Chapitre 14

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Ben était à ses côtés depuis le début. Il cachait son visage dans ses bras, ne voulant pas voir ce qu'il avait fait, le mal qu'il avait causé à la seule personne auquel il tenait. Seules ses épaules prouvaient qu'il pleurait. Elles tressautaient régulièrement, on pouvait entendre un sanglot, puis le calme revenait dans la pièce. Clément resta ainsi à écouter le beau blond, à le sentir contre sa peau. Il avait saisi sa main et la caressait à l'aide de son pouce, comme si ce geste anodin pouvait le réveiller. Il ne prenait même pas la peine de relever la tête, et c'était mieux ainsi. Le cannibale ne voulait pas le voir, l'angoisse lui tordait le ventre. Finalement, Ben plongea son regard dans celui de l'homme, confus. On ne pouvait lire dans ses yeux que de la peine, de la haine contre lui-même

Ben : Je suis... tellement désolé.

A ces mots, il éclata en sanglots incontrôlables et violents.

Clément fut un court instant hypnotisé par les sanglots et les larmes du blond, il resta figé. C'était comme si le blondinet s'était... inquiété pour lui ? Était réellement désolé ? Mais plus que de la haine, Clément ressentait désormais de la peur. Il ramena sa main à lui d'un geste vif, pour se préserver du contact de Ben, comme s'il l'eut brûlé. Le démon s'assit sur le lit, et se recroquevilla, sans pour autant quitter le blond des yeux. A présent, il ressemblait plus à un petit animal terrorisé qu'à un monstre assoiffé de sang. Ben lui avait fait mal, terriblement mal. Il s'était vu mourir. Et c'était la pire expérience de sa vie. Il ouvrit la bouche dans le but de parler, mais les mots restèrent coincés dans sa gorge. Il se releva soudain, et se précipita hors de l'infirmerie, vers la cave. Son petit coin de paix lui avait manqué, plus qu'il ne le pensait. Mais le visage de Ben le hantait. Non, il ne le détestait pas. Il n'y arrivait pas.

Il l'avait repoussé et laisse seul, comme il l'avait fait lui même finalement. Son cœur semblait s'être brisé en deux, et la tristesse se transforma en une rage sourde qui l'envahit. Non... non. Clément était à lui ! Il refusait qu'il ne le laisse de la sorte. Ce n'était pas JUSTE ! Il s'était simplement vengé, il l'avait mérité ! Sa colère l'emporta sur son raisonnement, oubliant toutes ses promesses et la douceur qu'il avait mit dans ses gestes précédemment. Ça ne lui avait donc pas suffit ? Il voulait plus et connaître la partie réellement sombre du Link démoniaque ? Si il souhaitait jouer à cela, Ben jouerait, mais s'apprêtait déjà à gagner. Le cannibale ne pouvait pas faire le poids. Il retourna dans sa chambre à pas de loup, espérant que l'homme ne le remarque pas. C'était difficile, car leurs chambres respectives étaient à côté.

Mais Clément eut beau l'entendre passer devant la porte de la cave, le démon resta tapis dans l'ombre craintivement, immobile et attentif à chaque bruit. Quelque chose en lui avait changé. Il n'était plus le démon sanguinaire emplit de cruauté. Il était la proie faible dissimulée dans l'ombre en espérant se cacher du prédateur. Il ne réagit pas le moins du monde quand il entendit pareillement la porte de la chambre voisine se fermer. Il se tendait, sans bouger, dissimulé dans le noir, espérant que le blond ne l'ai pas remarqué ou ne cherche pas à rentrer. Après toutes ces péripéties, Clément était affamé. Mais il ne voulait pas sortir de sa tanière, désormais son refuge. Plus jamais il n'en sortirait, c'était ce dont il se persuadait. Le calme de Clément fut bien vite remarqué, mais personne ne s'en inquiéta. Après tout, qui se soucierait d'un monstre comme lui, qui n'avait aucune pitié ? S'il souffrait, il le méritait. Tel était la pensée des autres tueurs et créatures du manoir.

