Les retrouvailles

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Cependant, la paix ne dura pas, et, bien vite, le Prince dût s'en retourner aux combats, accompagné cette fois-ci par Monsieur de Chabannes, dont il avait réussi à convaincre la cour de son honnêteté.

En ces mêmes temps combattaient aussi Henri le duc d'Anjou, frère de Charles IX roi de France et fils de Catherine de Médicis régente, aux côtés du rival du Prince, Henri, duc de Guise.

Tous deux , durant les courts instants de repos que les batailles leurs accordaient, passèrent assez de temps ensemble pour acquérir une certaine complicité.

Ces deux ducs acquirent beaucoup de gloire au combat, notamment durant la bataille de Jarnac, qui vit succomber le prince de Condé, ce qui ne fit que très peu de plaisir à Monsieur de Montpensier, qui n'avait oublié ses rivalités avec le duc que l'on disait "Balafré".

Après des sièges éprouvants tant pour les soldats que pour les bêtes, une courte trêve fut ordonnée par les chefs militaires des deux camps opposés.

Le duc d'Anjou, accompagné de ses troupes et de celles du duc de Guise, s'en alla se reposer à Loches, tandis que le Prince de Montpensier et le comte de Chabannes s'en retournèrent à Champigny, qui n'était que très peu éloigné.

Un jour qu'il revenait à Loches, le duc de Guise, souhaitant fort impressionner le duc d'Anjou, se vanta incessamment de connaître un chemin que personne ne savait, et ainsi il embarqua sur ses pas les troupes et son supérieur. Cependant, ce n'est pas par la volonté que les jactances des beaux parleurs deviennent vérité, et, lorsque finalement, ils arrivèrent près d'un lac, le duc de Guise dut bien admettre qu'il était perdu. La troupe entière fit la guerre à de Guise, quand à Anjou, il s'amusa avec attendrissement de cette tentative ratée du duc pour l'épater, sans toutefois le laisser voir à ses hommes.

Cependant, on aperçut bien vite une barque statique au milieu de la rivière, dans laquelle se trouvaient quatre femmes. L'une semblait pauvrement vêtue, et les troupes firent bien vite remarquer l'éclatante beauté de celle qui était assise à ses côtés. Dès lors, ils se mirent à insister auprès du duc de Guise, certains qu'il les avaient perdus exprès pour voir cette créature d'une beauté surnaturelle, et qu'il était là pour lui demander sa main.

De Guise agacé demanda aux soldats de cesser leurs railleries, et, comme pour appuyer son propos, il demanda au duc d'Anjou ce qu'il en pensait. Celui-ci, se voyant pris à parti et obligé de répondre, répondit, aussi pour le flatter, qu'il se devait qu'Henri devienne l'amant de cette magnifique femme ,mais ses yeux teintés d'une légère tristesse reflétaient bien mieux sa pensée que ses mots.

Finalement, le frère du roi envoya l'un de ses gens s'avancer au plus proche de la dame, pour lui demander qu'elle approche sa barque car le duc d'Anjou souhaitait passer la rivière. Reconnaissant le nom du duc d'Anjou, et sachant qu'elle se devait de lui obéir, la dame accepta, faisant approcher sa barque de la rive pour faire monter le duc. Dès que la barque fut assez proche; le duc de Guise fut troublé en reconnaissant , dans cette dame qui leur prêtait une barque, la Princesse avec qui autrefois il avait cru partager de tendres instants. Elle-même, lorsqu'elle reconnut de Guise, fut prise d'une stupeur, tandis que ce dernier la présentait à Anjou, qui entrait dans la barque avec lui, tandis que leurs troupes partaient plus loin chercher un chemin pour traverser et se rendre à Champigny où la Princesse les avait invités.

Que ce soit Marie de Montpensier ou Henri de Guise, chacun-e pensait que ce qu'iels croyaient acquis dans le passé devait toujours être acquis ce jour là, et les regards que Monsieur de Guise avait avec la Princesse formèrent une boule au creux de la gorge du duc d'Anjou.

Durant leur trajet jusqu'à Champigny, Marie leur expliqua qu'elle était venue sur cette barque observer les pêcheurs accompagnée de ses femmes car la partie de chasse de son époux était trop lassante.

Celui-ci, d'ailleurs, en fut revenu si tôt que la Princesse et les ducs arrivèrent au château, et fut bien peu ravi de voir le duc de Guise en compagnie de son épouse. Chabannes en fut lui aussi, assez mécontent, présageant les conséquence que pourrait avoir une telle rencontre.

 Lors du repas cependant, la discussion fut le plus cordiale possible. Le duc d'Anjou fit connaissance de Marie et comprit bien rapidement qu'il pouvait avoir confiance en cette jeune princesse. Il en fut fort soulagé, ayant craint quelques instants d'avoir pu croiser ce jour là une personne hostile. Cependant, il ne put s'empêcher d'avoir un léger pincement au cœur en observant encore le regard du duc de Guise à l'égard de leur hôtesse, et ainsi, il quitta la table plus tôt pour se rendre à ses quartiers, prétextant quelques tracas intestinaux.

Ce soir là, cependant, la maisonnée s'endormit avec peine, car François cria sur la Princesse, ayant peur qu'elle ne le quitte et que lui ne meurt dans un obligatoire duel d'honneur face au duc de Guise, laissant le comte de Chabannes dans une peine profonde et terrifiante.

Le duc d'Anjou demanda à rester quelques jours, feignant de s'être mal remis de ses tracas, ravi en réalité de partager la même chambre que le "Balafré".

La Princesse de NotrepensierOù les histoires vivent. Découvrez maintenant