m'appelle Mikazuki Ogawa et je suis morte il y a à peu près cent ans. Dans ma vie, je fut atteinte par une maladie rare qui se nomme l'alexithymie. Un mal qui empêche de ressentir et d'exprimer ses sentiments.

De ce fait, j'étais tout le temps à la recherche de la moindre petites sensations. N'importe quel frémissement pouvait faire l'affaire. Je voulais tout simplement être humaine.

Mais ma soif de sensation a causé ma perte. Lorsque j'ai voulu faire une chute libre. Mon parachute ne s'est tout simplement pas ouvert au bon moment. Un accident qui m'a coûté la vie.

A présent, je ne vis que dans les ténèbres. Toujours incapable de ressentir ou d'exprimer quoi que ce soit. Ma vie ne tenait qu'à un fil et je l'ai brisé.

Je suis devenue un démon, un Yōkai. Un être sans sentiment et dépourvu de mortalité. Dans la mort, je ne fais qu' errer dans les longs couloirs des enfers.

Chaque jour se ressemble ici, il n'y a pas de début et il n'y a pas de fin. C'est comme si le temps était resté figé à jamais. Pas de soleil ni de chaleur, le vide. Pas de cycle de nuit et de jour, rien.

C'est Nurarihyon qui dirige cet enfer. A ses yeux, chaque démon est son enfant et il nous considère comme des orphelins, abandonnés par leurs parents. Il a l'allure d'un vieil homme et il boit toujours du thé. Malgré son apparence amicale, c'est un être maléfique et cruel. Un monstre avide d'anarchie qui possède une énorme armée de démons derrière lui.

Autrement dit aucun mortel, monstre, ou esprit quelconque ... lui arrive à la cheville. Il est le maître absolu. C'est aussi lui qui décide quel démon a le droit d'aller dans le monde des humains. Le plus souvent, c'est pour aller hanter, traquer ou tuer quelqu'un.

Tous les démons n'ont pas cette chance d'y déposer les pieds. Beaucoup d'entre nous sont beaucoup trop instable, il n'ont donc pas le droit. Si on les envoyait tous dans le monde des mortels, il n'y aurait plus de nouveaux démons aux enfers. Car tous les êtres vivants se feraient massacrer à la chaîne et si un être ne meurt pas par cause naturelle, son âme n'existe plus.

Voilà pourquoi certains ne possèdent pas ce droit. Seuls les cent premiers démons les plus puissants peuvent y aller comme bon lui semble. En bref, nous tuons seulement quand Nurarihyon estime que cela est nécessaire.

En ce qui me concerne, contrairement à certains démons, je possède une forme humaine. Je n'ai pas trop subi lors de ma transformation. Mis à part que je peux me métamorphoser en oiseau bleu à ma guise.

Je ressemble à un geai de lidth, je le sais car j'en ai sauvé un de la noyade quand j'étais enfant. Certains mortels me nomment : La cueilleuse de larmes. Car je possède aussi le don d'absorber les émotions. Il me suffit de frotter les larmes de mes victimes afin de les vider de toute émotion.

Par conséquent, celle-ci deviennent amnésiques pendant un certain temps. En d'autres termes, je me nourris de leurs sentiments.

- Mikazuki ?

Un démon de type Kistune vient m'interpeller. Je le connais et il s'appelle Archer. Les Kistune possède de nombreux pouvoirs : divination, se métamorphoser en une sorte de renard à neuf queues mais surtout la manipulation des rêves.

En effet, ils peuvent anéantir leurs cibles en les tuant dans leurs rêves. Souvent les kitsunes sont des femmes mais dans son cas, il est rare que ce soit un homme.

- Oui Archer ?

- Nurarihyon nous demande. Il veut que les cent démons les plus puissants le rejoignent dans la grande salle.

Malgré que je ne ressens aucune émotion, je suis tout de même intriguée. Pourquoi le maître demande à nous voir ?

- Toujours aussi blasée Mika. Me lance Archer en marchant à mes côtés.

- Je suis désolée, je n'arrive pas à faire autrement. Répondis-je à Archer en regardant dans le vide.

- Ce n'est pas grave. De toute façon, tu es comme tu es.

Archer est un homme gentil. Toujours à l'écoute des autres. Mais quand il s'agit de tuer, il n'a aucune pitié.

- Tu as été dans le monde des humains récemment ? Me demande-t-il gentiment.

- Non. Répondis-je sèchement.

- Tu devrais y aller faire un tour. L'automne est une saison magnifique.

Je ne comprend pas cette sorte de fascination à contempler cette verdure terrestre. Peu importe le cycle naturel. Ce ne sont que des plantes. A part à maintenir l'atmosphère sur terre, je ne vois pas en quoi cela est admirable.

- Pourquoi tu ne parles jamais Mikazuki ? J'ai l'impression de parler à un mur. Me déclare Archer en levant les yeux au ciel.

Je tourne la tête vers lui. Me trouve-t-il pénible ?

- Je m'excuse Archer. Je ne sais pas ce que tu veux dire par "aller faire un tour" ?

Archer soupire. Vu son expression faciale et son corps tendu... J'en déduis que je l'agace.

- Et bien... Allez faire un tour c'est allez se balader. Tu sais, quand tu te promènes dans la forêt d'Aokigahra, ça c'est faire un tour. M'explique alors Archer les mains derrière le crâne.

Il est vrai que je vais souvent dans cette forêt. Je ne sais pour quelle raison d'ailleurs. Je sais juste qu'il fait très calme et bruyant à la fois. A cause de tous ses oiseaux.

- D'accord. Répondis-je à Archer avec neutralité. 

Le kistune ne m'adresse plus la parole durant un bon moment. Jusqu'à ce qu'on arrive dans la grande salle. Auprès du grand Nurarihyon. 




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