Ben avait bien sentit que le cannibale l'évitait. D'habitude, il l'aurait interpelé, mené dans sa cave, mais cette fois, il n'en fit rien. Pourtant, le blond avait bien entendu la respiration saccadée de Clément, qui devait sûrement être tapie dans l'obscurité de sa pièce, cela voulait donc dire qu'il ne désirait pas le voir, ni lui parler. Enfin dans sa chambre, le blondinet vint s'asseoir au sol, regardant avec peine sa console qui trônait devant lui. D'un côté, il voulait jouer, de l'autre, il savait très bien qu'il n'y arriverait pas. Il s'aidait tout de même son jeu et l'alluma, commençant une partie tout ce qu'il y a de plus classique. Mais une chose n'allait pas : les larmes de Ben tombaient sur son écran, le mouillaient sans cesse. Il pleurait tout en jouant et ne voyait pas ce qu'il faisait tant ses yeux étaient humides. La douleur dans son cœur se faisait plus puissante encore, insupportable, insoutenable.

Ben : S'il te plaît, reviens Clément...

Clément l'avait entendu, même s'il murmurait. Il l'entendait aussi pleurer. Mais rien à faire, il était figé par la peur. Une journée passa. Puis deux. Jamais Clément ne montra signe de vie. Il ne s'était pas nourri, et sans boire le sang de ses victimes, se déshydratait. Autant dire qu'il se laissait mourir de faim. Et Ben devait aller le voir, le raisonner. Clément ne le détestait pas. Il en avait juste une peur terrible, indescriptible. Clément se tourmentait, et les deux nuits qui passèrent, le démon faisait des cauchemars. Ben le savait, il l'entendait gémir dans son sommeil, des gémissements plaintifs, suppliants. Et comme ils étaient côte à côte, il l'entendait distinctement...

Ben trouvait le temps bien trop long, Clément aussi. Tous deux se manquaient éperdument mais n'osaient pas faire le premier pas, l'un par peur et l'autre par orgueil. Le blondinet commençait à perdre l'esprit, se répétant une bonnes dizaines de fois qu'il n'était pas le fautif avant de dormir, s'il dormait bien sûr. Il déraillerait complètement, et seul le cannibale aurait pu l'aider. Sans ses bras, il se sentait terriblement seul et sans raison d'exister. Il avait enfin trouvé quelqu'un qui était près à tout pour lui et gâchait cela par une pure pulsion incontrôlable. Il s'insultait, frappait tout ce qu'il pouvait se casser et ne jouait plus. A quoi bon ? Cela ne ferait pas revenir Clément. Un soir, alors qu'il répétait son habituelle routine de folie, la porte s'ouvrît lentement et des pas résonnèrent dans la pièce.

Ben était dans son lit, dormant, ou du moins faisant semblant, comme à son habitude. Le silence était si épais qu'il bourdonnait aux oreilles. Mais des pas discrets retentirent dans la chambre, et un froissement de vêtements. Une ombre jeta un regard hésitant et craintif à Ben. Clément avait passé beaucoup de temps seul, et il n'en pouvait plus. Il avait beau avoir peur du blond, il avait besoin de le revoir, de le toucher, de le sentir... Il se rapprocha du blond et Ben sentit un souffle chaud s'abattre contre sa nuque. Puis le démon frotta sa joue affectueusement contre le blondinet "endormit", et c'est tout naturellement que dans le calme paisible de la nuit, il s'allongea aux pieds du lit, habitué à dormir par terre, et craintif à l'idée de réveiller celui qui le hantait. Il se sentait mieux, dormir à côté de son Ben. Il sentait ses paupières se fermer toutes seules, il n'avait pas dormit depuis la dernière fois. A présent, le sommeil venait tout seul. Il émit une sorte de ronronnement, puis sombra dans les bras de Morphée. Il ne remarqua pas un seul instant ni ne sentit un regard sur lui, qui le regardait avec tendresse, soulagement, et une autre émotion...

Ben le regarda durant de longues minutes, l'observant dormir paisiblement. Il n'osa pas le toucher, de peur de le réveiller, mais l'envie était très forte. Il ne tiendrait pas longtemps et voulait s'assurer que tout allait bien. Son habituelle odeur de sang avait disparu, signe qu'il n'avait pas mangé depuis les quelques jours qui s'étaient écoulés. Une pointe d'angoisse lui tordit le ventre. Il ne souhaitait pas le voir mourir de faim, mais le cannibale n'acceptera jamais de se nourrir en sa présence. Le blondinet pouvait ressentir sa peur à travers chacun de ses gestes, regards, et cela lui brisait le cœur. Il avait été tellement cruel et peut-être que rien ne sera plus comme avant. C'était certain même. Il ne voulait pas y croire, et, poussé par toutes ces émotions qui se bousculaient en lui, le Link démoniaque passa sa main dans les cheveux de jais de Clément, appréciant la douce chaleur qui se répandait dans son bras.

Ben : Je ne te ferais plus jamais de mal... Je te le jure.

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