Hors la loi et bientôt Reine

Chapitre 2 : La Prisonnière

Rothaïde ouvrit ses grands yeux bruns avec difficulté. Elle porta instinctivement sa main à sa tête et toucha une bosse du bout des doigts. Elle avait une migraine.

Où était-elle d'ailleurs ? Ce n'était pas sa chambre. La pièce tangua sur la droite et la princesse tendit l'oreille. Elle entendit le clapotis de vagues contre la paroi du mur et elle comprit : elle était sur le navire pirate. Elle tourna la tête de part et d'autre de la pièce et découvrit qu'elle était seule. Elle pencha les yeux sur son corps et remarqua qu'on l'avait changée. Elle portait désormais une tunique de tissu beige des plus simplistes. Elle était rêche. A l'idée que des pirates l'avaient vu nue, elle frissonna de dégoût.

Rothaïde se redressa le plus silencieusement possible. Elle sortit ses jambes du drap et les posa au sol. Seulement, à peine son pied droit eût-il touché le sol qu'elle s'écroula. La douleur dans sa cheville se raviva brusquement et elle ne put retenir un couinement de peine. Elle étouffa sa main sur sa bouche dès qu'elle s'en rendit compte, elle ne voulait pas que les renégats sachent qu'elle était réveillée.

A côté du lit, plusieurs lattes de bois étaient alignées sur la coque du bateau. La jeune femme se pencha le plus possible dans cette direction et réussit à en attraper une. Une écharde se planta dans son doigt mais elle la retira sans même y prêter attention. La planche n'était pas bien haute, mais elle lui arrivait malgré tout à la taille. Elle décida de prendre appui dessus et tenta de faire quelques pas. Ce n'était pas bien pratique mais elle n'avait pas de meilleure idée.

Elle étudia alors la pièce avec plus de détails. Il n'y avait aucune lumière à l'exception d'une vulgaire bougie presqu'entièrement consumée sur sa table de nuit. Elle trouva enfin la trappe qui lui permettrait de sortir d'ici. Elle s'en approcha et, malheureusement, ses craintes se confirmèrent quand elle entendit des voix de l'autre côté du bois. Elle ne s'y connaissait pas beaucoup en bateau mais elle comprit que la trappe menait sur le pont principal où des pirates devaient probablement être présents.

Que devait-elle faire désormais ? Sortir et indiquer sa présence ? Attendre dans l'espoir vain de se retrouver seule ? Et puis après ? S'attendait-elle à pouvoir rentrer à la nage ? Le navire était en mouvement, et qui savait combien de temps elle avait dormi. Pour ce qu'elle savait, elle pouvait déjà être à plusieurs lieues de Seinbur.

Alors lentement, elle posa son poing contre la trappe, et, en se maintenant tant bien que mal sur sa jambe en état, elle sortit la tête de l'encadrement. L'instant d'après, une femme soulevait avec affirmation le bois et l'aidait à s'élever en dehors de la chambre.

- Ce n'est pas trop tôt ! Sors, le capitaine nous a demandé de t'amener à lui dès que tu serais réveillée.

La jeune femme était petite. Son carré de cheveux roux encadrait des pommettes rebondies et enfantines, mais Rothaïde jugea malgré tout qu'elle était plus âgée qu'elle. Ses yeux étaient d'un bleu saillant, et ses lèvres tellement fines qu'elle disparaissaient dès que la jeune femme prononçait un mot. Elle était plutôt jolie, mais ses vêtements rustiques ne la mettaient pas en valeur.

Son interlocutrice tira avec force sur son bras pour la hisser en dehors de la cabine. Seulement, dans son engouement, elle ne fit pas attention à la blessure de Rothaïde et cette dernière s'écroula une fois de plus au sol. Elle ne put s'empêcher de porter sa main à son os endoloris. La pirate se pencha vers elle et fit signe au loin. Rothaïde tourna la tête dans la direction indiquée. Plusieurs femmes la regardaient avec intérêt. L'une d'elle, blonde aux longs cheveux, se détacha du groupe et vint étudier l'objet de douleur de la princesse. Elle grimaça.

- Retourne dans la cabine, il vaut mieux que tu restes couchée, finit-elle par adresser à la blessée. J'arrive dans quelques minutes avec le matériel pour te soigner.