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Chapitre neuf

Quand je suis remontée à l'appartement, Ju et Gail étaient à table en train de manger les restes de la veille. Je leur ai demandé pourquoi ils n'avaient rien préparé au lieu de manger de la dinde froide, les deux m'ont répondu que c'était trop bon pour en laisser. Tout comme moi ils étaient déjà habillés et prêts pour le reste de la journée.

Le repas avec Curtis et Lydie s'est très bien passé. Ils ont beaucoup apprécié le tourne-disque et m'ont dit qu'ils l'installeraient correctement au bar.

Il est 20 :00, tous nos invités viennent de partir, Julian y compris. Ma chère coloc m'a abandonné pour aller dormir chez Curtis quand elle a appris que ce dernier avait acheter un chiot à son épouse pour Noël. Elle a prétexté que "les chiots ont du mal à se faire un nouvel environnement", qu'il "allait pleurer toute la nuit" et que Curtis et Lydie "avait besoin de repos à leurs âges". Elle ne voulait surtout pas attendre le retour au travail pour le voir. Me voilà donc esseulée, pour la première fois depuis plusieurs semaines. Je m'installe à la fenêtre pour fumer.

On est le 25 décembre 2020, ça aurait du être son premier Noël. Au lieu de ça je suis seule. J'ai imaginé je ne sais combien de fois à quoi ce bébé aurait ressemblé, le son de son rire, la vie qu'on aurait eu...

Je me dirige vers ma chambre. Une des lattes du parquet est décollée, en dessous, j'ai caché mon appareil photo, celui que m'on père m'a offert, mais aussi une boite dans laquelle se trouve une écographie et un test de grossesse positif. C'était il y a six mois déjà. Les larmes me montent lorsque je regarde les seules preuves que ce bébé a existé. La plaie est encore ouverte, et elle n'est pas prête à être refermée.

Une boule s'est déjà formée dans ma gorge quand je prends mon courage à deux mains et déplie enfin le papier, noirci des mots que je lui ai écrits. Je devais brûler cette lettre que j'avais rédiger pour le père alcoolique, toxicomane et abusif de mon bébé. Je n'ai jamais pu me résoudre à appliquer les techniques du psychologue qui me suivait pour mon syndrome post-traumatique. Mes larmes tombent sur le papier et font dégouliner l'encre. Ce soir, je la brûle.

**

PDV Cameron

J'arrive devant l'immeuble des filles, mon lecteur CD à la main. J'avoue que ça m'embête un peu de m'en séparer mais tant pis, j'irai en racheter un. Je pense à celui qui est resté dans mon ancienne chambre, chez mes grands-parents, mais hors de question que j'aille le chercher chez eux.

Je ne mettrais pas un pied là-bas. Il est beaucoup trop tard et en plus je ne leur ai pas adressé un mot depuis que j'ai appris qu'ils avaient mis Gail à la porte. J'admets que moi-même j'étais en colère qu'elle laisse tomber son cursus scolaire, enfin j'étais surtout vexé qu'elle ne m'en a pas parlé alors que Tina le savait. Par-contre, l'avoir foutue dehors, en plein hiver, c'est vraiment dégueulasse.

J'ai eu hâte que le repas se termine. J'étais impatient de revenir pour voir Tina. Peu importe ce qu'elle fait, elle a toujours ce petit air à la fois détaché et espiègle qui lui donne un charme particulier et qui me donne envie de la connaître.

Je ne dis pas qu'elle me plait, même si je pense que Daphné et moi ça ne va plus durer longtemps vu que je ne supporte plus son caractère, ses crises de petite fille gâtée ni sa jalousie maladive. Et j'en ai marre d'obéir bêtement.

En tout cas, du peu de ce que j'en ai vu, j'ai envie d'en savoir plus sur Tina.

J'arrive donc chez les filles et envoie un message à Gail pour qu'elle m'ouvre. Je préfère ne pas sonner au cas où l'une d'elles dormirait.

de Abigail Donnovan :

Je suis chez Curtis ce soir, demande à Tina de t'ouvrir.

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