Chapitre 17

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J'appréhendais de retourner à l'école de sorcellerie. Poudlard sans mon meilleur ami ne serait plus Poudlard. Car parcourir les couloirs sans Regulus, ne plus m'asseoir à côté de Regulus pendant nos cours communs, ne plus charrier Regulus... ce serait insoutenable. Et comment réagirais-je si je lui notais des blessures, souvenir de cette nuit au Ministère ? Je chassais ces pensées de ma tête le temps de dire au revoir à Bathilda.

    – Ma petite Ayden... murmurait-elle en me dévisageant, les mains sur mes joues.

Je souriais. Je n'étais pas bien grande, pourtant je parvenais à faire une bonne tête de plus qu'elle.

    – Sois forte.

Mon sourire flanchait. Elle rapprochait mon visage du sien, désireuse de capter toute mon attention.

    – Tu n'es pas seule.

Ces quelques mots soufflés suffisaient à faire briller mes yeux. À son tour, elle me souriait, avant de déposer un baiser sur ma joue. Je ne lui avais pas parlé de tout ce qui m'oppressait. Elle avait accepté ma décision de ne pas aborder le sujet, mais c'est comme si elle avait conscience de tout ce qui me pesait, comme si elle comprenait tout grâce à son instinct.

Elle était bien plus que ma grand-tante à mes yeux. C'était une mère sans enfant, jusqu'à mon arrivée dans sa vie.



Mon quotidien à Poudlard était devenu maussade. Si avant je parvenais à supporter la suspicion ambiante, c'était grâce à la présence de Lily et de Regulus. La première avait terminé ses études. Le dernier se pavanait à présent dans les couloirs comme un coq. C'était comme si le Regulus que j'avais connu n'avait jamais existé, comme s'il avait toujours été l'acolyte de Rabastan, aussi détestable l'un que l'autre. La distance méfiante que j'avais inspiré au fils Lestrange en lui jetant un sort un an plus tôt s'était dissipée. Il s'était enorgueilli d'avoir mon meilleur ami à ses côtés, un sourire goguenard sur les lèvres à chaque fois qu'il m'apercevait. Il n'était pas rare de les voir traîner, eux deux et leur petite bande de Serpentard dont le frère et la sœur Carrow, et terroriser d'autres élèves en ricanant. Peut-être était-ce moi qui prenais mes espoirs pour la réalité, mais de loin, j'avais l'impression que Regulus n'y prenait pas totalement part. Comme lorsqu'on goûte du bout des lèvres la mixture douteuse d'un être aimé seulement pour ne pas la froisser.

Dire que j'assumais parfaitement la solitude revenait à mentir. J'avais grandi enfant unique, j'étais donc capable de me suffire à moi-même, d'une certaine manière. J'avais cependant dépassé ce stade en entrant à l'école. Je m'étais fait des amis, en tout cas deux véritables amis, j'étais entourée d'autres jeunes sorciers et sorcières avec qui j'avais mûri pendant sept ans. Alors oui, j'aurais menti en affirmant supporter la solitude. Elle ne me jetait pas à terre pour me piétiner, j'avançais le menton haut et le dos droit, mais elle n'en alourdissait pas moins mes pas.

Cette journée-là fut plus difficile à encaisser que les autres. Je n'avais pas la force de mettre un pied dans la Grande Salle. Je comptais faire l'impasse sur le dîner avant de me souvenir d'une conversation entre les Maraudeurs. Hésitante, je pesais le pour et le contre pendant quelques minutes avant de dévier du flux d'élèves affamés pour descendre l'escalier menant aux sous-sols. Je débouchais dans un couloir où je n'avais jamais mis les pieds depuis le début de ma scolarité. Sur les murs étaient affichés nombre de tableaux de victuailles aux couleurs éclatantes. J'avançais doucement, étudiant les toiles en m'éloignant toujours plus du bruit de l'étage, jusque parvenir devant une peinture représentant une énorme coupe en argent, débordante de fruits alléchants. Je fronçais légèrement les sourcils en me remémorant ce qu'avait dit James ce jour-là. Chatouiller la poire. Je me mordillais la lèvre en observant ledit fruit. Je me lançais enfin, tendais les doigts pour gratouiller en essayant de ne pas songer à quel point j'avais l'air ridicule.

Une Lune d'or et de noir [ANCIENNE VERSION]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant