Chapitre 2 : Mercredi 2 février

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Je n'ai pas cessé de penser à elle. La nuit, le jour, le matin, le soir. Mina n'a pas quitté mon esprit un instant.

Aujourd'hui, nous sommes mercredi. Et je sais qu'elle sera à la cafetaria vers neuf heures. Je ne l'ai pas stalkée, évidemment, mais John me dit souvent le mercredi matin aller retrouver sa pote compositrice au réfectoire. Ce matin, il n'y va pas et ça m'arrange, parce que moi, je compte y aller. Je ne peux plus faire autrement, je dois la revoir.

Je crois que je n'ai jamais autant stressé dans ma vie avant d'aller parler à une fille. Mais cette fois c'est différent, parce que je m'apprête à lui parler de mes textes. J'ai pas mal réfléchi depuis la veille, et je me suis décidée à lui demander de me composer un morceau. Toutes ces sensations que j'ai ressenti en sa présence, ce qu'elle a fait de Bad Dream, j'ai besoin de le vivre une fois de plus. Autant pour qu'elle arrête d'obnubiler mes pensées, que parce qu'elle est la seule à pouvoir exprimer ce que je veux dire par mes textes.

Je ne sais même pas si elle va accepter de composer de nouveau pour moi, ni même pourquoi elle le ferait. Mais je dois lui demander, je dois au moins essayer.

Je n'ai jamais parlé de mes textes, ou presque jamais. En fait, il n'y a que John, mon ex et ma mère qui sont au courant. On m'a collé l'étiquette de basketteur sexy à mettre dans son lit, et je n'ai pas vraiment envie que les gens sachent que je suis autre chose que ça. John trouve ça con, lui. Il dit que ce que j'écris est travaillé, que je pourrais vraiment en faire quelque chose. Il pense même que je pourrais devenir écrivain. Mais il ne comprend pas. Je n'ai pas peur qu'on me critique, ou qu'on me nargue. C'est juste que mes textes sont personnels. Même si une part de moi voudrait que plus de gens les lisent, une autre, plus forte et plus imposante, n'a pas le courage de dévoiler autant de choses à des personnes en qui je n'ai pas totalement confiance.

Je n'ai pas totalement confiance en Mina, mais son talent reste coincé dans mes pensées et je ne peux plus l'ignorer. J'ai envie de son talent pour mes textes.

...

J'arrive devant les portes de la cafétéria, une boule au ventre. Je n'arrête pas de me répéter que ce ne sont que des mots, que des mots et une fille qui coupe mon souffle au moindre mouvement. Je ne peux pas m'empêcher de stresser. Je pousse les portes de la grande salle, et la voit.

Mes poils se hérisse, je déglutis bruyamment, mes yeux se perdent sur son doux visage. J'ai beau réfléchir, je crois que je ne l'avais jamais vu avant hier. Je m'en serais rappelé sinon.

Je vais prendre un café au petit bar. Ça me donnera peut-être du courage. Une fois le gobelet en main, je fixe sa table. Elle est seule, sur son ordinateur en train de travailler sur un quelconque projet. Je vois derrière elle qu'elle est sur un logiciel de partitions. John m'a dit qu'elle était en licence de musique, spécialité chant et piano. Rien d'étonnant jusque-là.

Je souffle et je me lance sans réfléchir. Je n'ai jamais été aussi intimidée par quelqu'un avant cela, mais je ne peux plus reculer. J'arrive vers elle, et avant de tirer une chaise, je dis :

- Je peux m'asseoir ?

Mina relève les yeux de son écran et me regarde. Je la vois parcourir la salle autour d'elle et constater les tables vides. Puis son esprit se rappelle de moi. Je ne l'ai pas marqué autant qu'elle s'est inscrite au fer rouge sur ma peau, et je ne peux empêcher mon cœur de se pincer à cette idée.

- Oh, t'es le pote de John, non ? Oui, oui, vas-y, je t'en prie, poursuit-elle sans attendre de réponse.

Je prends place et pose mon café devant moi. Je la regarde un instant, inspire une grande bouffée d'air le plus discrètement possible, puis me lance :

Coup de FoudreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant