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Eline se mit à courir en regardant la trotteuse de sa montre avancer à une vitesse alarmante, elle allait finir par être en retard en classe si elle continuait à rêvasser en marchant avec lenteur. Ses pieds martelaient le sol au même rythme que les battements de son cœur et sa tête résonnait au son de ses pas rapides. Elle sentit ses forces la lâcher mais n'en tenu pas compte et fonça jusqu'au portail de son lycée. Eline sortit avec maladresse sa carte d'étudiante mais la fit tomber. Les mains tremblantes, elle s'apprêtait à la ramasser lorsqu'un garçon qu'elle ne connaissait pas se pencha et lui tendit avec un sourire. Elle attrapa son bien d'un geste vif sans un regard pour lui en articulant un « merci » assez sec. Lorsqu'il la dépassa avec un claquement de langue, elle ne put s'empêcher de regretter de l'avoir traité de cette façon. Hélas, elle n'eut pas le temps de prononcer des excuses car la sonnerie retentit et elle reprit sa course. Arrivée dans sa salle de classe, la jeune fille se laissa tomber sur sa chaise en soupirant. Le professeur lui jeta un regard noir et elle s'empressa de sortir ses affaires. Sa meilleure amie, Kali lui jeta un regard interrogateur. Eline l'ignora et se mit à prendre des notes. Sa main qui griffonnait sur le papier lui rappela soudain les avions papiers qu'elle LUI envoyait. Les mots d'amour écrits à la va-vite, les clins d'œil, tous ces souvenirs la firent sourire avant qu'elle ne se souvienne que cela n'arriverait plus jamais. IL n'était plus là pour la soutenir. L'adolescente était seule.

Soudainement, les larmes lui picotèrent le fond des yeux. Elle prit plusieurs respirations avant de continuer son travail en se persuadant que tout allait bien. Elle gratta le papier de sa plume et serra les dents, pleurer n'avancerait à rien. Un frisson lui parcourut le corps et elle pensa : « Un an qu'il est parti et c'est comme si l'incident s'était produit hier. »

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Kali attrapa le bras d'Eline et l'attira vers leur banc favori. Elle la regarda un instant et la força à lever la tête en posant ses doigts en dessous du menton de la jeune fille.

- Maintenant, il va falloir se reprendre. Ça fait un an que ça dure ! Oublie-le ! Je sais que ça a été difficile mais fais-toi d'autres amis, sois plus sociable.

- Je vais très bien Kali, je te remercie, fit Eline avec un sourire terrifiant.

Sa meilleure amie semblait sur le bord des nerfs. Elle se leva d'un bond, lui mit une gifle puissante et s'en fut en courant à travers la cour. « Et voilà comment j'ai perdu un autre de mes proches » pensa Eline avant de fondre en larmes. Elle prit sa tête dans ses mains et se balança de droite à gauche pour se bercer. Il fut un temps, IL lui aurait dit de ne pas s'en faire. Mais IL était maintenant l'objet de tous ses soucis, de son échec amical, scolaire et de sa situation familiale désastreuse. Elle avait tout perdu a cause de LUI.

Des camarades s'approchèrent dangereusement, alertés par les sanglots de la jeune fille mais elle les repoussa d'un geste. Seul un garçon qu'elle ne connaissait pas ne sembla pas intimidé par ses larmes et s'assit à sa droit, sur le côté mouillé du banc.

- Tu vas avoir le cul trempé, murmura Eline en le regardant du coin de l'œil.

- Oh, c'est rien, il séchera avec le vent, répondit le garçon en repliant ses jambes en dessous du banc.

La jeune fille tourna la tête et ne put s'empêcher de rire en voyant sa grande silhouette recroquevillée sur elle même et son regard soucieux qui la fixait de haut tant il était géant. Il lui sourit et son rire s'accentuât. Dans le coeur d'Eline un rayon de soleil s'embrasait et son esprit sans cesse embrumé se dégagea et sembla soudain plus clair.

- T'es qui toi ? demanda-t-elle, curieuse.

Il haussa les sourcils, étonné de la voir soudain enjouée alors qu'elle semblait au bord de la crise de nerf il y'a quelques secondes.

- Je m'appelle Donald Trump, soupira-t-il d'un ton malicieux.

- Enchantée Donald ! s'exclama la jeune fille.

- Et toi ?

- Eline, répondit-elle. Non mais sérieux, c'est quoi ton vrai nom ?

- Je ne te le dirais pas. Appelle-moi Donald à présent.

Eline repartit dans un éclat de rire, elle qui n'avait pas ri depuis... SA disparition. Cela lui fit l'effet d'une bouffée d'air.

- Oh putain, t'es un rigolo toi ! s'écria-t-elle en reprenant son souffle.

- Arrête de pleurer maintenant, lui ordonna-t-il du tac au tac.

Elle le regarda avec de grands yeux et répondit :

- Je veux juste tout oublier...

- Alors dépêche toi de retourner en cours avant que ton prof ne t'assassine.

Elle lui jeta un dernier regard avant de s'enfuir.

Je t'aimerai si j'oublie tout.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant