KYLE
Enfin à la maison !
Je tends un billet au chauffeur, descends du taxi et observe une seconde le bâtiment face à moi. Tandis que le néon du bar me fait de l’œil, le crâne de celui du club semble me fixer férocement comme chaque fois que je passe là. Et pourtant, c’est ici que je me sens vraiment chez moi.
D’un simple signe de tête, je salue le prospect, qui surveille l'entrée et nos bécanes, et me dirige droit vers la grande porte métallique. Sweet est un bon gamin. Il est avec nous depuis peu. Encore une sale histoire. On l'a retrouvé à moitié mort sur le bord de la route après une virée pour les affaires du club. Quand on l'a récupéré il n’était pas tranquille. Il faut dire que voir débarquer des dizaines de bikers venant de nulle part, ça doit foutre les jetons. On l'a soigné, pas pour faire office de bons samaritains, mais parce qu’il avait des allures de biker. S’il faisait partie d’un club ennemi, alors on se devait de le savoir. On lui a posé tout un tas de questions, auxquelles il a répondu de bonne grâce. Il faut dire qu’on ne lui a pas vraiment laissé le choix. Ça marche comme ça au club. On n’est jamais trop prudent. Laisser entrer n’importe qui, c’est laisser la porte ouverte aux cafards. Et une fois que les cafards ont élu domicile, vous avez beau appeler un désinsectiseur, c’est déjà trop tard. Le mal se sera déjà propagé jusqu’à consumer tout ce pourquoi vous vous serez battu.
Lorsqu’on a soigné Sweet, on a eu la surprise de retrouver sur son torse la signature d'un club ennemi sous la forme d’une entaille au couteau. La marque de fabrique des Sealers, le pire club du Texas. Ils ne font pas dans la dentelle et, à côté, nous sommes de vrais tendres. On a d'abord pensé qu'il en faisait partie et qu'il devait avoir sacrément merdé. On l’a ensuite soupçonné d’être une taupe, l’un de ces cafards dont je vous parlais. Il s'avère qu'on avait tout faux. À l'inverse, il avait refusé d'entrer dans leur club et ils ont voulu lui montrer qu'on ne refuse pas une offre pareille.
Le destin a fait qu'il est tombé sur nous, leurs plus grands ennemis. C'était finalement une bonne chose. À la fois pour lui, parce qu'il a désormais une famille, et pour nous, parce qu'on y a gagné une super recrue. Jeune certes, 16 ans, mais avec un potentiel de dingue. Dans deux ans il aura son patch et sera officiellement membre du club. En attendant, il arbore celui de prospect avec respect.
Sur les nerfs après cette journée de merde, j'ouvre la porte du club brusquement, si bien que les gars se redressent, tous prêt à me faire péter la cervelle si j’étais une menace. Alors que j’aperçois le bar, je n’ai qu’une hâte, c’est de me poser pénard avec une bière. Et peut-être même avec une nana sur les genoux. J'ai encore le visage de cette petite française dans le crâne et je dois m’en débarrasser. Je dois dire que c’est la première fois que mon charme ne fonctionne pas sur une femme et je ressens le besoin de me prouver à moi-même que le problème vient d’elle.
- Dure journée ? me demande Will avec un sourire en coin lorsque je me laisse tomber sur le tabouret face à lui.
- Putain, tu veux dire dure semaine ! soupiré-je en me passant une main lasse sur le visage.
- C'était aussi tendu que ça en Virginie ?
- Tu n'imagines pas à quel point, soupiré-je de nouveau. Leur chapitre part totalement en vrille. Je dois en toucher deux mots au boss tout à l'heure.
- Il est en haut.
- J'irai le voir après. Pour le moment il me faut un petit remontant.
Will me sert un verre de whisky qu'il fait glisser vers moi et, alors qu'il s'apprête à ranger la bouteille sous le bar, je l'arrête et la repose près de moi.
- Bordel. C'est à ce point-là ?
Je me contente d’acquiescer silencieusement et rebaisse les yeux sur mon verre pour le faire tourner entre mes mains. Je suis parti il y a une semaine sous la demande du président de notre chapitre. En tant que chapitre mère, on a le devoir de veiller sur la bonne tenue des différents chapitres et de leur rendre quelques coups de mains si nécessaire. Autant dire qu'on est souvent en déplacement. Cette semaine, c'était le chapitre de Virginie qui avait besoin de nous. Et ce n’était pas une façon de parler. Cela faisait déjà quelques temps que ses membres tournaient mal. Des rumeurs racontaient que leur président trempait dans des trucs sacrément louches et les rumeurs disaient vraies. S'il y a bien une chose qu'on ne fait pas dans notre club, c'est se servir des femmes. Pour nous, les femmes n'entrent pas dans nos affaires et il est strictement interdit de s'en prendre à elles ou à leurs gosses. Le chapitre de Virginie n'excepte pas à cette règle. Pourtant leur président en a décidé autrement. Il n'aurait jamais dû.
- Rogue a perdu son gilet.
- Tu déconnes là ! Ça veut dire que...
- Ouais. Les rumeurs disaient vraies, le coupé-je.
Je termine mon verre d’une traite et m'en ressert un aussitôt. Will m'accompagne et nous trinquons comme deux cons à toute cette merde. Après l’avoir bu cul sec, je me lève et récupère mon gilet.
- Bon. Souhaites-moi bonne chance.
- T'en auras besoin. Il risque d’être hors de lui.
***
Salut mes loulous ! ❤️
Aujourd'hui on entre dans la tête de Kyle ! Et oui !J'espère que ce chapitre vous a plu ?
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Hell's Sky : Menace Invisible
Misteri / Thriller"On se demande souvent ce qu'aurait pu être notre vie si un moment de celle-ci n'avait pas eu lieu. Si une simple fraction de seconde s'était passée autrement. J'ai toujours cru au destin, au fait que le moindre de nos actes peut avoir des conséquen...