L'Obsession

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Et ce fut ainsi que je me retrouvai à mon grand étonnement accueillie par le diable de Londres, qui, en seulement quelques secondes rythmées par les onze coups de Big Ben, rembarra vivement son associé pour sortir tout le monde de son bureau et se retrouver... en tête-à-tête avec moi ?

« Je ne m'attendais pas à vous revoir de sitôt. » fit-il remarquer comme pour souligner ma venue à l'improviste. « Toutefois, asseyez-vous, je vous en prie. Le croquis a-t-il été déjà abouti ? »

Il claqua des doigts en direction de son majordome, qui était encore ébranlé par la violente manière dont le patron de la House of DeVil avait coupé court à son entretien uniquement pour me recevoir. Comme si les haussements de sa voix tonitruante flottaient encore dans la pièce et faisaient vibrer son corps frêle.

« Alonso ! Ne restez pas là comme un idiot, voulez-vous ? Servez-lui un thé et débarrassez-la de son portfolio ! » s'était empressé de lui ordonner C. DeVil sur un ton presque agacé.

« Oh non non, merci, je ne veux rien ! » intervins-je doucement pour empêcher au pauvre homme de se faire davantage crier dessus. Ce dernier me rendit par ailleurs un sourire que je compris reconnaissant, bien que toujours crispé par la nervosité. Je me reportai ensuite à Monsieur DeVil avec un ton plus approprié : « Et... non, malheureusement ce n'est pas pour vous annoncer que mon travail est terminé... mais qu'au contraire, je perds beaucoup de mon temps à le finir, pour cause... d'oppression. »

À ces mots, la silhouette de mon patron se figea l'espace d'un instant, tandis que j'hésitais encore à m'asseoir face à son bureau, comme il me l'avait demandé. DeVil sembla passer par plusieurs émotions intérieures, comme s'il jugeait mon culot, mais étonnement, il finit par adoucir légèrement son expression, haussant les sourcils et relevant un peu le menton dans un léger « Oh ? ». Puis il fit signe à Alonso de partir pour nous laisser seuls, avant de me faire signe de m'asseoir, s'approchant pour sa part de son fauteuil à lui en cuir.

« Je... vous prie de... m'excuser, dans ce cas. » prononça-t-il difficilement avant de s'installer correctement en face de moi, son somptueux bureau de verre nous séparant de seulement un mètre. « C'est juste que je... (il sembla grimacer sans un faux rictus serein avant de rajuster ses lunettes noires) je prends vraiment cette esquisse de projet au sérieux, voyez-vous ? C'est un modèle qui a beaucoup attiré ma curiosité, ces derniers jours... »

Je pense qu'il ne voulait pas le paraître, mais il ressemblait à ces hommes de bureau addicts au café qui n'avaient pas eu droit à leur dose matinale, ou encore à ces dépendants à la cigarette dont la tentative d'arrêt était une torture pour leur âme. Il semblait bien plus que seulement « intrigué » par mon croquis, et cela avait comme pour effet de l'exciter et de l'assagir en même temps. C'était très étrange à voir, comme comportement. Mais je n'arrivais pas encore à mettre la main sur le mot juste qui le définissait.

Pour se détendre davantage, il sortit un petit coffret à cigarillos pour en allumer un sur son porte-cigarette masculin, à mon grand malheur bien sûr, puisque l'odeur du tabac m'intoxiquait.

« Ne vous en faites pas, je ne suis pas là pour vous désirer... enfin ! Pour désirer des jours supplémentaires, je veux dire ! Non, loin de là ! » fis-je. « Je voudrais simplement... de la tranquillité... ainsi qu'une certaine confiance de votre part, pour mener à bien la petite mission que vous m'avez confiée. »

Il pompa plusieurs bouffées à l'embout de son porte-cigarette avant de souffler progressivement sa fumée sur son bureau, hochant doucement la tête.

« C'est compréhensible. » il acquiesça en relevant ensuite la tête vers moi pour... tenter un sourire ? « Je demanderais à ce qu'on vous isole, si c'est là ce que vous voulez. »

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⏰ Dernière mise à jour : Oct 31, 2020 ⏰

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