you take things so hard and then you fall apart

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Le vent s'engouffrait dans les vêtements des pensionnaires alors que les nuages grisâtres vomissaient leur chagrin sur eux. La pluie tombait drue depuis l'apparition de la fourche à deux dents au-dessus des yeux effarouchés de la noiraude. Les gouttes d'eau glissaient sur les corps immobiles et sur Letha qui voulait par-dessus tout devenir transparente et disparaître à jamais. Son grand-père lui avait toujours répété que ses peines finiraient par disparaître, par se tarir et qu'elle serait un jour en paix. Que de foutaises. On dit que le temps guérit toutes les blessures mais, que lui restait-il, à Letha, la pauvre Fille aux Morts dont aucune blessure n'en était réellement une, que devait-elle faire quand elles n'étaient rien d'autres que des corps décomposés, flétri dans une boîte cachée au fond d'un caveau?

J'ai peur et j'ai mal.

Lorsque les plus superstitieux de son village l'insultaient de Petite Fille Maudite, la jeune fille avait des difficultés à ne pas songer à retrouver ses parents en Enfer. Pendant l'une de ses soirées où elle veillait comme d'habitude, elle était tombée par hasard sur un vieux blog aux allures sombres et s'était sentie captivée par les écrits de la personne dépressive et suicidaire qui l'avait écrit.

Après cela, pour elle, mourir n'était plus synonyme de peine, mais plutôt de délivrance. Letha était persuadée que mourir de ses propres mains n'était pas un acte égoïste, stupide et incensé, mais un acte résonné, altruiste et sacrificiel. Elle pensait qu'abandonner la vie de son plein gré, jusqu'à s'abandonner soi-même, était un acte de pure bonté. Les sociétés ont admiré pendant des centenaires des martyrs, les glorifiant toujours plus pour diverses raisons tordues. La vie de la jeune fille maudite n'était rien d'autre qu'une poussière dans le néant, sa vie à elle était insignifiante, elle se torturait de son plein gré en vivant une vie de mal être et de douleur. Se suicider, c'était sa solution. Se livrer au néant, laisser son corps à la terre et créer la rupture nécessaire.

Au moment où elle comprit que son parent divin n'était autre que le Dieu des Morts, le Roi des Enfers, le tortionnaire, l'Invisible, Letha ne put empêcher le rire sardonique qui sortit d'entre ses lèvres bleuies par le froid glacial.

Le pavé d'ossements. Le ciel rouge. Le tombeau.

Tout était si évident, tout s'expliquait.

Elle s'était tant battue, elle s'était fait mal pour réussir les épreuves de l'OLYMPUS pour rendre fier son parent, avoir son attention et lui demander des comptes concernant la mort de sa mère. Mais l'ironie du sort voulait que ce soit son propre père qui ait gardé sa maman adorée dans les tréfonds de son antre pour l'éternité. L'envie de vomir devenait de plus en plus présente alors que les chuchotements montaient en puissance dans l'assemblée face à elle.

Ses orbes d'obsidiennes ne se détachaient pas des nuages noirâtres et des serpents qui se faufilaient à l'intérieur dans des ombres cauchemardesques. Letha ne savait quoi faire, ses membres étaient tous figés, incapable de répondre à un ordre de son cerveau. Après tout, sa capacité à réfléchir s'était elle aussi envolée comme par magie.

L'envie de mourir qu'elle avait quand elle était jeune était partie avec le temps, mais l'envie de comprendre la raison pour laquelle elle subissait tant de pertes, tant de chagrin et tant de malédiction, ne s'en était pas allée. Le passé de la Fille aux Morts ruinait constamment son présent, réduisant les prémices de son futur à des vestiges de rêves destinés au néant.

Mille et unes pensées fusaient dans sa petite tête alors que les murmures se transformaient en paroles distinctes. Letha ne prenait pas la peine de les écouter, bien trop préoccupée. Ses camarades eux par contre décidèrent de la traîner hors de l'estrade sur laquelle elle était perchée pour ramener le calme.

Live Like Legends.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant