Je t'aimerai si j'oublie tout.

16.

Eline passa toute la matinée avec Chaeyoung. Elles burent de nombreuses tasses de chocolat chaud et mangèrent un saladier entier de petits gâteaux, les deux femmes discutèrent, firent des biscuits et chantèrent même quelques comptines pour améliorer le moral de la jeune fille. Le sentiment qu'elle éprouvait depuis qu'elle avait quitté la chambre d'hôpital se transformait en douleur sourde et atténuée par la voix douce de la grand-mère. Elle se sentait petit à petit tomber dans un sorte de léthargie, un état de bien-être mélangé à une forte fatigue et un épuisement de la vie. Elle était perdue mais relativisait, elle se sentait sage. 

Malgré tout, plus l'heure de la fin de l'opération approchait, plus la nervosité montait et étreignait ses boyaux. Vers 16 heures, elle demanda à Chaeyoung de partir. Elle ne pouvait plus supporter l'attente. L'opération prendrait fin aux alentours de 17h30 et elle se devait d'être présente lorsqu'il se réveillera, si il se réveillait...

- Il ne peut pas mourir, cria-t-elle soudainement alors qu'elle enfilait son manteau.

Les larmes se remirent à couler et la vieille femme pris Eline dans ses bras. 

- Tout va bien se passer, reviens me voir quand tu veux. 

Eline sortit de la maisonnette et se dirigea vers l'arrêt de bus. C'est alors qu'un policier courut vers elle en faisait de grands gestes. La jeune fille n'avait cependant pas aperçue l'homme qui lui mit un sac sur la tête et qui l'enferma de force dans une camionnette.

Elle se débattit pendant longtemps, elle hurlait et donnait des coups à son agresseur qui semblait avoir du mal à la retenir. Hélas, plus le véhicule roulait, plus la sonnerie de la voiture de police diminuaient. Ils avaient réussi à la semer. Eline cessa de lutter, il fallait mieux économiser ses forces. Cependant, elle n'était absolument pas détendue, l'adrénaline l'empêchait de pleurer mais elle se sentait au bord de la crise de nerf.

- Jack ! hurla-t-elle. Tu vas me le payer ! Et toi, qui m'a mis le sac sur la tête, qui es-tu au juste ?

- Je suis le coéquipier de Jack et me nomme Jung. Je lui devais un service.

Eline déglutit péniblement. Comment une ordure pareille pouvait se trouver un camarade ?

- C'est mon ancien pote d'hôpital, ricana l'ex petit ami de la jeune fille avant d'effectuer un  virage serré. On est presque arrivés.

Eline sentit une rage folle monter en elle. Sa vision était rouge, plus rien ne comptait à part SA mort, des images tordues se mouvaient dans son esprit, la folie la gagnait mais elle n'en avait pas conscience. Du sang, une bataille, des yeux révulsés, des cadavres, SON cadavre sur lequel elle marchait, piétinait, elle n'en pouvait plus... SON décès réglerait presque tous ses problèmes, sans lui elle serait aux côtés de son bien-aimé...

- SUICIDE TOI ABRUTI ! éructa l'adolescente qui avait perdu tout contrôle sur elle même. 

Jung se mit à trembler et la giffla :

- Ne dis pas ça, nom de dieu !

Un rire dément se mit à retentir depuis la cabine du conducteur et Jack murmura :

- Je suis à tes ordres mon amour. Comment on dit, un suicide à deux, c'est un suicide en amoureux... Dommage qu'on doive faire une victime collatérale.

Le véhicule s'écarta de la route et fonca vers le vide.

Bruit de ferraille.

Dérapage

Chute.

Impact...

Young-Jae se réveilla doucement, s'attendant à voir le visage d'Eline. Quelle ne fut pas sa surprise d'entendre la douce voix de sa grand-mère.

- Je suis tellement heureuse mon petit canard, si tu savais...

Il s'éteignirent et le jeune homme sourit. Les médecins vinrent lui annoncer qu'il était hors de danger, il allait enfin pouvoir vivre en bonne santé !

Mais Young-Jae ressentait un petit pincement au cœur. Où était Eline ?