Tout s'imbriquait dans mon esprit, pour reconstruire un puzzle que j'aurais préféré ne pas comprendre. Durant les jours qui me séparaient encore de la rentrée scolaire, je ruminais sans cesse. J'avais l'impression que mon cœur battait plus vite depuis ce fameux jour au Chemin de Traverse. Plus vite, plus fort, blessé dans ma poitrine. Sirius m'avait averti. Remus aussi. Moi-même je savais au fond de moi que quelque chose clochait. Mais j'avais préféré fermer les yeux sur la vérité, refusant de voir l'évidence, refusant d'admettre que l'amitié qui nous reliait Regulus et moi vivait ces derniers instants.
Le 1er septembre, je faisais le voyage seule dans le train nous emportant vers l'école de sorcellerie. Reg n'avait pas cherché à me trouver. C'était insoutenable. Je me sentais démunie. Détruite. J'étais meurtrie, mutilée par son absence. Je me forçais à ravaler ma douleur, la transformais en colère. Il n'avait pas le droit de me laisser tomber comme ça.
J'avais l'esprit ailleurs durant toute la Répartition, le cherchant des yeux à la table des Serpentard. Le festin de début d'année s'étirait en longueur, jouait avec la patience de mes nerfs. Je ne parvenais pas à toucher à mon assiette. Il fallait que je lui parle. Que nous ayons la discussion que nous aurions dû avoir des mois plus tôt. Nous ne l'avions que trop repoussé. Quand Dumbledore déclarait enfin qu'il était temps de regagner nos lits respectifs, je bondissais de mon banc, m'attirant quelques regards offusqués. Je n'en avais cure et allais me poster à la sortie de la Grande Salle. Regulus finissait par apparaître parmi le flot d'étudiants. Je lui attrapais le bras et le traînais sans ménagement dans une salle de classe vide du hall d'entrée.
La porte fermée, je me retournais enfin vers lui en posant mes mains sur mes hanches. Je devais rester inébranlable. Mais mes bonnes résolutions, comme mon impassibilité, manquaient se briser en voyant son visage de plus près. Ses cernes étaient plus noirs encore que deux semaines plus tôt.
– Qu'est-ce que tu faisais au Chemin de Traverse, ce jour-là ? attaquais-je sans autre forme de procès.
Les mots s'étaient échappés de ma bouche avant que je ne puisse les retenir. Il restait silencieux, se contentait de me regarder.
– Réponds-moi, Reg.
Je répétais ma question. Ses yeux semblaient me supplier d'abandonner, de ne pas l'obliger à répondre. Je sentais une nouvelle vague de colère monter en moi, car la lueur dans ses pupilles était comme un aveu. Je me surprenais à vouloir nier encore la réalité, tant qu'il ne l'avait pas clairement énoncé. Parce que ça ne pouvait pas être vrai, n'est-ce pas ? Parce que mon meilleur ami ne pouvait pas être comme Rabastan Lestrange, parce que Sirius ne pouvait pas avoir raison, c'était évident, non ? Parce que je ne pouvais pas avoir échoué à le sauver.
– Montre-moi ton avant-bras.
Je contrôlais le timbre de ma voix alors que mon rythme cardiaque se lançait dans une cadence angoissée. Regulus ne pipait toujours pas mot, mais il continuait à m'implorer implicitement. Dépassée par les évènements, par ce que je comprenais, ma colère explosait malgré moi.
– Montre-moi ton avant-bras, Regulus !
– Pourquoi ! Pour voir ça !? s'énervait-il à son tour.
Arrachant presque le tissu de sa chemise, il dégageait son avant-bras gauche, celui qu'il n'avait cessé de gratter inconsciemment depuis Noël.
Mon cœur cessait soudainement de battre.
Je faisais un pas maladroit en arrière, ébranlée.
Ma rage s'étouffait brutalement.
La sienne aussi.
La Marque des Ténèbres ondulait avec obscénité sur sa peau.
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Une Lune d'or et de noir [ANCIENNE VERSION]
Fiksi PenggemarDécembre 1977. Voldemort continue d'étendre son ombre sur le monde des sorciers. Le Royaume-Uni est assailli de toute part et même Poudlard peine à épargner ses élèves. Ayden, jeune femme à la lugubre affiliation et dont le destin est inextricablem...