Le monde du placard

Esidie

La jeune fille arriva dans la cabane qu'elle avait vu à travers l'écran. Ainsi c'était vrai !  Elle avait à nouveau traversé une de ces fameuses portes !  

Elle regarda autour d'elle. Son regard se posa d'abord sur la porte en bois et sa serrure où une clé partiellement rouillée était acrochée. Elle était encadrée par deux fenêtres poussiéreuses. À sa gauche, se trouvait un banc sous lequel des vêtements de pêcheur étaient empilés. À sa droite pendait un filet, une canne à pêche et d'autres accessoires qu'Aurélie ne connaissait pas.

Aurélie se sentit projeter en avant et tomba.

"Désolé."

La jeune fille était restée juste devant la porte et le vieil homme, qui venait à son tour de traverser, l'avait poussée. Il l'aida à se relever.

"Où allons-nous maintenant ? " demanda-t-elle.

Il tourna la clé dans la serrure et Aurélie retint son souffle. Où étaient-ils arrivés ? Les fenêtres sales lui permettait à peine d'apercevoir une sorte de bâtiment en bois, en face de la cabane. À moins que ce ne soit un bateau ? 

Quand l'homme ouvrit la porte, Aurélie sut que c'était bien un bateau et qu'ils étaient dans un port. Un port très bruyant. Partout, des hommes et des femmes criaient pour se faire entendre par-dessus le vacarme. Quelques hommes à l'air important portaient des capes.

Le vieil homme lui fit signe de le suivre. Il marcha jusqu'à un petit bateau et entra. Aurélie, après un moment d'hésitation, le suivit. Une jeune fille les accueillit.

"Alvar, vous êtes là ! Savez- vous que les rebelles ont réussi à nous coincer à Astra ?

- Non, ils n'ont pas fait ça ?!

- Si. Ils nous ont tendu un piège et on a eu de la chance de s'en sortir.

- Je suis désolé. J'aimerais vraiment pouvoir vous téléporter avec moi pour vous mettre en sécurité mais vous savez que c'est impossible.

- Oui, on sait."

Aurélie profita du moment de silence qui suivit pour observer plus attentivement la jeune fille. C'était une adolescente d'une douzaine d'années, à la peau claire et au visage mince. Ses cheveux blonds étaient rassemblés en une queue-de-cheval haute. Elle fixa Aurélie de ses yeux bleus-gris et demanda à Alvar : 

"Vous n'êtes pas seul ? "

Aurélie comprenait que l'adolescente ne voulait pas recevoir une invitée surprise dans son bateau et allait s'excuser mais le vieil homme, Alvar, fut plus rapide pour prendre la parole :

"Ah oui, je te présente Aurélie, elle vient d'un autre monde. Elle est aussi recherchée par les rebelles et il faut que vous l'emmeniez avec vous."

Les deux jeunes filles eurent l'air aussi stupéfaites l'une que l'autre. 

"Vous voulez qu'elle fasse le voyage avec nous ? 

- Oui, c'est ce que je veux."

L'adolescente le regarda avec étonnement pendant un moment avant de répondre par un simple :

"D'accord."

Le vieil homme hocha la tête d'un air satisfait mais Aurélie s'inquiéta :

"Comment vais-je faire pour rentrer chez moi si on s'éloigne de la porte ?

-On s'en occupera plus tard."

Aurélie allait lui demander des explications mais, à nouveau, Alvar fut plus rapide et il changea de sujet.

 "Où est Marco ?

- Il est au port pour acheter de la nourriture.

- Il risque de se faire voir ! 

- Oui, mais il faut bien qu'on mange ! Et puis, il est prudent, je suis sûre que rien ne va lui arriver."

Cependant, l'air inquiet de son visage contre disait ses paroles rassurantes. Le vieil homme soupira et sortit de son sac un sachet à provisions.

"Tenez. Ce ne sera sans doute pas assez pour tout le voyage mais vous en avez déjà pour au moins une semaine avec ça. Et je vous en prie, évitez au maximum d'être vus ! Je vais jeter un sort sur le bateau pour le rendre invisible comme ça seul un sort de détection pourra vous repérer. Pour le faire réapparaître, il vous suffira de frapper dans vos mains. Mais attention cela n'empêche pas qu'on puisse vous entendre.

- Merci, Alvar !

- Bon j'y vais. Faites bien attention à vous."

Aurélie sursauta.

"Attendez ! Vous n'allez pas me laisser ! Je ne sais même pas où on va ! Et je veux pouvoir rentrer chez moi !"

Mais, avant qu'elle ait fini sa phrase, Alvar avait disparu. Aurélie, qui disait pourtant peu de gros mots s'exclama : "Merde" et tapa rageusement du pied sur le sol. Elle allait recommencer mais elle vit que l'autre fille la regardait en fronçant les sourcils et elle essaya de se calmer. Elle n'avait pas envie d'être prise pour une gamine capricieuse. L'adolescente, les sourcils toujours froncés, lui dit :

"Tu n'as pas l'air contente d'être ici.

- En effet... Disons qu'on ne m'a pas vraiment demandé mon avis avant de m'abandonner sur ce bateau loin de ma famille et, si j'ai bien compris, loin de mon pays. D'ailleurs, je ne vois pas ce qui m'empêche de rentrer chez moi."

Elle s'approcha de la sortie, bien décidée à quitter ce monde mais l'autre fille la retint.

"Si Alvar t'a dit de rester, tu devrais l'écouter. Tu pourras toujours trouver une porte plus loin... Et puis, tu n'as pas envie de découvrir Esidie ?"

Ce dernier argument finit de convaincre Aurélie qui revint sur ses pas en soupirant :

"Bon ok mais pas longtemps. Et si, la prochaine fois qu'on le voit, Alvar ne me donne pas une bonne raison pour m'avoir emmenée ici, je pars immédiatement.

- Comme tu veux... Au fait, je m'appelle Julie, ajouta-t-elle après un petit moment de silence gêné.

- Oh comme mon amie ! , s'exclama Aurélie qui décida de prendre cette coïncidence comme un bon présage. Enchantée, moi c'est Aurélie. Et qui est Marco ?

- C'est mon frère. Comme tu as dû le comprendre, il est sorti faire des achats mais il devrait bientôt revenir.

Son air soucieux revint.

"Je suis sûr qu'il va bien, assura Aurélie, bien qu'elle n'en ait aucune idée.

- J'espère, soupira Julie. Au fait, quand tu dis que tu vis loin d'ici. Tu viens de quel monde, Esige ? 

- Euh... de la Terre."

Ça faisait vraiment bizarre à Aurélie de parler du monde d'où elle venait. Julie réfléchit un instant, les sourcils froncés, puis ses yeux pétillèrent. 

"C'est pas vrai ! Terre, c'est bien le nom que Aetriens donnent à Aetria ? Je n'avais jamais rencontré quelqu'un qui vient de là. C'est génial!"

Aurélie sourit devant l'excitation de la jeune fille.

"Qu'est-ce qu'il y a de si génial ? demanda une voix de garçon derrière elle."